328 H i s t o i r e N a t u r e l l e .
certaines matières rejetées par les volcans, dont j ai vû
une grande quantité étant en Italie, où 1 on me dit que
les gens du pays les appelloient fchiarri. Ce font des
malles noirâtres fort pelantes fur lefquelles le feu, l’eau,
ni la lime ne peuvent faire aucune imprelfion, dont là
matière ell différente de celle de la lave; car celle-ci
elt une efpèce de verre, au lieu que l’autre paroît plus
métallique que vitrée. Les clous du grès & du roc vif
reflemblent beaucoup à cette première matière, ce qui
femble prouver encore que toutes ces matières ont été
autrefois liquéfiées par le feu.
On voit quelquefois en certains endroits, au plus
haut des montagnes, une prodigieufe quantité de blocs
d’une grandeur confidérable de ce roc vif, mêlé de paillettes
talqueufes ; leur pofition eft fi irrégulière , qu’ils
paroiflent avoir été lancez & jetez au hafard, & on croirait
qu’ils font tombez de quelque hauteur voifine, fi les
lieux où on les trouve, n’étoientpas élevez au deflus de
tous les autres lieux; mais leurfubftance vitrifiable & leur
figure anguleufe & «quarrée comme celle des rochers de
grès, nous découvre une origine commune entre ces
matières; ainfi dans les grandes couches de fable vitrifiable
il fe forme des blocs de grès & de roc v if, dont la
figure & la fituation ne fui vent pas exaélement la pofition
horizontale de ces couches ; peu a peu les pluies ont
entraîné du fommet des collines & des montagnes, le
fable qui les couvrait d’abord, & elles ont commencé
par fillonner & découper ces collines dans les intervalles
* nui
qui fe font trouvez entre les noyaux de grès, comme on
voit que font découpées les collines de Fontainebleau.
Chaque pointe de colline répond à un noyau qui fait une
carrière dégrès;, & chaque intervalle a été creufé& abaiffe
par les eaux, qui ont fait couler le fable dans la plaine : de
meme les plus hautes montagnes, dont les fommets font
compofez de roc vif & terminez par ces blocs anguleux
dont nous venons de parler, auront autrefois été recouvertes
de plufieurs couches de fable vitrifiable dans lequel
ces blocs fe feront formez:, &. les pluies ayant entraîné
tout le fable qui les couvrait & qui les environnoit, ils
feront demeurez au fommet des montagnes dans la pofition
où ils auront été formez.' Ces blocs préfentent ordinairement
des pointes au deflus & à l’extérieur, ils vont
en augmentant de groffeur à mefure qu’on defcend &
qu’on fouille plus profondément, fouvent même un bloc
en rejoint un autre par la bafe, ce fécond un troifième, 6c
ainfi de fuite en laiflant entr’eux des intervalles irréguliers;
& comme par lafucceffion des temps les pluies ont enlevé
& entraîné tout le fable qui couvrait ces différens noyaux,
il ne refte au deflus des hautes montagnes que les noyaux
memes qui forment des pointes plus ou moins élevées, &
c eft-lal origine des pics ou des cornes de montagnes.
Car fuppofons, comme il eft facile de le prouver par
les productions marines qu’on y trouve, que la chaîne des
montagnes des Alpes ait été autrefois couverte des eaux
de la mer, & qu au deflus de cette chaîne de montagnes
il y eût une grande épaifléur de fable vitrifiable que l’eau
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