P R E U V E S
DE LA
T H E O R I E D E L A T E R R E .
A R T I C L E XV I.
Des Vmcaris é f des Tremblemens de terre.
Les montagnes ardentes qu’on appelle Volcans renfer-;
ment dans leur fein le foufre, Je bitume & les matières
qui fervent d’aliment à un feu foûterrain, dont l’effet
plus violent que celui de la poudre ou du tonnerre, a de
tout temps étonné, effrayé les hommes, & défolé la terre;
un volcan eft un canon d’un volume immenfe, dont l’ou-
, verture a fouvent plus d’une demie-lieue ; cette large
bouche à feu vomit des torrens de fumée & de flammes,
des fleuves de bitume, de foufre & de métal fondu, des
nuées de cendres & de pierres , & quelquefois: elle lance
à plufieurs lieues de diftance des maffes de rochers énormes
, & que toutes les forces humaines réunies ne pour-
roient pas mettre en mouvement; l’embrafement efl fl
terrible, & la quantité des matières ardentes, fondues,
calcinées, vitrifiées que la montagne rejette, efl: fi abondante,
qu’elles enterrent les villes, les forêts, couvrent les
campagnes de cent & de deux cens pieds d ’épaiffeur, &,
forment quelquefois des collines & des montagnes qui ne
font que des monceaux de ces matières entaflees. L ’action
de ce feu eft fi grande, la force de I’èxplofion eft fi
violente qu’elle produit par fa réaélion des fecouffes affez
fortes pour ébranler & faire trembler la terre, agiter la
mer, renverfer les montagnes, détruire les villes & les
édifices les plus folides à des diftances même très-confi-
dérables.
Ces effets, quoique naturels, ont été regardez comme
des prodiges, & quoiqu’on voie en petit des effets du feu
âffez femblablès à ceux des volcans, le grand, de quelque
nature qu?il fort, a fi fort le droit de nous étonner que je
ne luis pas furpris que quèlques auteurs aient pris ces montagnes
pour les foupiraux d’un feu central, & le peuplé
pour les bouches de l’enfer. L ’étonnement produit la
crainte , & la crainte fait naître la fuperftition ; les. habita'ns
de fille d’Iflande croient'que les mugiffemens de leur
volcan font les cris des damnez, & que leurs éruptions
font les effets de la fureur & du défefpoir de ces malheureux.
Tout cela n’cft cependant que dû bruit, du feu & dé la
fumée; ilfe trouvé dans une montagne'des veines de fou-
fre, de bitume & d’autres-matières Inflammables, il s’y
trouve en même temps des minéraux, des pyrites qu (-peuvent
fermenter, & qui ferrnebtent eh effet toutes les fois
qu’ellesfont expofées à l’air ou à l’humidité, Il s’en trouve
ènfemble une très-grande quantité, lé feu s’y met &- caufe
une exploffon proportionnée à: la quantité des matières
enflammées ; & dont les effets font aufli plus ou moins •