LE POTO FEMELLE.
C et anima! de 1 Amérique méridionale, que l’on a vu plusieurs fois en Europe,
qui a été décrit et figuré par des naturalistes habiles, est un des plus singuliers
que les Mammifères nous présentent. Il ne se prête nettement à aucune de nos
classifications. On l’a tour à tour associé aux Carnassiers, aux Plantigrades, aux
Quadrumanes, tout en reconnaissant qu’il n’appartenait bien ni aux uns ni aux
autres : c’est qu’il paraît être en effet le type d’une grande division nouvelle et
du même ordre, de la même importance que celles que nous venons de désigner.
A en juger par sa physionomie générale, et même, sous plusieurs rapports,
par son naturel, on le prendrait pour un Maki; mais il n’en a ni les organes de
la mastication, ni ceux du mouvement; si ses doigts, ses ongles, ses incisives et
ses canines le rapprochent des Carnassiers, ses molaires, entièrement aplaties,
et sa queue prenante, l’en éloignent; et si quelques-uns de ses traits le rattachent
aux genres les moins carnassiers des Plantigrades, aux Coatis et aux
Ours, sa physionomie et plusieurs points de son naturel le rendent tout-à-fait
étranger à ces animaux. Mais de ces ressemblances et de ces différences, nous
pouvons du moins conjecturer que sa place la plus naturelle vient immédiatement
après les Quadrumanes, et sert à établir un nouvel embranchement entré ces
animaux et les Carnassiers, comme les Galagos servent à en établir un entre les
Quadrumanes et les Insectivores; et par cet arrangement, les Roussettes ne sont
plus une anomalie dans l’ordre des Chéiroptères; elles s’en détachent pour se placer
à leurs côtés, et servir d’un nouvel intermédiaire entre elles et les Plantigrades
omnivores. C’est ainsi que nous voyons sè réaliser successivement toutes les combinaisons
que les mille et une formes de l’organisation peuvent former entre elles
et se déployer cet immense et brillant réseau qui constitue proprement la nature
organique.
C’est, à notre connaissance, la septième fois que le Poto a été amené en
Europe, et qu’il a été décrit; et ces descriptions, jointes à des observations nom.
breuses et intéressantes sur ses moeurs, faites par M. de Humboldt dans son
voyage d’Amérique, sont tout ce que l’on possédait sur ce singulier animal. C’est
Wosmaër, je crois, qui le fit connaître le premier, et lui donna le nom de Poto,
un M. Broker lui ayant dit avoir reçu, sous cette dénomination, un semblable
animal des îles Saint-Christophe; cependant ce'nom ne paraît point être américain;
aucun voyageur n’en parle; et M. de Humboldt, qui a parcouru les con.
trées naturelles à cette espèce, ne l’a jamais entendu prononcer. Il paraît être