loo H i s toi r e Na tur e l l e .
golphe ancien de l’Océan, mais qu elle a ete formée par
une irruption des eaux, produite par quelques caufes accidentelles
, comme ferait un tremblement de terre, lequel
auroit affailfé les terres à l’endroit.du détroit, ou un violent
effort de l’Océan caufé par les vents, qui auroit rompu
la digue entre les promontoires de Gibraltar & de
Ceuta. Cette opinion eft appuyée du témoignage des
Anciens * qui ont écrit que la mer Méditerranée n exif-
toit point autrefois, & elle eft, comme on voit, confirmée
par l’Hiftoire Naturelle & paries obfervations qu on
a faites fur la nature des terres à la côte d’Afrique & à
celle d’Efpagne, où l’on trouve les mêmes lits de pierre,
les mêmes couches de terre en deçà & au delà du détroit,
à peu près comme dans de certaines vallees ou les deux
collines qui les furmontent fe trouvent etre compofées
des mêmes matières & au même niveau.
L ’Océan s’étant donc ouvert cette porte, a d’abord
coulé par le détroit avec une rapidité beaucoup plus grande
qu’il ne coule aujourd’hui, & il a inonde le continent
qui joignoit l’Europe à 1 Afrique; les eaux ont couvert
toutes les baffes terres dont nous n apercevons aujourd’hui
que les éminences & les fommets dans, 1 Italie &
dans les ifles de Sicile, de Malthe, de Corfe, de Sardaigne
, de Chypre, de Rhodes & de I Archipel.
Je n’ai pas compris la mer Noire dans cette irruption
de l’Océan, parce qu’il paraît que la quantité d eau
qu’elle reçoit du Danube, du Niéper, du Don & de
* Diodore de Sicile, Sttabon.
plufieurs autres fleuves qui y entrent, eft plus que fuffi-
fantc pour la former, & que d ’ailleurs elle “ coule avec
une très-grande rapidité par le Bofphore dans la mer
Méditerranée. On pourrait même préfumer que la mer
Noire & la mer Cafpienne ne faifoient autrefois que deux
grands lacs qui peut-être étoient joints par un détroit de
communication, ou bien par un marais ou un petit lac
qui réuniffoit les eaux du Don & du. Volga auprès de
Tria, où ces deux fleuves font fort voifins l’un de l’autre,
& l’on peut croire que ces deux mers , ou ces deux lacs
étoient autrefois d’une bien plus grande étendue qu’ils
ne font aujourd’hui; peu à peu ces grands fleuves, qui
ont leurs embouchures dans la mer Noire & dans la mer
Cafpienne, auront amené une affez grande quantité de
terre pour fermer la communication, remplir le détroit
& féparer ces deux lacs; car on fçait quavec le temps,
les grands fleuves rempliffent les mers & forment des
continens nouveaux, comme la province de l’embouchure
du fleuve jaune à la.Chine,, la Louifiane à l’embouchûre
du Miffiiïîpi,. & la partie fcptentrionale de l’Egypte qui
doit fon origineb & fon exiftence aux inondations c du
Nil. La rapidité de ce fleuve entraîne les. terres de i’irv-
térieur de l’Afrique, & il les dépofe enfùite dans fes
débordemens en fi grande quantité qu’on peut fouiller
jufqu’à cinquante pieds dans l’épaiffeur de ce limon dé-
pofé par les inondations du Nil; de même les terreins
a Voyez Tranf. Phîl. Abrig’d* vol, vol. 2. page .173. ju/qu’à la page.
2.1 pQg • -2 891 188.
b Voyez les voyages de Shaw> * Voyez les preuves, art. 19.
N iij