LA MARMOTTE.
I l n’est personne en Europe qui ne connaisse la Marmotte, au moins par ces
faibles enfants que l’on voit, chaque année, descendre des hautes Alpes avec cet
animal industrieux, dont ils ont su adoucir le naturel sauvage, et qu’ils se sont
associé pour exciter notre commisération.
Sa tadle ramassée, son dos écrasé, ses jambes épaisses et peu élevées, sa tête
large et aplatie, ses oreilles tronquées, sa queue courte, et qu’elle ne relève jamais,
jointes à des allures lourdes et embarrassées, lüi donnent une physionomie qu’on
ne retrouve chez aucun autre animal, et qui seule suffirait pour la caractériser.
En effet, la Marmotte, organisée pour fouir, destinée à la vie obscure d’un
terrier; n’ayant besoin, pour se nourrir, que de l’herbe ou du foin qui entoure
son habitation ; trouvant dans sa retraite le moyen d’échapper à la plupart de ses
ennemis, et dormant continuellement durant une moitié de l’année, ne sait ni
s’élancer comme le Rat, ni grimper comme l’Écureuil. Elle marche lentement, et
court en se soulevant avec effort, mais plus vite en montant qu’en descendant;
e t, si elle peut grimper, ce n’est que dans les fentes des rochers, et en s’aidant
alternativement de son dos et de ses jambes, comme on le fait pour monter
dans les cheminées. On dit même que c’est aux Marmottes que les ramoneurs
savoyards doivent leur industrie. Aussi les Marmottes s’éloignent-elles rarement
de leur asile; et comme elles sont toujours réunies par familles, la nature, pour
suppléer à ce qui leur manque d’agilité, les a douées de cet admirable instinct,
qu’elles ne sortent jamais du terrier sans que l’une d’entre elles soit placée en
sentinelle, à portée des autres, sur le rocher ou le tertre le plus élevé. Dès
qu’élle aperçoit un ennemi, dès que la présence d’un nouvel objet l’inquiète,
elle jette un cri perçant; e t , â l’instant même, toutes les autres, qui étaient
occupées ou à brouter l’herbe, ou à s’ébattre sur le gazon, rentrent précipitamment
avec elle sous l’abri commun; o u , si elles sont trop éloignées, elles se
cachent sous les rochers les plus voisins. Ce terrier, dont l’ouverture est ordinairement
placée sous quelque masse pierreuse, et dans la région des neiges,
au-dessus de la limite des forêts, est creusé dans un coteau exposé au su d , au
sud-est ou au sud-ouest. Il se compose généralement d’un conduit en forme de
boyau étroit, et suffisant seulement pour le passage de l’animal. A l’extrémité de
ce boyau, qui a communément de cinq à six pieds de longueur, est une excavation
circulaire de trois à quatre pieds en tout s en s , appelée bauge, où les
Marmottes se retirent, et qui forme leur retraite d’hiver. Quelquefois ces terriers