
Conrad Gefner fiVj on a cru que la Salamandre
terreftre écoit privée de fe'xe, mais Maupertuis ,
ayant ouvert quelques Reptiles de cette efpèce,
trouva dans leur corps des oeufs & des petits tout
formés, & depuis ce temps-là on reconnoît généralement
que cet animal, comme la Vipère, met
bas des petits vivans (2).
Quoi qu’il en foit, la Salamandre terreftre dé-
pofe fes petits dans l’eau de mares.
Les Salamandres aquatiques ou les Tritons ne
font point vivipares comme celle-ci ; elles pon-
dent dans le mois d’avril ou de mai, des oeufs
réunis en deux cordons & agglomérés à l’aide
d’une matière vifqueufe, lefquels tombent au
fond de l’eau fur la vafe.
S e c t io n cin q u ièm e .
1256&Z I2J7.Les (Eufs ou les Foetus, leurs Enveloppes,
leur Poids, leur Volume,leur Nombre.Certes,
avec Harvey & nombre d’auteurs, on peut regarder
tous les animaux comme venant d’un oeuf
omne vivum ex ovo , & , dès-lors, il fembleroit
qu on ne pourroit dilïinguer les Vivipares d’avec
les Ovipares , Sjue par 1a propriété de mettre au
jour des petits tout formés, ou de pondre des
oeufs. Néanmoins j il faut, comme l'a fait De Lacépède,
admettre deux fortes d'oeufs; dans la
première j le foetus eft enveloppé d'une poche
membraneufe & plongé dans un liquide évidemment
infuffifant pour le nourrir pendant tout fon
accioiflement; aufti I oeuf ell-il lié intimement au
corps de la mère par un cordon ombilical ou par
quelqu'autre moyen, comme un placenta; tels
font les oeufs de l'Homme & des Mammifères,
oeufs fans aucun doute incomplets; dans la fécondé
, .le germe eft renfermé dans une enveloppe
où fe trouve contenue toute la nourriture
nécelfaire à fon développement, jufqu'à l'inlïant
où il paroît à la lumière : l'oeuf ici eft pondu
bientôt après aroirété formé, ou bien, s’il demeure
dans le ventre de la mère , il ne conferve avec
celle-ci aucun point d adhérence & n'en reçoit
que de la chaleur; tels font tes oeufs des Poif-
fons, des Oifeaux & des Reptiles, oeufs proprement
dits, alors même qu'ils éclofent dans les organes
de la mère, apres avoir fubi une incubation
intérieure, au lieu d'être fournis à une incubation
extérieure, comme cela a lieu dans les Vipères en
particulier, & dans les Salamandres terrellres.
La groffeur des oeufs des Reptiles varie fuivant
les efpéces, bien plus que dans les oifeaux; ceux
des petits Sauriens ont à peine une demi-ligne de
diamètre, tandis que ceux des Crocodiles, des
( i) De Quadrup ovip, , $cc.
(a) Rat , Synopfis yuadrup., pag. 274. — L acépède ,
Caïmans & des Chélonées franches, ont de deux
à trois pouces de longueur.
La nature de leur enveloppe ne varie pas moins
non plus; afiez généralement pourtant, dans beaucoup
de Tortues notamment, elle eft (ouple, molle
& femblable à du parchemin mouillé , mais dans
les Crocodiles & dans les grands Sauriens, elle
eft dure & crétacée comme celle des oeufs des
oifeaux, quoique plus mince & plus fragile que
celle-ci.
Dans la Chélonée franche, les oeufs font ronds;
leur diamètre fe balance entre deux & trois pouces
& leur nombre s’élève à plus de cent (1). Ils renferment
du blanc qui ne le durcit point, dit-on,
à quelque degré de feu qu'on l’expofe, & du
jaune qui fe concrète comme celui des oeufs de
poules (2).
I La chaleur du foleil fufïit pour les faire éclore
vingt ou vingt-cinq jours après la ponte, temps
qui, du refte, varie un peu avec la température,
tro g e r (3) allure qu’ à Saint-Vincent, île du Cap-
V e r t, il ne faut que dix-fept jours pour que les
petites Tortues fortent de leurs oeufs.
