
!fS Çhim^res» $ue l’opinion de l’anatomifte
danois Jacobfon, qui a cherché à démontrer que
ces tuyaux étoient les organes du toucher. Beaucoup
de Poiffons offrent de ces pores placés
d une manière fymétrique le long de la ligne
latérale.
Aucune efpèce n’offre des traces d’un mufcle
peaucier.
Quelques efpèces, comme les Lamproies, les
Myxines, les Ammocætes, les Baudroies, les
Gycloptères, ont la peau nue, vifqueufe, entièrement
gélatineufe. Chez d’autres, elle n’eft nue
qu’en apparence, car, par la defliccation, on ÿ démontre
l’exiftence des éca lies : les Anguilles, les
Murènes, les Congres, les Blennies, quelques
Pimélodes, les Loches , font dans ce cas. On en
voie, qui, comme la plupart des Raies & des
Chiens de mer, ont, dans le tifïu même de la
peau , de petits tubercules plus ou moins durs, le
plus fouvent pointus ^toujours fort adhérens,
plus volumineux le long de la ligne dorfale &
caudale, & affez fréquemment, ainfi que dans les
Raies à peau chagrinée qui fervent aux Orientaux
a ^a,Pr^Paration du f a g r i , raffemblés comme des
pavés à compartimens ou des mofaïques. Il en eft
encore qui, telles que les Maquereaux, les Chimères,
les Xiphias, les Trichiures,les Epinoches,
ont le corps couvert d’un épiderme liffe fuper-
pofé à un corps muqueux brillant communément
de l’éclat de l’argent ou de la nacre; mais le plus
habituellement les tégumens des Poiffons font
régulièrement fquameux, comme dans les Ha- ,
rengs, les Alofes, les Truites, les Saumons, les
Labres, les Carpes, les Barbeaux, les Perches
, &ç. ; ou couverts de compartimens offeux ,
comme dans les Lépifoftées, plufieurs Chabots,
Diodons, Baliftes, & Trigles, les Coffres, les
Syngnathes, les Hippocampes, &c. Les Eftur-
geons ont une peau folidifiée par de larges boucliers
offeux , qui, en fe rapprochant & en
s’imbriquant fur la tête, forment une forte de
cafque.
L’habitation des Poiffons ne paroît point, du
r e l i e , fans quelqu’influence fur la nature de leur
peau, qui eft ordinairement nue & vifqueufe
chez ceux qui vivent plongés dans la va fe, comme
les Anguilles, les Lamproies, & que recouvrent
prefque conftamment ou des épines multipliées ,
ou de larges écailles chez les efpèces pélagiennes
ou obligées à de longs voyages.
884. L e C o r p s r é t i c u la i r e & f e s C o u le u r s . C’eft
ici le lieu de dire quelques mots des couleurs,
fouvent fi belles, fi agréables, fi vives, fi éclatantes,
fi admirablement contraftées, diftribuées
avec tant de fymétrie, qui parent la peau des
Poiffons, qui préfentent toutes les efpèces de
nuances & de mélanges, & qui font tellement
fugaces qu’elles changent beaucoup, fe fanent ou
difparoiffent quand l'animal perd la vie, ou quand
feulement il eft forti de l’eau. Aucune clalfe
parmi les vertébrés n'a été plus favorifée, n’a reçu
une parure & plus élégante, & plus variée, & plus
riche, où brillent à la fois les feux du diamant,
l’éclat chatoyant des plumes du Paon & des
Colibris, les reflets étincelans des pierres pré-
cieufes de l’Inde, la fplendeur de l’or le mieux
poli, le moiré argentin de la nacre la plus pure ,
la tranquille & douce clarté de l’arc d’iris, en
larges furfaces, en plaques, en bandes, en taches,
en gouttelettes, en rayons , en lignes, &c. Que
peut-on comparer, par exemple, à l’admirable
fpe&acle que donnent, en ce genre, les Zées,
les Chétodons, les Ephippus, les Spares, les
Labres, les Bodians, quand leur robe réfléchit, à
la furface d’une eau tranquille, les rayons du
foleil des tropiques, quand ils fe jouent en nageant
dans ces plages où l’aftre du jour verse la lumière
par torrens, & où ils participent à la magnificence
générale de la Nature ?
