c’eft comme s’il en arrivoit une plus grande quantité. L ’on
peut remarquer à l'oçcafion de cette diminution , que s’il
arrive qu’un vent confiant fouffle contre le courant de la
rivière, l’inondation fera beaucoup plus grande quelle
n’auroit été fans cette caufè accidentelle, qui diminue là
vîtefle de l’eau; comme au contraire, fi le vent fouffle
dans la même direction que fuit le courant de la rivière,
l’inondation fera bien moindre & diminuera plus promptement.
Voici ce que dit M. Granger du débordement
du Kg
« La crue du Nil & fon inondation a long-temps oc-
„ cupé les Sçavans; la plûpart n’ont trouvé que du mer-
» veilleux dans la chofe du monde la plus naturelle, & qu’on
» voit dans tous les pays du monde. Ce font les pluies qui
» tombent dans l’Abyffinie & dans l’E'thiopie qui font la
» croiffance & l’inondation de ce fleuve, mais on doit re-
» garder le vent du nord comme caufe primitive, i° parce
» qu’il chafle les nuages qui portent cette pluie du côté de
„ l’Abyffinie, 20 parce qu’étant le traverfier des deux em-
„ bouchères du Nil, il en fait refouler les eaux à contre-
„ mont, & empêche par-là qu’elles ne fe jettent en trop
„ grande quantité dans la mer : on s’aflure tous les ans de
„ ce fait lorfque le vent étant au nord & changeant tout à
„ coup au fud, le Nil perd^lans un jour ce dont il étoit
Crû dans quatre. » Pages 13 dr 14, Voyag. de Granger,
Paris 174Jr
Les inondations font ordinairement plus grandes dans
les parties fupérieures des fleuves, que dans les parties
Th é o r i e de la Terre. 3.51
inférieures & voifines de leur embouchure , parce que,
toutes chofes étant égales d’ailleurs, la vîtefle d’un fleuve
va toujours en augmentant jufqu’à la mer ; & quoiqu’or-
dinairement la pente diminue d’autant plus qu’il eft plus
près de fon embouchure, la vîtefle cependant eft fouvent
plus grande par les raifons que nous avons rapportées.
Le Père Caftelli qui a écrit fort fenfément fur cette matière,
remarque très-bien que la hauteur des levées qu’on
a faites pour contenir le Pô, va toûjours en diminuant
jufqu’à la mer, en forte qu’à Ferrare, qui eft à cinquante
ou foixante milles de diftance de la mer, les levées ont
près de vingt pieds de hauteur au. defliis de la furface ordinaire
du Pô, au lieu que plus bas, à dix ou douze milles
de diftance de la mer, les levées n’ont pas douze pieds,
quoique le canal du fleuve y foit auffi étroit qu’à Ferrare..
Voyez Racolta d’autori che trattano del moto deJT acque,
vol. 1, pag. 127.
Au refte, la théorie du mouvement des eaux courantes,
eft encore fùjette à beaucoup de difficultés & d’obfcurités,
&. if eft très-difficile de donner des règles générales qui-
puiflent s’appliquer à tous les casparticuliers: l’expérience
eft ici plus néceflaire que la fpéculation, il faut non feulement
connoître par expérience les effets ordinaires des
fleuves en général, mais il faut encore connoître en particulier
la rivière à laquelle on a affaire,-fi l’on: veut en
taifonner jufte & y faire des travaux utiles & durables. Les
remarques que j’ai données ci-deffus, font nouvelles pour
la plûpart ; il feroit à defirer qu’on raffemblât beaucoup