par l’allongement du museau. Alors l’extrémité du nez rougit, les fesses se pareht
de leurs belles couleurs, et les testicules deviennent rouges. (L’individu que nous
avons fait représenter appartient à cet âge.) Après deux ou trois ans, les canines
ont pris un accroissement considérable j les muscles des membres se sont fort
épaissis5 toutes les parties du corps ont acquis de l’ampleur, les postérieures principalement,
et le museau s’est développé dans les mêmes proportions j de sorte que
ce Mandrill à membres si grêles, à corps si mince, a pris des formes si trapues et
si lourdes, qu’on pourrait à cet égard le comparer à un Ours. Durant cette époque,
le nez devient rouge à peu prés dans toute sa longueur, et les brillantes couleurs
des cuisses s’avivent, ainsi que le rouge des testicules et des parties voisines
de l’anus. Quant au pelage, il n’éprouve aucun changement important : il est
généralement d’un brun verdâtre, plus clair sqr la tête que sur le reste du corps,
et qui résulte de poils colorés dans leur longueur d’anneaux alternativement noirs
et jaunes sales j derrière chaque oreille se trouve une tache d’un blanc grisâtre $ les
côtés de la bouche sont d’un blanc sale, et le menton est garni d’une barbe jaunâtre.
La partie postérieure du ventre est blanchâtre } mais les autres parties inférieures
du corps sont brunâtres. Dans les vieux individus, les poils de la tête se
relèvent quelquefois de manière à former une sorte d’aigrette. L’iris est d’un
brun clair, les oreilles et les mains sont noires. La voix de ces animaux est sourde,
semblable à un grognement, et semble exprimer l’articulation aou aou, Les femelles
restent constamment plus petites que les mâles, et leur peau ne se colore pas
d’une manière aussi vive et aussi brillante j leur nez ne devient jamais entièrement
rougej mais, par contre, à l’époque du rut, c’est-à-dire chaque mois, leur
vulve se trouve entourée d’une protubérance monstrueuse, qui résulte d’une
grande accumulation de sang dans ces parties, et qui a généralement une forme
sphérique. Lorsque le rut cesse, cette protubérance s’efface petit à petit, pour
reparaître vingt-cinq ou trente jours plus tard.
Les Mandrills ont le caractère féroce et brutal des autres Cynocéphales : assez
doux et confiants dans leur jeunesse, ils deviennent de la plus atroce méchanceté
avec l’âge. Les meilleurs traitements ne peuvent les toucher, et les actions les plus
insignifiantes, un geste, un regard, une parole suffisent pour exciter leur fureur}
mais aussi la circonstance la plus légère les apaise.
Les grandes différences qui s’observent chez les Cynocéphales en général, suivant
l’âge des individus, ont conduit les naturalistes à multiplier les espèces à
face bleue : ainsi le Simia Maimon de Linnoeus est un jeune Mandrill } le Simia
Mormon d’Alstroemer est un Mandrill très-vieux, que Buffon (Sup. t. VII) nomme
ChoraSy etc., etc.} et Gesner avait donné la figure d’un Mandrill pour celle de
la Hyène.
Cette espèce est originaire d’Afrique, et particulièrement des contrées situées
au delà du golfe de Guinée} mais elle ne paraît pas s’étendre jusqu’au Cap de
Bonne-Espérance. Rien n’annonce que les anciens l’aient connue.
Le Mandrill deviendra sans doute le Simia Mormon des Catalogues méthodiques.
N. B. Depuis que nous avons publié notre article général sur les Cynocéphales,
M. Dussumier en a ramené un nouveau de Manille, dont il a enrichi le cabinet
du Muséum d’Histoire naturelle. Cette espèce, originaire des Philippines, est la
première qu’on ait tirée de ces contrées} elle ne diffère des autres par aucun
LE MANDRILL. 3
caractère essentiel} mais son pelage est entièrement noir} de sorte que les généralités
principales que nous avions tirées du rapprochement des six espèces connues
se conservent à la couleur prés des poils. L’espèce nouvelle en effet ne permet
plus de considérer cette couleur comme résultant généralement de poils couverts
d’anneaux jaunâtres et noirs} la sienne est sans mélange, et, à cet égard, elle présente
une anomalie qui mérite d’être considérée.