toute manière, et sans lesquels elle ne saurait créer
une seule idée quelconque. Phil. zool. vol. 2. p. \ i 2.
Ainsi, souveraine absolue dans ce champ de l ’imagination
, la pensée de l’homme y trouve des charmes
qui l’y entraînent sans cesse ; s’y forme des illusions
qijt lui plaisent, la flattent, quelquefois même la
dédommagent de tout ce qui l’affecte péniblement ; et
par elle, ce champ est aussi cultivé qu’il puisse l’être.
Une seule production de ce champ est utile à
l’homme : c’est l’espérance ; et il l’y cultive assez
généralement. Ce serait être son ennemi que de lui
ravir ce bien réel, trop souvent presque le seul dont
il jouisse jusqu’à ses derniers momens d’existence.
Quelque vaste et intéressant que soit le champ des
réalités, la pensée de l’homme s’y complaît difficilement.
L à , sujette et nécessairement soumise; là, bornée
à l’observation et à l’étude des objets ; là , encore, ne
pouvant rien créer, rien changer, mais seulement
reconnaître ; elle n’y pénètre que parce que ce champ
peut seul fournir ce qui est utile à la conservation,
à la commodité ou aux agrémens de l’homme, en un
mot, à tous ses besoins physiques. Il en résulte que
ce même champ est, en général, bien moins cultivé
que celui de Y imagination, et qu’il ne l’est que par
un petit nombre d’hommes qui, la plupart, y laissent
même en friche les plus belles parties.
En comparant l’un à l’autre les deux champs dont
je viens de parler, on peut aisément se figurer quel
énorme ascendant doit avoir le champ de Y imagination
, qui fournit des pensées, des opinions et des
illusions si agréables, sur la raison, toujours sévère
et inflexible, en un mot, sur ce champ des réalités
qui trace partout des limites à la pensée, et qui n’admet
d’autre instrument de culture que l’observation,
et d’autre guide, dans le travail, que la raison même,
qui n’est autre que le fruit de l’expérience.
Pour le naturaliste qui s’interdit lui-même l’entrée
dans le champ de Y imagination , parce qu’il ne se
confie qu’aux faits qu’il peut observer; non-seulement
il examine tout ce qui l’environne, distingue,
caractérise et classe tous les objets qu’il aperçoit,
et signale tout ce qui lui paraît pouvoir être utile à ses
semblables; mais, en outre, il considère la nature
elle -même, épie sa marche, étudie ses lois, ses actes,
ses moyens, et s’efforce de la connaître. Enfin, contemplant
la très-petite portion de Y univers qu’il aperçoit,
il se fait une simple idée de son existence, sans
entreprendre de savoir ou de déterminer ce qui compose
son ensemble ; et comparant ensuite cet univers
physique à la nature, à cette puissance toujours
active qui produit tant de choses, tant de phénomènes
admirables, il remarque que l’un et l’autre jouissent
seuls d’une stabilité qui paraît être absolue, et conçoit
qu’elle doit l’être.
Ayant déterminé ce que peut être la nature, ainsi