LE TAJAÇU.
N o u s avons vu, à l’article du Pécari, qu’il existait, dans l’Amérique méridionale,
deux espèces de la famille des Cochons, qui avaient sur le dos un orifice,
d’où s’écoulait une matière blanchâtre et visqueuse; qu’elles avaient été confondues
l’une avec l’autre par la plupart des voyageurs, et que ceux mêmes qui avaient
reconnu leurs différences ne les avaient point nettement distinguées. Nous pouvons
aujourd’hui donner la figure et la description de l’espèce sur les caractères
de laquelle il restait des doutes, et qui n’avait jamais été représentée. La Ménagerie
du Roi en doit la possession à M***.
Le Tajaçu a la plus grande ressemblance avec un Cochon de moyenne taille,
qui serait privé de queue, principalement par la forme de sa tête. Sous ce rapport,
il s’éloigne sensiblement du Pécari, dont le chanfrein,au lieu d’être concave,
est fortement arqué ; mais dés qu’on l’observe avec détail, on lui reconnaît tous
les caractères des Dicotyles, c’est-à-dire trois doigts seulement aux pieds de derrière,
des canines supérieures qui ne se relèvent point en forme de défenses, et
cet organe glanduleux, situé sur la croupe, qui verse au dehors une liqueur plus
ou moins visqueuse et fortement odorante.
Nous ne répéterons donc point ce que nous avons dit de ces caractères à
l’article du Pécari; tout ce que nous en avons rapporté convient, sans exception,
au Tajaçu, dont nous ne devons par conséquent décrire aujourd’hui que les caractères
spécifiques.
Son pelage, qui se compose de soies assez rudes et fort longues, principalement
sur la croupe, est noir, tiqueté d’un peu de blanc - sale sur les côtés du
corps, parce que les poils de ces parties ont quelques petits anneaux blancs-
jaunâtres ; mais ce mélange de eouleurs est presque nul, comparé à celui qui
caractérise les soies du Pécari, sur le pelage duquel le blanc et le noir, étant
également et uniformément mélangés, produisent une teinte grise fort douce,
tandis que le blanc prend si peu de part à la couleur du Tajaçu, qu’on peut en
quelque sorte dire qu’il est noir. Cette couleur seule même domine le long de
l’épine dorsale, sur le chanfrein et sur les membres; et l’on voit, sur les poils,
plus d’anneaux jaunes aux épaules et aux parties postérieures de la tête, qu’aux
autres parties du corps; mais son caractère principal, et qui le distingue très-
nettement de l’autre espèce, c’est la bande tout-à-fait blanche qui de chaque
côté lui couvre le milieu de la mâchoire inférieure. Cette bande naît à la partie
postérieure des mâchoires, s’avance jusqu’au bout des lèvres, en passant sur la