Conftamment les parties fupérieures du corps,
dans les animaux dont nous faifons l’hiftoire, font
plus vivement colorées que les inférieures ; celles-
ci font le plus fouvent blanches ; & cette règle eft
fipeu fujette à l’exception, que dans les Turbots,
les Plies, les Soles, les Carrelets, les Limandes,
les Flétans, les Achires, & autres Pleuroneétes,
qui nagent fur un des côtés, c'eft celui de ceux ci
qui eft expofé à la lumière qui fe trouve le plus
coloré.
N’oublions pas non plus de dire que fi une
mucofité vifqueufe fouvent renouvelée, empêche
l'eau de filtrer au travers des tégumens du Poif-
fon, une graiffe huileufe pénètre toutes les parties
de fon corps, fe mêle au vernis qui en enduit la
furface, le rend plus fouple , le fait plus facilement
gliffer au fein du liquide élément, & contribue
probablement au développement de la
phofphorefcence dont il jouit quelquefois pendant
fa vie, & furtout dans les mers équatoriales.
Tout le monde fait qu'au Sénégal, le favant
Adanfon a vu des poiffons fe revêtir pendant la
nuit d'une couche de feu, qui répandoit au loin
un éclat tranquille & doux, une lueur blanchâtre ,
eue Borda a vu , d’autre part, fe manifefter chez
des poiffons qui nageoient à vingt-deux pieds de
profondeur.
88y. L e s E c a i l l e r 3 le u r s V a r i é t é s . On défigne
fous ce nom, dans les Poissons, toutes les plaques
folides dont la peau eft recouverte; en général,
on peut même dire conftamment, quelle
que loit la forme de ces organes, qu’ils s’étendent
en lames minces, qu’ils repréfentent des
plaques épaiffes, que leurs molécules fe groupent
en tubercules ou s’élèvent en aiguillons,
qu’ils foient tranfparens ou opaques; ils ont les
rapports les plus prononcés avec les cheveux de
l’Homme, les poils, la corne, les ongles des
Quadrupèdes, les piquai]s du Porc-épic & du
Hériffon, & les plumes des Oifeaux. La matière
qui conftitue toutes les parties infenfibles eft à
peu près la meme dans toutes les clafies des
animaux.
Effectivement, les écailles des Poiffons reçoivent
, par leur bafe , de petits vaiffeaux nourriciers
, & tiennent aux tégumens à la manière
des ongles, des poils, &c.; comme eux aufli,
elles ne font corruptibles qu’à un très-foible
degré; elles fe crifpent, fe roulent fur elles-
mêmes par l’action du feu ; elles répandent, durant
leur combuftion , une odeur abfolument
analogue ; des fibres les compofent, comme des
fibres agglutinées compofent les ongles & les
cornes.
Le plus communément, les écailles des Poiffons
font im b r iq u é e s , c'eft-à-dire pofées en recouvrement
les unes au-deffus des autres, comme
les ardoifes des toits de nos maifons; elles font
rarement adhérentes entr’elles ; chez quelques
efpèces néanmoins, elles font ferrées & unies de
manière à ne former qu’une feule pièce, forte
de revêtement offeux qu’on a appelé cuiraffe , /o-
r i c a ; chez plufieurs autres, quoique diftinètes,
elles font collées les unes à côté des autres, &
c’eft ce qu’on nomme armure, c a ta p h r a f ta (1).
On ne connoît qu’un très-petit nombre de Poiffons
entièrement privés d’écailies, ou, comme
le difent les ichthyologiftes, a lé p id o t e s ; peut-
être même en font-ils tous pourvus ; car lorfque
la peau qui recouvre ces animaux a été defféchée,
^11, peut avec du foin, dans toutes les efpèces à
peu près, détacher une pouffière écailleufe &
brillante, ainfi que l’a démontré, dans un Mémoire
à ce fujet, P. M. Augufte Brouffonnet (2),
de l’Académie des fciences. Dans le Cépole
ténia, par exemple, dont les écailles n’avoient
point été décrites par les naturaliftes , & avoient
même paru à Gouan ne point exifter, ces organes
font rangés en lignes obliques qui fe
croifent en formant des lofanges, & font retenus
fur le corps par une enveloppe très-fine & très-
déliée; ils laiffent fur la peau, en tombant, une
trace carrée, & on les voit à l’oeil très-diltinc-
tement.
