LE RAT.
L e Rat, de même que le Surmulot, ne paraît point être originaire de nos
contrées. Rien du moins n’annonce que les anciens l’aient connu, et les auteurs
modernes qui en ont parlé clairement, ne remontent pas au delà du seizième
siècle. Gessner est peut-être le premier naturaliste qui l’ait décrit. Or, il est peu
vraisemblable que si cet animal eût autrefois, comme aujourd’hui, vécu au milieu
e nous, et à nos dépens, on n’en eût fait aucune mention, lorsqu’on parlait
de la Souris, du Mulot, du Loir, bien moins remarquables et bien moins incommodes
que lui. Mais comment, et d’aù_estàf venu-chez nous.? Les uns pensent,
avec Linnæus et Pallas, que nous l’avons reçu d’Amérique et les autres, au
contraire, supposent que nous l’avons donné au nouveau Monde après l’avoir
reçu de 1 Orient. C est qu’il est peut-être impossible de répondre à cette question;
et toutes les conjectures qu’on se permettrait à ce sujet, avec les seules connaissances
que l’on possède aujourd’hui, ne seraient véritablement que d’inutiles
jeux de 1 esprit. Ce que l’on.sait, c’est que le Rat se. rencontre dans toutes les
régions chaudes et tempérées, qu’il est extraordinairement commun en Perse,
et qu’il s’est prodigieusement multiplié dans les Antilles, où les hivers ne le
contraignent pas à se réfugier dans les maisons, et oùles champs, durant, toute
l’année, lui offrent une abondante nourriture. Aussi est-il devenu, dans toute
cette partie de 1 Amérique, un véritable fléau par ses ravages et ses dévastations.
-En effet, le Rat consomme une grande quantité de nourriture, et il en gâté et
en perd encore davantage, surtout lorsqu’il s’établit dans un champ; car alors
il coupe par le pied les plantes dont il ne mange qu’.une partie. Chez nous , il
se tient de préférence dans les granges et les greniers, sous les toits de paille et
dans les maisons abandonnées; mais il fouit aussi, et se loge; comme le Surmulot,
dans des terriers lorsqu’il ne peut pas s’établir ailleurs. Quoique cette dernière
espèce ne se. mêle pas avec le Rat, et qu’elle puisse même le détruire,4’anti-
pathie naturelle qu’on leur a supposée n’existe point. Les Surmulots n’excluent
pas nécessairement les Rats d’où ils s’établissent, et j ’ai vu ces-deux espèces vivre,
l’une avec l’autre, sous le même abri et dans des terriers contigus. C’est qu’ils
trouvaient dans ce lieu d’abondants aliments,.et que les plus, forts n’avaient pas
besoin, pour se nourrir, de faire la guerre, aux plus faibles; » car- ce n’est que
dans ce cas seulement que les uns sont la cause de la disparition des-autres;
et, comme toutes les espèces du genre, les Rats se dévorent entre eux lorsqu’ils
sont pressés'par la faim. La plupart des aliments, au reste,-leur conviennent,
ainsi qu’à tous les Rongeurs à racines distinctes de la couronné dans les dents