les parties des pôles fe foient abaiffées d’environ line
lieue, & que les parties de l’équateur fe foient élevées
de la même quantité. Cela ne s’eft pas fait tout à coup,
mais peu à peu & dans la fuccdfion des temps, la terre
étant à l’extérieur expofée aux vents, à l’aétion de l’air
& du foleil, toutes ces caufes irrégulières ont concouru
avec le flux & reflux pour fillonner fa lùrface, y creufer
des profondeurs, y élever des montagnes, ce qui a produit
des inégalités, des irrégularités dans cette couche
de terre remuée, dont cependant la plus grande épaifleur
ne peut être que d’une lieue fous l’équateur; cette inégalité
de deux lieues eft peut-être la plus grande qui
puiffe être à la furface de la terre, car les plus hautes
montagnes n’ont guère qu’une lieue de hauteur, & les
plus grandes profondeurs de la mer n’ont peut-être pas
une lieue. La théorie eft donc vraie, & la pratique peut
l’être auffi ; la terre a dû d’abord n’être élevée fous l’équateur
que d’environ fix lieues & demie dè plus qu’au
pôle, & enfuite par les changemens qui font arrivez à
fa furface, elle a pû s’élever davantage. L ’Hiftoire Naturelle
confirme merveilleufèment cette opinion, & nous
avons prouve dans le difcours précédent, que c’eft le
flux & reflux & les autres mouvemens des eaux qui ont
produit les montagnes & toutes les inégalités de la fur-,
fàce du globe, que cette même furface a fubi des changemens
très-confidérables, & qu’à de grandes profondeurs,
comme fur les plus grandes hauteurs, on trouve
des os, des coquilles & d’autres dépouilles d’animaux
habitans des mers ou de la furface de la terre.
On peut conjeéturer par ce qui vient d’être dit , que
pour trouver la terre ancienne & les matières qui n’ont
jamais été remuées, il faudrait creufer dans les climats
voifins des pôles, où la couche de terre remuée doit être
plus mince que dans les climats méridionaux.
Au refte, fi l’on examine de près les mefures par lef-
quelles on a déterminé la figure de la terre, on verra bien
qu’il entre de fhypothétique dans cette détermination,
car elle fuppofe que la terre a une figure courbe régulière,
au lieu qu’on peut penfer que la furface du globe ayant
été altérée par une grande quantité de caufes combinées
à l’infini, elle n’a peut-être aucune figure régulière, &
dès-lors la terre pourrait bien n’être en effet applatie que
d ’une a j o ”"' partie, comme le dit Newton,& comme la
théorie le demande. D ’ailleurs, on fçait bien que quoiqu’on
ait exactement la longueur du degré au cercle polaire &
à l’équateur, on n’a pas aulfi exactement la longueur du
degré en France, & qiie l’on n’a pas vérifié la mefure de
M. Picard. Ajoûtez à cela que la diminution & l’augmentation
du pendule ne peuvent pas s’accorder avec le réfultat
des mefures, & qu’au contraire elles s’accordent à très-peu
près avec la théorie de Newton; en voilà plus qu’il n’en
faut pour qu’on puiffe croire que là terre n’eft réellement
applatie que d’une 230me partie, & que s’il y a quelque
différence, elle ne peut venir que des inégalités que les
eaux & les autres caufes extérieures ont produites à la
furface ; & ces inégalités étant, félon toutes les apparences,
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