L’exiftence des écailles a été également démontrée
pour le Rémora (3) , à qui Linnæus (4)
& Gouan (j) en avoient refufé , & pour l’Am-
modyte appât, que ce dernier ( 6) & Wil-
(1) J. G o t t lo b Schneider , Hifi. Pifcium nat. & lit-
ferar. , Lipf. , 1789, in-4° i , pa.g. 3o8.
(2) Observations fur les Ecailles de plufieurs efpèces de
Poiffons , qu'on croit communément dépourvus de ces parties.
(Journal de Phyfique , tonie X X X I , pag. 12., ) ,
(3) J. M. A. B rous son n k t , ubi fuprd.
(4) M Mk. , Ed. G mei,. , gen. 117, fp. 1.
(5) Z. c. , pag. i83.
46/ Ibidem, pag. 175.
lughby (i)> ont dit en être privé. On les diftingue
pareillement bien chez l'Anguille, malgré l’affer-
tion contraire de Rondelet (a) & de beaucoup
d'autres auteurs, & dans l'Anarrhique, maigre
ce qu’en ont dit Willughby (5) & Gronow (4).
Dans quelques Poiffons, les écailles font entièrement
à découvert) dans d'autres, elles font
en partie couvertes par la peau ou même cachées
dans fon épaiffeur. Quelques Clupées nous offrent
un exemple remarquable du premier cas,
l'Anguille rentre dans le fécond.
Le corps , la tête, & même les yeux de ce
poiffon font, en effet, recouverts d'une peau
d’un tiffu ferré, blanchâtre & parfemée d'une infinité
de petits points noirâtres; elle eft protégée
par un épiderme fin & de cette dernière couleur.
On trouve entre ces deux couches des tégumens
communs du corps, de petites cellules oblon-
gues ou arrondies, d’une ou de deux lignes de
diamètre, & en partie remplies par l'humeur
vifqueufe qui lubréfie la furface du corps. C’elt
dans ces vacuoles que font logées les écailles, une
pour chacune d’elles. Leeuwenhoeck (y), Laurent
Roberg(é), & Bafter (7) ont décrit & figuré
cette difpofition.
La manière de vivre & la forme de chaque
efpèce de Poiffons influent affez habituellement
fur la pofition des écailles. Ainfi, ceux dont les
écailles font à découvert & feulement retenues
par des liens vafculaires, nagent en général dans
de grands fonds, ne s'approchent jamais du rivage
, & font, par conféquent, moins expofés â
perdre ces parties, que des chocs contre les
rochers & les plantes marines pourraient détacher
: telles font la plupart des Clupées, l’Argentine,
&c.
A mefure que les Poiffons font deftinés à s’approcher
un peu plus du rivage, leurs écailles
font recouvertes en partie par la peau ; l'épaif-
feur de celles-ci devient auffi plus confidérable,
& leur adhérence eft plus forte.
Telles font plufieurs efpèces de Perches, de
Sciènes, de Labres, de Crénilabres, de Lutjans,
de Bodians, de Girelles, de Spares , de Pagres ,
de Dentés, de Serrans, les Gremilles, les Holo -
centres, &c.
Plus ces écailles font petites & plus la membrane
qui les fixe eft épaiffe.
Pour s'en convaincre, il ne faut que comparer
une Tanche avec un Brochet.
Une preuve qui milite en faveur de l'affertion
fr) De H ifi. Pifcium , lib. IV, etc., Oxonii, 1686,
in-fol.
(2) Z. c. , lib. I I , c. 3i.
(3) Z. c. (4) Mufitum ichthyologicum , 8cc.
(5) Arcan. Nat, , &c.
(6) Differt. de Pifcibus, Upfal., 1727, in-4°*
I7J Opufc. fubceffiva, Scc.