2i4- H i s t o i r e N a t u r e l l e .
du globe, nous ne pouvons pas fçavoir au jufte la proportion
qui eft entre la furface de la terre & celle de la mer;
feulement, autant qu’on en peut juger par i’mfpechon de
ce qui eft connu, il paraît qu’il y a plus de mer que de
terre.
Si l’on veut avoir une idée de la quantité énorme d’eau
que contiennent les mers, on peut fuppofer une profondeur
commune & générale à l’océan, & en ne la faifant
que de deux cens toifes ou de la dixième partie d’une
lieue, on verra qu’il y a allez d’eau pour couvrir le globe
entier d’une hauteur de fix cens pieds d’eau ; & fi on veut
réduire cette eau dans une feule malle, on trouvera qu’elle
fait un globe de plus de foixante lieues de diamètre.
Les Navigateurs prétendent que le continent des terres
auftrales eft beaucoup plus froid que celui du pôle arctique
, mais il n’y a aucune apparence que cette opinion
foit fondée, & probablement elle n’a été adoptée des
voyageurs, que parce qu’ils ont trouvé des glaces a une
latitude où l’on n’en trouve prefque jamais dans nos mers
feptentrionales, mais cela peut venir de quelques caufes
particulières. On ne trouve plus de glaces des le mois
d ’avril en deçà des 67 & 68 degrés de latitude fepten-
trionale, & les Sauvages de l’Acadie & du Canada difent
que quand elles ne font pas toutes fondues dans ce mois-
là , c’eft une marque que le relie de l’année fera froid &
pluvieux. En 1725 il n’y eut, pour ainfi dire, point d’été,
& il plut prefque continuellement; aufli non feulement les
glaces des mers ^feptentrionales n’étoient pas fondues au
T h é o r i e d e l a T e r r e . 215
m o is d ’a v r il au 6 7™' d e g r é , mais m êm e o n en t ro u v a au
1 < ju in v e r s le 4.1 o u 4.2““ d e g r é . Voyez ï Hiß. de ïAcad,
année iy^y.
On trouve une grande quantité de ces glaces flottantes
dans la mer du nord, fur-tout à quelque diftance des
terres; elles viennent de la mer de Tartarie dans celle de
la nouvelle Zemble & dans les autres endroits de la mer
glaciale. J ’ai été alluré par des gens dignes de foi, qu un
Capitaine Anglois, nomme Monfon, au lieu de chercher
un palfage entre les terres du nord pour aller a la Chine,
avoit dirigé la route droit au pôle & en avoit approché
jufqu’à deux degrés ; que dans cette route il avoit trouvé
une haute mer làns aucune glace, ce qui prouve que les
glaces fe forment auprès des terres & jamais en pleine
mer ; car quand même on voudrait fuppofer, contre toute
apparence, qu’il pourrait faire aftez froid au pôle pour
que la luperficie de la mer fut glacee,on ne concevroitpas
mieux comment ces énormes glaces qui flottent, pourraient
fe former, fi elles ne trou voient pas un point d appui
contre les terres, d’où enfuite elles fe détachent par la
chaleur du foleil. Les deux vaiffeaux que la Compagnie
des Indes envoya en 1739 à la decouverte des terres
auftrales, trouvèrent des glaces a une latitude d"e 4 7 ou
4.8 degrés, mais ces glaces n étaient pas fort éloignées
des terres , puifqu’ils les reconnurent, fans cependant
pouvoir y aborder. Voyez f ur ce^a earte de M. Bua-
che, Ces.glaces doivent venir des terres intérieures
& voifines du pôle auftral, & on peut conjecturer