molaires. Us sont au moins autant omnivores que les Omnivores proprement dits;
ils se nourrissent indistinctement de viandes et de graines; ils se jettent aussi
sur les fruits, et attaquent même toutes les autres parties des végétaux, pour
peu qu’elles contiennent des matières sucrées ou oléagineuses ; mais ils ne font
point de provisions pour l’hiver.
Ces animaux font plusieurs portées par an; au moment de leurs amours, ils
se livrent des combats violents, et on les entend alors pousser des cris qui
ressemblent à un sifflement aigu; ils préparent avec des feuilles, de la paille, du
foin, ou toute autre matière convenable, un nid pour leurs petits, qui naissent
entièrement nus et les yeux fermés : ils en font jusqu’à neuf, et peut-être
davantage.
Ils ont la physionomie, les allures et le naturel du Surmulot, comme ils en
ont l’organisation. Ce sont de véritables plantigrades, et chaque pied a cinq doigts
remarquables par leur épaisseur ; mais le pouce de ceux de devant ne se montre
au dehors que par son ongle; les trois doigts moyens sont les plus longs et égaux
en longueur. La plante des pieds et la paume des mains sont garnies de tubercules
que nous décrirons plus en détail, ainsi que les autres parties organiques,
dans notre discours général sur les Rats. Les oreilles sont arrondies et simples;
les narines ouvertes, de chaque côté, d’un mufle, et en forme de demi-croissant;
la lèvre supérieure est fendue, et la langue douce; les yeux sont simples et à
prunelles rondes, et de longues moustaches garnissent les côtés de la lèvre supérieure.
La verge, entièrement couverte par le scrotum, se dirige en avant. L’ouverture
du vagin est simple, mais il y a une seconde ouverture au-dessous, qui
est celle de l’urètre, et où est le clitoris, ce qui semblerait faire de cet organe
une dépendance des voies urinaires plutôt qu’une dépendance des organes génitaux.
Les mamelles sont au nombre de six. Les deux incisives inférieures sont
étroites, presque pointues, et elles se développent en s’écartant l’une de l’autre;
les deux supérieures, au contraire, sont tranchantes, et elles se touchent : les
unes et les autres ont leur face antérieure jaune. Les molaires sont au nombre
de trois de chaque côté des mâchoires ; lorsqu’elles ne sont point encore usées
par la trituration, elles présentent un nombre ' déterminé dé tubercules bien
distincts. A la mâchoire supérieure, la première, qui est la plus grande, en a
huit : trois au centre, qui sont les plus forts; trois à la face externe, qui ne
sont proprement formés que par un sillon tracé dans les premières ; de sorte
que ces légers tubercules s’effacent à mesure que la dent s’use, et deux très-
distincts à la face interne, correspondans aux intervalles qui séparent ceux du
centre; la seconde molaire a six tubercules : deux gros au centre, deux petits
à la face externe, et deux un peu plus marqués à la face interne; enfin la
troisième, qui est la plus petite, en a cinq.: trois à la face interne, et deux à
la face externe. Mais les tubercules latéraux, dans la seconde comme dans la
troisième dent, ne sont pas disposés régulièrement à côté de ceux du centre :
les premiers sont plus avancés d’un tubercule vers l’extrémité de la mâchoire
que les autres. C’est en quelque sorte la seule différence qui existe entre les
molaires supérieures et celles de la mâchoire inférieure, où les tubercules sont
disposés symétriquement, et où le tubercule impair est placé dans 1 intervalle de
deux dents; seulement la dernière, c’est-à-dire la plus petite, n’a que trois
tubercules au lieu de cinq.
Cette description diffère un peu de celle que nous avons donnée dans notre
Mémoire sur les dents des Rongeurs (Annales du Mus. d’Hist. nat. L. XIX); ce
qui tient simplement à ce que nous avons aujourd’hui sous les yeux une tête de
Rat plus jeune, et des dents moins usées que celles que nous avions à l’époque
de ce premier travail. C’est en effet une chose fort difficile que de déterminer
dune manière absolue la figure des molaires, qui changent à mesure qu’elles
s usent, et qui ne présentent plus les mêmes apparences d’une année à l’autre.
Les allures du Rat sont vives; il court avec rapidité, et fait des sauts très-
prompts; aussi échappe-t-il souvent à ses ennemis, lorsqu’ils l’attaquent à force
ouverte ; et s il est surpris et obligé de se défendre, il le fait avec courage, et
quelquefois avec succès, au moyen de ses longues incisives, dont les morsures
sont profondes et douloureuses. II peut porter ses aliments à sa bouche avec ses
mains, et boit en lapant; et la propreté paraît être pour lui un véritable besoin.
Dans les intervalles qui séparent le temps des repas de celui du sommeil, il
s’occupe continuellement à nettoyer et à lustrer son poil, à peu prés comme les
Chats, avec sa langue et ses pâtes.
Toutes les parties supérieures de son corps sont d’un gris foncé, et les parties
inférieures d’un gris très-clair. Son pelage consiste en poils soyeux, assez longs,
plus épais sur le dos, où il s’en trouve qui sont aplatis, durs et pointus, presque
comme des épines; et en poils laineux, trOs-(j>ais, d’un de cendre, qui revêtent
entièrement la peau; ce sont les premiers qui déterminent les Couleurs de l’animal.
Les moustaches sont noires, et la queue n’a de poils que sur les bords des parallélogrammes
d’épiderme qui la recouvrent comme de petites écailles. Les poils du
museau et des pâtes sont très-courts ; le dessous des pieds et des mains est nu-
et couleur de chair, ainsi que les oreilles.
Le Rat qui a servi à notre dessin avait 7 pouces 6 lignes du bout du museau
à l’anus, et sa queue avait la même longueur; la tête avait 2 pouces.
Gessner a donné une figure passable du Rat, qu’il désigne par cette phrase :
Mus domesticus major quem vulgo Ratum vocant, p. 829; et c’est sous ce nom
de Rat qu’Aldrovande, p. 4i 5 , Jonston, t. LXVI, Ray, p. 217, Klein, p. S j,
Brisson, p. 168, Linnæus, ibid. p. 6 i, Buffon, qui en a donné une très-bonne
figure, t. VII, p. 168, et la plupart des auteurs et des naturalistes, en parlent.
On le trouve cependant quelquefois désigné par le nom de Sorex (Charleton,
Exercit. p. 25; Sibbaldo, Scotia illustrata, etc.). C’est le Mutus Ratus des Cata-
logues méthodiques.
Octobre 1820.