sence des incisives, elles se caractérisent encore par une articulation de la
mâchoire inférieure, semblable à celle des Rongeurs, c’est-à-dire qui se fait au
moyen d’un condyle longitudinal; et elles s’en distinguent surtout par des mol-
laires semblables à des lames minces et non à des cylindres qui, loin d’être
alternes dans leur action réciproque, sont dans des rapports nouveaux, et dont
elles nous offrent le premier exemple : celles de la mâchoire inférieure sont en
communication par leur face externe, avec la lace interne de celles de la mâchoire
opposée; et, comme la mâchoire inférieure n’a qu’un mouvement longitudinal,
et que les dents, placées à la suite l’une de l’autre, ne se touchent que
par leur bord, la trituration peut être comparée à deux lames placées l’une à côté,
de l’autre, qui agiraient comme deux scies.
Des caractères organiques de cette importance annoncent des animaux d’un
naturel différent, et qui ne doivent pas seulement être distingués par des noms
propres, mais encore par des noms communs, des noms génériques. Nous conserverons
donc aux Tatous pourvus d’incisives ce nom de Tatous; ceux qui sont
privés de ce caractère, par celui de Tatusies, qui est déjà pour les Tatous un
nom commun dans quelques voyageurs; et nous appellerons Priodonte ceux dont
les dents sont en forme de lames.
Nous n’avons rien à ajouter à cè que nous avons dit sur les mouvements, les
allures et le peu d’intelligence des Tatous dans les deux articles où nous avons
décrit deux espèces de ce genre, que nous avons désignées, la première, sous le
nom d’Encoubert, et la seconde, sous le simple nom de Tatou. Tous les détails dans
lesquels nous sommes alors entrés conviennent à l’individu qui fait l’objet de cet
article, et qui, des trois dont nous avons parlé, doit seul être regardé comme appartenant
à l’espèce de l’Encoubert. En effet, le Tatou auquel nous avons précédemment
donné ce nom, loin d’être une espèce déjà représentée, était une espèce
peut-être nouvelle, ou du moins qui n’était encore connue que par la description
qu’en avait donné d’Azara, sous le nom de Tatou velu ; car nous ne pouvons partager
l’opinion de M. Desmarest, qui regarde cet Encoubert comme le Tatou Pichy de
ce savant Espagnol. En effet,M. d’Azara dit (Animaux du Paraguay, tom.II,p. 19a)
que ce dernier Tatou a le bouclier de l’épaule composé de pièces semblables à
celles du bouclier de la croupe, et que sa queue est couverte d’écailles fortes
disposées en anneaux. Or, l’animal auquel j ’ai, par erreur, donné le nom d’Encoubert,
a laplus grande partie du bouclier de l’épaule, excepté la bande qu’elle
forme postérieurement, composé de pièces exagones; le bouclier de sa croupe est
composé de parallélogrammes; et sa queue n’a d’anneaux qu’à sa base : ils sont au
nombre de quatre, et le reste est couvert irrégulièrement d’écailles. De plus, le
Pichy devrait avoir son casque formé d’une mosaique très-forte et irrégulière, ce
qui ne convient pas du tout à mon faux Encoubert, qui a la mosaïque de son
casque formé de petits exagones semblables à ceux du bouclier des épaules.
L’espèce que je n’ai désignée que sous le simple nom de Tatou me paraît avoir
beaucoup plus de rapports que la précédente avec le Pichy, quoiqu’elle paraisse
en différer aussi à quelques égards : c’est que, comme je l’ai dit en parlant de
ce Tatou, les caractères des espèces'de ce genre ne sont point encore appréciés;
et quoique d’Azara soit entré dans beaucoup de détails sur les huit espèces dont
il donne la description, on est encore loin, après l’avoir lue, de se représenter
nettement les différences caractéristiques de ces animaux. Nous aurons bientôt
occasion de reparler des deux Tatous que nous avons décrits précédemment, pour
faire connaître les changements qu’ils ont éprouvés ; alors nous examinerons plus particulièrement
à quelles espèces ils appartiennent. Ce que nous avons dit suffît pour rectifier
1 erreur où nous étions tombés, et il ne nous reste plus qu’à exposer les traits
distinctifs du véritable Encoubert, ce que nous ferons dans le plus grand détail.
Les organes du mouvement de cet animal sont essentiellement faits pour fouir.
A.ux membres antérieurs, l’épaule et le bras sont recouverts par le bouclier scapu-
laire, et tellement engagés, qu’il n’en paraît rien au dehors. L’avant-bras est gros
et court. Le carpe, également épais et court, est terminé par cinq doigts inégaux
.armés d’ongles très-forts, comprimés, arrondis en dessus, plats en dessous, et à
bords tranchants. Ces doigts participent des proportions du bras : ils sont courts
et gros, et réunis jusqu’à leur dernière phalange par une membrane forte et peu
extensible. Le premier de ces doigts ou l’externe est le plus court, et il est situé
assez haut près de l’articulation du carpe avec l’avant-bras, de sorte que ce doigt
dans la marche n’atteint pas la terre. Après lui vient, pour la longueur, le cinquième
ou 1 interne, qui, un peu moins court que le précédent et articulé un
peu plus bas, touche à terre lorsque l’animal marche; son ongle est le plus petit
de tous. Le second doigt est le troisième pour la longueur; viennent ensuite le
troisième et le quatrième : ces deux derniers ont des ongles qui avancent autant
1 un que l’autre; mais le dernier est plus long que celui qui le précède, et l’ongle
de celui-ci, c’est-à-dire du troisième, est le plus grand et le plus fort.
Aux membres postérieurs la cuisse est cachée par le bouclier de la croupe.
La jambe est grosse et courte, ainsi que le tarse, qui est terminé par cinq doigts
courts et gros, armés d’ongles plus courts que ceux des doigts antérieurs, mais
de même épaisseur, convexes en dessus et plats en dessous. L’externe ou le premier
doigt est le plus court; l’interne vient ensuite; puis le second; et enfin le troisième
et le quatrième, qui sont égaux. Tous ces doigts sont réunis, jusqu’à la dernière
phalange, par une membrane encore plus serrée que celles des doigts antérieurs.
La queue est forte, ronde, épaisse à son origine, et terminée en pointe.
Les organes génitaux présentent des particularités assez remarquables. La verge,
longue d’environ trois pouces dans son état ordinaire, peut s’allonger au-delà de
six; elle est dirigée en avant, à peu près cylindrique, tronquée à son extrémité, au
centre de laquelle extrémité est l’orifice de l’urètre, semblable à une fente verticale.
Cet organe, lorsqu’il n’est point allongé, est entièrement recouvert de son fourreau
jusqu’au milieu de sa longueur ; là ce fourreau s’ouvre en dessus et va toujours
en diminuant de largeur jusqu’à quelques lignes de l’extrémité de la verge,
où il s’arrête, et où une bride l’y attache encore. Toute la partie de cette verge
laissée à découvert par le fourreau, et qui a la forme d’un demi-cône, présente
des rides transversales très-régulières et très-fines.
Les testicules ne se voient point au-dehors, et les mamelles sont au nombre
de deux sur la poitrine.
Excepté le sens de l’odorat, tous les autres paraissent être fort peu développés;
mais la nature a été fort libérale envers celui-ci : aussi paraît-il être le guide et
le conseil exclusif des Tatous. Les narines sont percées aff bout d’un museau
n u , mais non pas glanduleux. Leur bord interne est muni d’un petit lobe ; une
lame de forme spirale garnit leur bord pbstérieur, et leur cavité est tapissée intérieurement
de petites verrues charnues coniques, allongées et sétiformes.