
M. Nilfon rapporte que fur les côtes deNorwège,
loin de toute embouchure de rivière , on trouve
des Unios, des Anodontes & des Cyclades vivant
pêle-mêle avec des Vénus, des Bucard^s & des
Cythérées.
Le féjour fecondaire des Mollufques , les cir-
conftances de leur vie qui en dépendent, font
extraordinairement variables. ,
Quelques-uns font véritablement pélagiens,
e’ eft-à-dire habitans de la haute mer.
Tels font les Calmars , les Seiches, les Spirules.
D’autres font littoraux , ou fréquentent habituellement
les bords de la mer ou- les rivages des
fleuves.
Les MaCtres, les Unios, les Anodontes font
dans ce cas.
Les uns relient fixés au fol qui les a vus naître.
On doit ranger dans cette catégorie les Huîtres,
les Ethéries , les Anomies.
Les autres adhèrent par ün byffus aux^orps
fubmergés.
La Moule du Danube & les Moules marines
font dans ce cas.
Il en eft qui ne fe plaifent qu’à la furface de la
vafe.
Les Unios & les Anodontes nous offrent des
exemples de ce genre.
D’ autres, comme les Cyclades , s’y enfoncent
profondément, ou creufent les pierres, comme
les Pholades, ou fe logent dans le bois fubmergé,
comme les Tarets.
On en voit qui établiffent leur demeure dans le
ttflîi aréolaire des éponges, qui fe nichent dans
le fable, qui fe collent à la furface des rochers.
Quelques Sabots, la plupart des Solens, les
Patelles I les Haliotides, les Ofcabrions, nous en
offrent autant d’exemples.
Les Colimaçons, les Limaces , rampent à la
furface du fo l, dans les lieux humides 6c ombragés
, ou montent le long des tiges des végétaux.
Les Claufîlies fe cachent communément fous la
mouffe.
Plufieurs Hélices fe plaifent dans les landes
defiechées ou fur les rochers les plus arides, les
plus expofés au foleil.
La température froide de l’atmofphèrè, des
lechereffes prolongées ont aufli une grande influence
fur la manière d’être des Mollulques terrestres
en particulier.
T o u s , à peu près , paffent l’hiver dans une
force d’engourdiffement pareil à celui des Loirs 6c
des Marmottes, & , aux approches de cette période
de torpeur, de cette fufpenfion de l’atti-
vicé vitale , ils s’enfoncent à une;plus ou moins
grande profondeur dans le fein delà terre, fe
npiffent fous les pierres , fe réfugient dans les
fentes des rochers, dans les trous des arbres, 6cç.
La féchereffe paroît produire les mêmes effets
fùr beaucoup d’entr’eux audi.
L’accroiffement général des Mollufques eflfort
lent, aufli peuvent-ils , pour la plupart, fupporter
de fort longs jeûnes, fans cependant trouver,
comme beaucoup d’autres animaux, de reffource
dans leur graifle , puifque , nous le favons déjà,
ce produit de l'économie vivante n’exifte dans
aucune de leurs efpèces ( i) .
Ils jouiffent, du refte, de la faculté de reproduire
allez rapidement quelques parties extérieures
de leurs corps , quand un accident les en
a privés, & ce fait a été obfervé un trop grand
nombre de fois pour être aujourd’hui révoqué en
doute. Mlu. Lemaflon Legolft (2) ,1e P. Cotte (3),
J. A. Murray (4), Charles Bonnet (5), Otto Fre-
dric Muller (6), Lazaro Spallanzani (7), 6c une
foule d’autres, ont vu les Limaçons reproduire
des portions de leur coquille , leurs tentacules,
leur tête même qui leur avoit été enlevée j les
Moules, les MaCtres, les Unios, les Anodontes,
les Planorbes, réparer les trous faits à leur coquille
ou produire de nouveau les appendices buccales
dont on les avoit privés.
Au refte , quand ils vivent en fociété & réunis
en grand nombre à la fois dans un même lieu, les
Mollufques ne font pas toujours individuellement
indépendans les uns des autres, comme les Huîtres
& les Moules. Il en eft qui fe greffent véritablement
avec leurs voiftns par les côtés de leur enveloppe
extérieure 6c qui femblent ainft confti-
tuer une forte d’animal compofé.
Beaucoup de Biphores & d’Afcidies font dans
ce cas.
Dans IesBotrylles 6c dans les Pyrofomes, cette
forte de fociété femble forcée , car 1’aCtion ffolée
de chaque individu femble concourir à une aélion
générale 6c utile à tous. '
C ’eft ainft que les Salpa confoederata de Forf-
kaêhl & Salpa J'ocia de Bofc, unies côte à côte,
en quantités innombrables, forment de longues
chaînes, que l’on eft d’abord tenté de prendre
pour un feul aniipal, tant leurs mouvemens font
réguliers & uniformes,
C'eft ainft encoré que , par leur rapprochement,
les Afcidies confticuent des groupes, qui ont i'air
ramifies lorfqu’ils s’attachent les uns fur les
autres.
(1) Ce que les gaftronomes appellent la graijfe dans les
Hui très , n'eii autre ehofe que la matière qui remplit les
ovaires à c.rtaines époques.
