
On s’est apparemment persuadé qu’une pareille
échelle régulière, formée avec les espèces et les
genres, devait être la preuve de la progression dont
il est question ; et comme l’observation atteste qu’il
n’est pas possible d’en former une semblable, parce
que l’échelle qu’on exécuterait avec les espèces et
les genres, rangés d’après leurs rapports, ne présenterait
qu’une série irrégulière, interrompue, et
offrant des anomalies nombreuses et diverses, on
n’a donné aucune attention a la progression dont
il s’agit, et l’on s’est cru autorisé à méconnaître,
dans cette progression, la marche des opérations
de la nature.
Cette considération étàrit devenue dominante parmi
les zoologistes, la science s’est trouvé privée du
seul guide qui pouvait assurer ses vrais progrès ; des
principes arbitraires ont été mis à là place de ceux
qui doivent diriger la marche de l’étude ; et si le
sentiment de la progression, dont j’ai prouvé l’existence
, ne »retenait la plupart des zoologistes, relativement
au rang des masses principales, on verrait
, dans la distribution des animaux, des renvèr-
semens systématiques extraordinaires.
Tout ici porte donc sur deux bases essentielles^
régulatrices des faits observés et des vrais principes
zoologiques ; savoir :
i.° Sur le pouvoir de la v ie , dont les résultats
sont la composition croissante de l’organisation,
et, par suite , la progression citée;
a.0 Sur la cause modifiante, dont les produits
sont des interruptions, des déviations diverses
et irrégulières dans les résultats du pouvoir
de la vie.
Il suit de ces deux bases essentielles, dont les
faits connus attestent le fondement :
D’abord, qu’il existe une progression réelle dans
la composition dë l’organisation des animaux, que
la cause modifiante n’a pu empêcher.
Ensuite, qu’il n’y a point de progression soutenue
et régulière dans la distribution des races
d’animaux, rangées d’après leurs rapports, ni même
dans celle des genres et des familles ; parce que la
cause modifiante a fait varier i presque partout, celle
que la nature eût régulièrement formée , si cette
cause modifiante n’eut pas agi.
Cette même cause modifiante n’a pas seulement
agi sur les parties extérieures des animaux, quoique
ce soient celles-ci qui cèdent le plus facilement et
les premières a son action; mais elle a aussi opéré
des modifications diverses sur leurs parties internes et
a fait varier très-irrégulièrement les unes et les autres.
Il en résulte , selon mes observations, qu’il n’est
pas vrai que les véritables rapports entre les races,
et même entre les genres et les familles, puissent
Tom. J. H