de la province de la rivière Jaune & de la Louifiane ne
fe font formez que par le limon des fleuves.
Au refte la mer Cafpienne eft actuellement un vrai
lac qui n’a aucune communication avec les autres mers,
pas même avec le lac Aral qui paroit en avoir fait partie,
& qui n’en eft féparé que par up vafte pays de fable dans
lequel on ne trouve ni fleuves, ni rivières, ni aucun canal
par lequel la mer Cafpienne puifle verfer fes eaux. Cette
mer n’a donc aucune communication extérieure avec les
autres mers, & je ne fçais fi 1 on eft bien fonde a foup-
çonner qu’elle en a d’interieure avec la mer Noire ou
avec le golphe Perfique. II eft vrai que la mer Cafpienne
reçoit le Volga & plufieurs autres fleuves qui femblent
lui fournir plus d’eau que l’évaporation n en peut enlever,
mais indépendamment de la difficulté de cette eftimation
il paraît que fi elle avoit communication avec l’une ou
l’autre de ces mers, on y aurait reconnu un courant rapide
& confiant qui entraînerait tout vers cette ouverture qui
ferviroit de décharge à fes eaux, & je ne fçache pas qu on
ait jamais rien obfervé de fomblable fur cette mer; des
Voyageurs exaéb, fiir le témoignage defqùels on peut
compter, nous afliirentle contraire, & par confequent il
eft néceflaire que l’évaporation enleve de la mer Calpienne
une quantité d’eau égale à celle qu’elle reçoit.
On pourrait encore conjeéturer avec quelque vrai-fem-
blance que la mer Noire fera un jour feparee de la Mediterranée,
& que le Bofphore fe remplira lorfque les grands
fleuves qui ont leurs embouchûres dans le Pont-Euxin
T h é o r i e d e l a T e r r e . io j
auront amené une aflez grande quantité de terre pour
fermer le détroit; ce qui peut arriver avec le temps, &
par la diminution fuccelfive des fleuves, dont la quantité
des eaux diminue à mefure que les montagnes & les pays
élevez dont ils tirent leurs fources, s’abaiflent par le
dépouillement dés terres que les pluies entraînent & que
les vents enlèvent.
La mer Cafpienne & la mer Noire doivent donc être
regardées plutôt comme des lacs que comme des mers
ou des golphes de l’Océan ; car elles reffemblent à d’autres
lacs qui reçoivent un grand nombre de fleuves & qui
ne rendent rien par les voies extérieures, comme la mer
Morte, plufieurs lacs en Afrique, &c. d’ailleurs les eaux
de ces deux mers ne font pas à beaucoup près auffi faites
que celles de la Méditerranée ou de l ’Océan, & tous les
voyageurs affurent que la navigation eft très-difficile fur
la mer Noire & fur la mer Calpienne, à caufe de leur peu
de profondeur & de la quantité d’écueils & de bas-fonds
qui s y rencontrent, en forte qu’elles ne peuvent porter
que de petits vaiflèaux * ; ce qui prouve encore quelles
ne doivent pas être regardées comme des golphes de
1 Océan, mais comme des amas d’eau formez par les
grands fleuves dans l’intérieur des terres.
Il arriverait peut-etre une irruption confidérable de
1 Océan dans les terres, fi on coupoit l’ifthmequi fépare
l’Afrique de l’Afie, comme les Rois d’Egypte, & depuis
les Califes en ont eu le projet; & je ne fçais fi le canal
* Voyez les Voyages de Pieiro ddla Valte, vol. 3. pag. 23 6.