Dans lès actions del’ homme, le penchant a dominer
se déguise sous une multitude infinie de formes,
selon les circonstances qui concernent l’individu ;
mais il est toujours assez facile de reconnaître son influence.
C’est ce penchant qui donne lieu a l’obstination
dans les disputes, a l’intolérance dans quelque genre
que ce soit \ à la tyrannie envers ceux qui sont as-
sujétisa notre pouvoir, quel que soit son degre, enfin,
a la méchanceté et même à la cruauté, lorsque notre
intérêt de domination nous paraît l’exiger.
Lorsque nous ne dominons nullement, soit par
le pouvoir, soit par la richesse, le penchant dont il
s’agit nous porte alors a l’emporter sur lès autres ,
au moins en quelque chose; et dans ce cas, c est lui
qui nous fait faire quelquefois des efforts extraordinaires
pour nous distinguer dans telle ou télle partie
des sciences , des lettres ou des beaux-arts. De là
vient que la plupart de ceux qui dominent éiinhem-
ment par la puissance ou la richesse , mettent si peu
d’intérêt à étendre leurs connaissances, et font de la
science et des talens un cas si médiocre : ils ont,
pour maîtriser les autres, une voie plus assurée.
L ’un des produits les plus remarquables dé notre
•penchant a dominer est l’ambition ; sentiment dont
le "erme est dans tous les hommes, se développe
avec l’âge et par l’espérance, mais n’âcquiert dé véhémence
que lorsque les circonstances y sont favorâbles.
Or , Y ambition , développée et transformée
en passion par des circonstances qui la favorisent,
tourmente sans cesse celui qui l’éprouve, accroît son
énergie avec le succès, et a pour caractère singulier,
celui de n’être jamais satisfaite. Ce sentiment véhément
donne à ceux qui s’y abandonnent, un désir
ardent de parvenir, par tout moyen , à la fortune,
aux places ou aux dignités, au crédit ou à la réputation,
enfin, à la puissance. Sans doute, ces quatre
tendances que donne Y ambition, ont rarement lieu
toutes à-la-fois, mais seulement une seule ou quelques
unes d’entr’elles, selon les circonstances.
Je n’entreprendrai point d’analyser ici les divers
genres d’efforts, les voies et les moyens que le penchant
à dominer, et que Y ambition qui en est le
résultat, font employer aux différens-individus , dans
cette multitude de situations où leur position particulière
dans la société les a placés ; ils sont assez
connus.
Répugnance pour sa destruction.
Le quatrième et dernier produit du penchant a la
conservation, est ce sentiment intérieur et naturel
qui donne à Yhomme une répugnance ou une aversion
constante pour la destruction de son être. Ce
sentiment, que Y homme seul possède, et qui lui est
général, parce que, très-probablement, il est le seul