
Céraftes , cachant en terre ou fous les feuilles
tout le refte de leur corps, mettent en mouvement
ces appendices pour attirer les oifeaux qu’i's
veulent dévorer ( j), dans ces vaftes déferts des
contrées les plus chaudes de l’Afrique feptentrio-
nale à dont ils partagent la domination avec les redoutables
afpics.
Nous avons déjà dit que la Vipère ammodyte
ou Vipère de Charas, portoit une force de corne
auffi à l’extrémité du mufeau i mais nous avons
reconnu que, fous aucun rapport de ftruéture,
d’accroiffement, de connexions, cet organe ne
refTembloit à ceux du même genre qui exiflent
chez les Mammifères. L’Orvet à long nez & le
Langaha font dans le même cas.
Quant à l’Iguane cornu dé Saint-Domingue,
figuré par Bonnaterre (2) & décrit par De Lacé-
pède à la fin de l'on Hifivire naturelle aes Serpens,
fes prétendues cornes ne font que trois grandes
écailles faillantes, difpofées en triangle fur le
front, & dont une, haute de quatre à huit
lignes, dépafie les autres.
En parcourant les autres familles des Reptiles,
on reconnoît auffi , parmi les Batraciens , l’exif-
tence d’un appendice cératoïde, au-deffiis de
chaque oeil, chez le Crapaud cornu (Bufo cor-
nutus, Laurenti) & chez le Crapaud perlé {Bufo
margaritifer, Daudin).
F O N C T IO N Q U A T R IÈ M E .
Respiration,
888. ha Refpiration, en général. La refpiration
eft une fonction propre aux animaux, qui confifte
dans une élaboration nouvelle de la fubîlance def-
tinée effentieliement à nourrir, & qui eft l’effet
du contaéf de l’air avec cette fubftance. Quelle que
foit la forme de l’appareil organique deftiné à
fon accompliflement, quel que foit le méca-
nifme de ce contaéf , le phénomène eft conftam-
ment le même. Les poumons, les branchies des
vertébrés, les houppes, les panaches, les franges
des animaux des claffes inférieures, ne font
que des moyens employés par la Nature, pour
étaler l’air & le liquide en circulation fur de plus ,
grandes furfaces, pour multiplier les points de
contaét. La refpiration n’ eft donc que 1 aêlion intime
& réciproque qu’exercent l’un fur l’autre,
le fluide ambiant & le liquide nourricier. Toujours
quand elle s’accomplit, le fang ou le fluide
(1) L ’évêque Ifidore, dit le Jeune, qui avoit un goûc
merveilleux pour les fables, & qui recueilloit tous les coûtes
populaires qui circ.d oient de-fon temps, a écrit, évidemment
à tort, que les cornes du Céralle étoient courbées
comme celles des Béliers.
(2) Encyclopédie méthodique, explication delà fîg. \ , de
la pl. IV , des planches-d’Erpétologie.
i qui le remplace s après avoir circulé dans tout le
j corps & reçu des matériaux réparateurs,, vient
! acquérir de nouvelles qualités dans un fyftème
d’organes particulier.
C ’eft dans ce but que, chez les Mammifères &
les Oifeaux, ainfî que dans la plupart des Reptiles,
l’air eft introduit dans le thorax pour en être ex-
pulfé enfuite , & c’eft là ce qui conftitue Yinfpiration
& l’expiration.
Chez eux, au refte, comme dans tous les autres
animaux, la refpiration tient effentieliement à la
vie, qui ceffe par fuite de fon interruption un peu
prolongée : elle eft une de ces fondions que les
Anciens appeloient vitales , parce que leur abolition
entraîne nécefïairement la mort.
Son étendue eft conftamment en rapport avec
l’énergie des mouvemens & des fenfations.
A cet égard les Reptiles ne dérogent point à la
règle générale.
Ces animaux ont le coeur difpofé de manière
qu’à chaque contra&ion il n’envoie dans le pou-
I mon qu’une feule portion du fang qu’il a reçu en'
diverfes parties du corps, & que le refte de .ce
j. fluide retourne aux organes fans avoir paffé par le
poumon, & fans avoir éprouvé l’influence des
j phénomènes chimiques de la refpiration (1).
Il réfulte de là que l’adion de l’oxygène furie
fluide nourricier eft moindre que dans les Mammifères
& furtout dans les Oiféaux, en forte que fi la
quantité de refpiration de ceux-ci, où tout le fang
eft contraint de traverfer les poumons avant de
retourner au refte du corps, eft exprimée par l’unité,
la quantité de refpiration des Reptiles ne
pourra être repréfentée que par une fraction de
cette unité, d’autant plus petite d’ailleurs, que
la portion de fang qui fe rend au poumon à chaque
contra&ion du coeur fera moindre.
