» toutes ces pierres figurées de Saint-Chaumont ce pheno-
» mène qui eft affez bizarre; nous lui en laifions i explica-
» tion pour paffer à ce que ces fortes dobfervations ont
» de plus général & de plus intereffant.
» Toutes les plantes gravées dans les pierres de Saint-
» Chaumont font des plantes étrangères, non feulement
» elles nefe retrouvent ni dans le Lyonnois, ni dans le refte
» de la France, mais elles ne font que dans les Indes orien-
» taies dedans les climats chauds de l’Amérique; ce font la
» plupart des plantes capillaires, & fouvent en particulier
» des fougères. Leur tifïù dur & ferre les a rendu plus
» propres à fe graver & a le conlerver dans les moules au-
» tant de temps qu’il a fallu. Quelques feuilles de plantes
» des Indes imprimées dans des pierres d Allemagne ont
d paru étonnantes à M. Leibnitz * , voici la meme mer-
» veille infiniment multipliée; il femble meme qu il y ait a
» cela une certaine affectation de la Nature, dans toutes les
» pierres de Saint-Chaumont on ne trouve pas une feule
» plante du pays.
» Il eft certain par les coquillages des carrières & des
» montagnes, que ce pays, ainfi que beaucoup d autres, a
» dû autrefois être couvert par l’eau de la mer ; mais com-
» ment la mer d’Amérique ou celle des Indes Orientales
» y eft-elle venue !
» On peut, pour fatisfaire à plufieurs phenomenes, fùp-
» pofer avec affez de vrai-femblance que la mer a couvert
» tout le globe de la terre; mais alors il n’y avoit point de
'* Voyez l’Hift. de 1706, pag. 9 & &iv.
T h é o r i e d e l a T e r r e . 307
plantes terreftres, & ce n’eft qu après ce temps-là, & «
lorfqu’une partie du globe a été découverte, qu’il s’eft «
pû faire les grandes inondations qui ont tranlporté des te
plantes d’un pays dans d’autres, fort éloignez. «
M. de Juffieu croit que comme le lit de la mer hauffe <t
toujours parles terres, le limon, les fables que les rivières «
y charient inceffamment, des mers renfermées d ’abord «
entre certaines digues naturelles, fontvenues à les furmon- «
ter & fe font répandues au loin ; que les digues aient elles- «
mêmes été minées par les eaux & s’y foient renverfées, «
ce fera encore le même effet, pourvu qu’on les fùppofe «
d ’une grandeur énorme. Dans les premiers temps de h «
formation *de la terre, rien n’avoit encore pris une forme «
reglee & arretee, il a pû fe faire alors des révolutions «
prodigieufes & fubites dont nous ne voyons plus d’exem- «
pies, parce que tout eft venu à peu près à un état de ce
confiftance, qui n’eft pourtant pas tel que les changemens «
lents & peu confidérabîes qui arrivent, ne nous donnent ce
lieu d en imaginer comme poffibles d’autres de même te
efpece, mais plus grands & plus prompts. «
Par quelqu’une de ces grandes révolutions la mer des ce
Indes, foit orientales, foit occidentales, aura étépouffée ce .
jufqu en Europe, & y aura apporté des plantes étrangères ce
flottantes fur fes eaux, elle les avoit arrachées en chemin ce
& les alloit dépofer doucement dans les lie.ux où l’eau «e
n etoit qu en petite quantité & pouyoit s’évaporer. »