Toutes ces rivières tranfportent à ia mer avec leurs eaux
une grande quantité de parties minérales &falines qu elles
ont enlevées des différens terreins par-où elles ont paffe.
Les particules de fel qui, comme l’on fçait, fe difloivent
aifèment, arrivent à la mer avec les eaux des fleuves.
Quelques Phyficiens, & entr’autres Halley, ont prétendu
que la falûre de la mer ne provenoit que des Tels de la
terre que les fleuves y transportent; d autres ont dit que
la falûre de la mer étoit aulfl ancienne que la mer meme,
& que ce fel n’avoit été créé que pour l’empêcher de fe
corrompre, mais on peut croire que I eau de la mer eft
prcfervée de la corruption par l’agitation des vents & par
celle du flux & reflux, autant que par le fel qu’elle contient
; car quand on la garde dans un tonneau, elle fe
corrompt au bout de quelques jours, & Boyle rapporte
qu’un Navigateur pris par un calme qui dura treize jours,
trouva la mer fi infectée au bout de ce temps, que fi lé
calme n’eût ceffé , la plus grande partie de fon équipage
aurait péri. Vol. 3 , p a& 222. L eau de la mer eft aufli
mêlée d’une huile bitumineufe, qui lui donne un goût
défagréable & qui la rend très-mal-faine. La quantité
de fel que l’eau de la mer contient, eft d’environ une
quarantième partie, & la mer eft a peu près egalement
falée par-tout, au defliis comme au fo n d , également
fous la ligne & au cap de Bonne - efperance, quoiqu il'
y ait quelques endroits , comme à la cote, de Mofam-
bique ,.:0Ù elle eft plus falée qu ailleurs. Voyez Boyle,
vol.y j 2iy• On prétend aufli qu elle eft moins, fâlee
dans la
T h é o r i e de la T e rr e . 361
dans la zone arétique, cela peut venir de la grande quantité
de neige & des grands fleuves qui tombent dans ces mers,
& de ce que la chaleur du foleil n y produit que peu d’évaporation
, en comparaifon de l’évaporation qui fe fait dans
les climats chauds.
Quoi qu’il en foit, je crois que les vraies caufes de la
falûre de la mer font non feulement les bancs de fel qui
ont pû fe trouver au fond de la mer & le long des côtes,
mais encore les fels mêmes de la terre que les fleuves y
tranfportent continuellement, & que Halley a eu quelque
raifon de préfumer qu’au commencement du monde la
mer n’étoit que peu ou point falée , quelle l’eft devenue
par degrés & à mefure que les fleuves y ont amené des
fels ; que cette falûre augmente peut-être tous les jours &
augmentera toûjours de plus en plus, & que par conféquent
il a pû conclurre qu en faifànt des expériences pour recon-
noitre la quantité de fel dont 1 eau d un fleuve eft chargée
lorfqu elle arrive à la mer, & qu’en fupputant la quantité
d’eau que tous les fleuves y portent, on viendrait à con-
noître l’ancienneté du monde par le degré de la falûre de
la mer.
Les plongeurs & les pêcheurs de perles aflùrent, au
rapport de Boyle, que plus on defeend dans la mer, plus
l’eau eft froide ; que le froid eft même fi grand à une profondeur
confidérable, qu’ils ne peuvent le fouffrir, & que
c eft par cette raifon qu’ils ne demeurent pas auffi longtemps
fous 1 eau, lorfqu ils defeendent à une profondeur
un peu grande, que quand ils ne defeendent qu’à une petite
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