Les oeufs de la Tortue grecque, gros comme
ceux des pigeons, ne font pon.lus qu’au nombre
de quatre ou de cinq.
La chaleur du foleil les fait éclore également.
| L’oeuf du Crocodile d'Amérique , du Caïman >
n'eft guère plus gros que celui d’une poule
1 d’Inde (4). On confervoit au cabinet du Roi
autrefois, l’oeuf d’un véritable Crocodile, tué
dans la Haute-Egypte & long de quatorze p’ieds.
Le grand diamètre de cet oeuf n’étoit que de deux
pouces cinq lignes & le petit d’un pouce onze
lignes ; en le comparant a des oeufs du Crocodile
d’Amérique, De Lacépède a trouvé que ceux-ci
étoient plus alongés; que leur grand diamètre
étoit de trois pouces, & le petit de deux.
t Dans les uns comme dans les autres, d’ailleurs,
ia coque eft crétacée, & la tunique qui revêt
celle-ci à l'intérieur eit plus épaifle & plus forte
que dans aucun oeuf d’oiTeau.
Les petits Crocodiles font repliés fur eux-
mêmes dans leurs oeufs , & lorfqu'ils brifent leur
coque, ils ont déjà ftx à fept pouces de longueur.
Ce n eft point, au refte, toujours avec leur tête,
c’eft Peuvent avec les tubercules de leur dos qu’Us
rompent les parois de leur prifon, en abandonnant
laquelle ils traînent, attaché au cordon ombilical
, le refte du jaune de l’oeuf entouré d une
membrane & une forte d’ arrière-faix compofé de
1 enveloppe dans laquelle ils.ont été renfermés ($)•
( *) F o üGE ROtJX , DE LACE PKDB , l. C.
(2) Nouveau Voyage aux îles, de L‘Amérique, wmc I ,
page 3o4-
(3 ) Relation d'un Voyage à la mer du Sud , pag. 52.
(4) Catesbt , L e . , vol. I I , pag. 63.
£5) 6 éba , ftbi fuprâ, I , tab. CIV , fig. 7. '
Quelque temps après même, on obferve encore
fur le bas de leur ventre la place qu’occupoit le
cordon (1). Cette cicatrice difparoît pourtant
avec le temps & les écailles qui bordoient la fente
longitudinale par où il pafloit fe réunifient infenli*
blement.
Nous avons déjà dit que, dans l’efpâce de peu
de jours, les Crocodiles d’Amérique, c’eft-à-dire
les Caïmans proprement dits, faifoient deux &
même trois pontes ; ajoutons ici que chaque ponte
eft de vingt à vingt-quatre oeufs (2), ce qui peut
portera foixante-douze le nombre total de ceux-ci.
La Dragonne de Cayenne a , fous ce rapport,
une reftemblance notable avec le Crocodile, car
la femelle pond ordinairement plufieurs douzaines
d’oeufs (3).
Les oeufs du Tupinambis font gros & ovales (4).
Ceux des Iguanes, prefque toujours en nombre
impair , depuis treize jufqu’ à vingt-cinq , ne
font pas plus gros, mais ont plus de longueur que
les oeufs des pigeons; la coque en eft blanche &
fouple ; elle eft remplie d’une matière blanchâtre
non glaireufe.
Le Lézard gris pond des oeufs prefque ronds
& n’àyant fouvent pas plus de quatre à cinq lignes
de diamètre.
Ceux du Lézard vert font communément un peu
plus volumineux.
La ponte du Caméléon eft de neuf à douze
oeufs; De Lacépède en a compté dix dans le
ventre d’une femelle envoyée du Mexique au cabinet
du Roi (5). Ils font ovales revêtus d’une
membrane mollaffe fimplement. Ils ont à peu près
fept à huit lignes dans leur plus grand diamètre.
Les oeufs du Gecko font ovales & communément
du volume d'une noifette (6), & ceux du
Scinque mabouya font enveloppés d'une coque
folide (7).
