3 ) 0 H i s t o i r e N a t u r e l l e .
de la mer y avoit tranfporté 6c dépofé, de la même façon
& par les mêmes caufes qu’elle a dépofé 6c tranfporté dans
les lieux un peu plus bas de ces montagnes une grande
quantité de coquillages , 6c confidérons cette couche,
extérieure de fable vitrifiable comme pofée d’abord de
niveau & formant un plat-pays de fable au deffus des
montagnes des Alpes, lorfqu’elles étoient encore couvertes
des eaux de la mer; il fe fera formé dans cette
épaiffeur de fable des noyaux de roc, de grès, de caillou
6c de toutes les matières qui prennent leur origine & leur
figure dans les fables par une méchanique à peu prèsfem-
blable à celle de la cryftallifation des fels. Ces noyaux une
fois formez auront foutenu les parties où ils fe font trouvez
, 6c les pluies auront détaché peu à peu tout le fable
intermédiaire, auffi-bien que celui qui les environnoit immédiatement
; les torrens, les ruiffeaux, en fe précipitant
du haut de ces montagnes, auront entraîné ces fables dans
les vallons, dans les plaines, 6c en auront conduit une
partie jufqu’à la mer ; de cette façon le fommet des montagnes
fe fera trouvé à découvert, & les noyaux déchauffez
auront paru dans toute leur hauteür, c’eft ce que nous
appelions aujourd’hui des pics ou des cornes de montagnes
, & ce qui a formé toutes ces éminences pointues
qu’on voit en tant d’endroits; c’efl: auffi là l’origine de
ees roches élevées 6c ifolées qu’on trouve à la Chine 6c
dans d’autres endroits, comme en Irlande, où on leur
a donné le nom de Devil’s Jlones ou Pierres du diable,
6c dont la formation, auffi-bien que celle des pics des
montagnes, avoit toujours paru une chofe difficile à expliquer:
cependant l’explication quej’en donne, eft fi naturelle
quelle s’efl préfentée d’abord à l’efprit de ceux qui ont
vû ces roches, & je dois citer ici ce qu’en dit le Père du
Tartre dans les lettres édifiantes : « De Yan-chuin-yen nous
vînmes à Ho-tcheou, nous rencontrâmes en chemin une «
chofe afTez particulière, ce font des roches d’une hauteur «
extraordinaire & de la figure d’une grofTe tour quarrée «
qu’on voit plantées au milieu des plus vaftes plaines, on «
ne fçait comment elles fe trouvent là , fi ce n’eft que ce «
furent autrefois des montagnes, 6c que les eaux du ciel«
ayant peu à peu fait ébouler la terre qui environnoit ces «
maffes de pierre, les aient ainfi a la longue efearpées de «
toutes parts: ce qui fortifie la conjedure, c’elt que nous «
en■ vimes quelques-unes qui vers le bas font encore envi- «
ronnées de terre jufqu’à une certaine hauteur. » Voyez Lértr.
e d if rec. 2, tome 1, page /j> r, tVc.
Le fommet des plus hautes montagnes eft donc ordinairement
compofé de rochers 6c de plufieurs efpèces de
granité, de roc vif, de grès 6c d’autres matières dures 6c
vitrifiables, 6c cela fouvent jufqu’à deux ou trois cens
toifes en defeendant, enfuite on y trouve fouvent des
carrières de marbre ou de pierre dure qui font remplies
de coquilles, 6c dont la matière eft calcinable, comme on
peut le remarquer à la grande Chartreufe en Dauphiné 6c
fur le mont Cenis, où les pierres 6c les marbres qui contiennent
des coquilles, font à quelques centaines de toifes
au deffous des fommets, dçs pointes 6c des pics des plus