, (2). Journal dePhyfiqUe, tom. X IV , pag. /j85.
(0) I b id em rom. I I I , pag. 37ô.. — Journal des Savant,
pour 1770.
(4-) De Redintegratione partium Cochieis Limacibusque
pracifarum Programma. Gosttingce , 17 76 ', in-4°.
(5) Jonrnal de P hyfi que, tom. X » pag. i 6 5 . - - Tome V,
ParÇ* ÏV pag. 267 fle.fes (Euyres complètes , i%4;°.. .
(6) Journal de Phyfique, tom. X I 1 , pag, 1 u .
(7) Mem. délia Societa Italïana , tOjn- I } pag. 581 , 5c
tom. I I , pïg . 5o6.
SIXIEM E C LA S SE .
SIXIÈME CLASSE
CRUSTACÉS.
A n im a u x invertébrésarticulés, à membres articulés & au nombre de dix
au moins ; refpirant par des branchies ; à double circulation ; àfang blano.
G ÉN É R A L IT É S .
L es Anciens confondoient, pour la plupart5 les
C rustacés, dont nous faifons ici une claffe fpé-‘
ciale, avec les Poiffons 6c les Mollufques, ou,,
tout au plus, leur aflignoient une place entre ces
deux grandes divifion du Règne animal, & ce
n’eft que poftérieurement àLinnæus , qui les réu-
nifîoit auxlnfeétes aptères ( i ) , qu’on leur a afligné
le rang qu’ils occupent aujourd’hui fur l’échelle
des êtres.
Cependant Ariftote (2) avoit déjà fu les diftin-
guer par la dénomination particulière de m*a«-
xôïlçetxx (3), qui défignoit, félon lu i, des animaux
marins dépourvus de Tang , 6c dont l’enveloppe
articulée étoit beaucoup moins feüde que;
le tèft des Mollufques à coquilles, tout en offrant
bien plus de confiftancê que la peau des Mollufques
nus.
Cette expreflion eft confacrée en outre par
Hippocrate, quand il parle des Cruftacés qui peuvent
être de quelque utilité en médecine, 6c par
Athénée , auquel nous devons un catalogue des
efpèces de cette claffe qui fervoient à la nourriture
de l’homme chez les Grecs.
Chez les Romains , la ' dénomination dont fl
s’ agit fut changée en celle de cruftata 6c de cruf-
tacea. ' '■ -- ’ ’ . ■ i .
L’hiftoire de ceux-ci, du refte, ne fut pas mieux
connue de Pliné que d’Ariftote, & Belon„ Roiw
delet, Aldrovandi , Gefner & Jonfton ne, la per- ■
feàionnèrent que peu fous le rapport anatomique ;
fu'rtout.
’ ■ ( V) Voÿe\ K é d i t iô n d e ' 1 7 55d r io n Syfiema Naturoe.
(a) Dans fon Traité des Parties (chap. 5 & 8-), & dans
fon Hifi. des Animaux f liv . IV , ch. i ).
" (3) R. R. paXctxôs , mou , «fjçeixas , coquille. !
" Syfi. Anat. Tome IV. -
Nous favons déjà comment Linnæus les avoit
difpofés.
Parmi les Modernes, le premier qui ait fait une
claffe diftinCte des C rustacés, eft Mathurin-
Jacques Briffon , qui les a placés, entre les Poif-
fons & le s InfeCtes, avec les Myriapodes 3c les
Arachnides ( i) .
Plus tard, en 1775» Fabricius (2) partagea cette
claffe elle-même en deux grands ordres, les Syn-
gnatha 3c les Agonota.
En 1796, dans fon Précis des carafiteres génériques
des Infeiïes, ouvrage dans lequel ces animaux font,
pour la première fois, diftribués dans des familles
naturelles, M. Latreille a fait, fous les noms
d’Entomofiracés, de Crufiacés 6c de Myriapodes , &
avec nos Cruftacés proprement dits , par confé-
quent, trois ordres delà grande clafle des Infe&es.
En 1797, dans fon Tableau élémentaire de l ’Hif-
toire naturelle des Animaux, M.G. Cuvier a placé ,
fous le titre d‘Infeiïes pourvus de mâchoires & fans
ailes , les Crufiacés , les Arachnides 6c les Myriapodes,
dans une feélion diftinéle en tête de la
claffe , feêtion que, plus tard (3), & à l’exemple
de Briffon, il a transformée en une claffe bien
déterminée & généralement reconnue aujourd’hui,
fous la dénomination collective de C rustacés ,
parles naçuraliftes les plus diftingués, entr’autres
par MM. de Lamarck (4), Latreille (y ) , Du-
(?) Regnum animale in Clafies IXdifiribuium , 5cc. Pari-
fiis , 175,6, in-4p}
(2) Dans fon Syfiema Entomolog'ue.
, ( 3) Leçons, d1 * 5 6 7Anatpmie comparée. •— Le Règne animal .
2e. édition, Paris ,1 8 2 9 , torn. IV , pag. 7.
. (4) Syfième dcs Animaux fans vertèbres, Paris , in-8°. ,
1801.
' (o) Hifi. nat. des Crufiacés & des In fill e s , Paris , 1802,
in-8 ° ., com. I I I .
Eee