Les oeufs des O phidiens , de même que ceux
des S auriens & comme ceux des Oifeaux, font
compofés à l’état parfait, d’un jaune à cicatri-
cule, d'un blanc albumineux & d’une coque
membraneufe, mais ici, la ponte s’effeélue toujours
beaucoup plus tard & l’oeuf éprouve conf-
camment un commencement d’incubation & quelquefois,
ainfi que chez la Vipère, une incubation
complète, avant d’être émis au dehors, phénomène
que ne préfentent jamais les Oifeaux.
Quand on cherche à fe rendre compte de cette
différence , on en vient aifément à bout en fe re- 1 2 *4 5 6 7
(1) S éba , /. c, , vol. I , pag. 162 & fuiv.
(2) De la Borde , ubi Juprâ.
. (3) Idem , ibid»,
(4) Hifi. gin. des Voyages, édii, in - 1 2 , tome 54,
page 43o.
(5) . L. c. , pag. 356.
(6) Ibidem, pag. 4 >8. — S éba , I , tab. 108.
(7) D ebadiee , Journal de Phyfiquc, 1774,,pag. 4*4»
mémorant la maniéré d’être d’un Saurien ou d’un
Ophidien femelle lors de la geftation. On voit en
.effet que dans ces animaux, la capacité prefque
entière de la cavité thoraco-abdominale eft occupée
par les poumons & par les ovidu&es. Les
premiers s'alongent prefque jufqu’à l’anus; les
féconds remontent dans le voifînàge de la tête,
les premiers fe placent en arrière le long de la
colonne vertébrale , & les autres en avant le long
de la paroi abdominale, en forte que, dans la po-
fition habituelle de l'animal, les oeufs font en bas
& les poumons en haut, & que la refpiration peut
s’ accomplir fans être gênée par le développement
des oeufs, & fans gêner celui-ci également.
Les oeufs de la Vipère commune varient en
nombre depuis dix jufqu’à vingt-neuf, & leur volume
égale à peu près celui des oeufs du Moineau
domeftique. Les Vipéreaux y font repliés fur
eux-mêmes, & ils en percent la coque avant
d’abandonner le ventre de leur mère, qui les dé-
barraffe aulïîtôt après leur naiffance de l’efpèce
d’ariière-fiûx qu'ils traînent après eux en fortant du
cloaque.
Thomas Bartholin a vu dans des oeufs ^ ’O phid
ie n s , les petits tout formés, & a noté que les
battemens de leur coeur étoient furtout apparens.
Le cordon ombilical, attaché au ventre non loin
de la queue, tenoit évidemment au jaune. Jérôme
Fabricio d'Aquapendente & Blaës ont obfervé
dans de mêmes oeufs des vaiffeaux ombilicaux &
des membranes.
Les oeufs des Grenouilles & des Crapauds font
ronds, mous, noirs, avec un point blanchâtre
dans leur milieu, gélatineux, à demi tranfparens ,
dépourvus d'enveloppe folide, & entoures uniquement
de deux membranes concentriques, dont
l'abbé Spallanzani a pris à tort 1 une pour un
amnios.
Tes oeufs de tous les Reptiles éclofent à une
température beaucoup moins élevée que celle
qui eft néceftaire pour le développement des oeufs
des Oifeaux. Ceux des Crapauds en particulier,
& fuivant l’auteur que nous venons de citer, fe
développent alors même que le thermomètre ne
marque que 6°-f-o.
En examinant, d’ailleurs, l’effet d’une tempe-
rature élevée fur les oeufs des Reptiles, on voit
que la vitalité de ceux des Grenouilles réfifte a
3y°-f-o, ainfi que le prouvent les expériences de
Spallanzani, & que la chaleur du feu ne retarde
ni n’accélère leur développement, mais au-delà du
quarante-cinquième degré ils ceflent d etre féconds
& paffent à là fermentation putride. ^ ^
Parmi les oeufs des Reptiles , ceux qui ont été
le mieux étudiés fous le rapport de l évolution
des germes , font ceux des Grenouilles.^
Durant les trois ou quatre jours qui fuivent
immédiatement la fécondation , le germe paroit
formé d’un amas réniforme de petits grains.
Vers le milieu du quatrième jour, tous ces