Or, comme l’étendue de la refpiration non-
feulement donne la mefure de la chaleur dont les
divers animaux font pénétrés, mais encore fe
trouve en proportion avec l’aétivité des autres
fondions, le Reptile, dont le poumon véficuleux
ne reçoit que peu de fang à la fois, dont les infpi-
rations fe font à des intervalles prolongés, &
peuvent même être entièrement fufpendues pendant
un certain temps, a le fang froid, l’énergie
mu feu! aire moins développée que les Mammifères
, les habitudes généralement pareffeufes, là
digeftion exceffivement lente & les fenfations ob-
tufes, au point que , dans les pays froids ou tempérés
, il refte engourdi & fans mouvement durant
des faifons tout entières, & qu’il fupporte (ans
peine de longs jeunes.
(1) V o y e dans le Vocabulaire-qui compofe le tome 1er. de nocre Syfième anatomique, l’hifloire de la fonâion
dont il s’agit ici chez l’homme & les animaux des claies fu-
périeures.
C ’eft la petiteffe des vaifleaux pulmonaires qui
permet aux Reptiles de fiifpendre leur refpiration
fans arrêter le cours du fang ; c’eft à cette circonf-
tance qu’ils doivent auflî la facilité de plonger
plus long-temps & mieux que les Mammifères
& les Oifeaux. ; N
La refpiration eft donc moins néceffiure a ces
animaux qu’à ceux des deux claffes fuperieures}
l'irritabilité mufculaire chez eux s’épuife d autant
moins vite qu’il y a moins de moyens de la réparer,
& , de là , la faculté dont jouit leur chair en
lambeaux de conferver fon irritabilité bien longtemps
encore après avoir été féparée du refte du
corps} leur coeur bat & palpite, & , depuis
plufieurs heures déjà cependant, il a été arraché
du thorax, & fon extraction n’empêche point les
membres & d’autres parties de fe mouvoir, de
s’agiter encore (1). ^ ,
La quantité de refpiration des Reptiles n elt
point hxéè, comme celle des Mammifères & des
Oifeaux} elle varie avec la proportion du diamètre
de 1.’artère pulmonaire comparé à Celui de
l’aorte. C ’eft ainii que les C héloniens & les Sauriens
refpirent beaucoup plus que les Ba t r a c
ie n s , & c’eft ainfi encore que l’on peut expliquer
comment, dè tel à tel Reptile, il exifte des
différences d’énergie & de fenfibiiité beaucoup
plus grandes qu’il ne peut en exifter d un Mammifère
à un autre , d’un oileau a un autre (2).
889. Le Larynx en général. Le larynx des diffé-
rens genres ne varie pas moins parmi les Reptiles
que dans les autres claffes.
Il a cependant, ceci de commun , qu’il manque
d’épiglotte > & qu’il fe çompqfe de pièces analogues
à celles du larynx fupérieur des Oifeaux.
Ce Larynx fupérieur eft, d’ailleurs, conftamment
le feul organe vocal des Reptiles. Il n exifte
chez eux rien que l’on puiffe comparer au larynx
inSérieuf des Oiieaux (5).
La charpente carti’agineufe du larynx du Crocodile
eit compofée de cinq pièces.
De ces pièces , l’ une eft une plaque à peu près
carrée, qui .fait tout le deffous de l’appareil.
Au milieu de fon bord antérieur & près l’un
de l'autre,. fe fixent deux arcs de cercle, deux
afpèces d'anfes, qui, par leur autre extrémité,
s’attachent chacun au milieu du bord latéral de
fon côté. ^ , r 3 tr j 1
Leur corps fe tient un peu élevé au-deffus de la
plaque carrée, & laiffe, de chaque cote, entre lui
& elle, un efpace enfoncé en forme de rein &
fermé par des membranes.
L’extrémité antérieure de chacune de ces anfes
forme une faillie latérale & verticale, qui eft
comme un pilier fous le milieu de la glotte.
(1) Voye^ ci-deflus , pag. 78 , n°. 226.
(2) Voye\ ci-après , nu. 941.
(3j Voyc-{ tome I I I , page 6i5, n°. 889, & 618, n°. 911.
En outre, à l’angle poftérieur externe de la
plaque, s’articule, à droite & à gauche, une
branche qui vient, en deffus, fe joindre à fa fem-
blable, pour former, avec le bord poftérieur de
la plaque, un anneau complet, qui eft le commencement
de la trachée-artère.
Dans l’Iguane, les piliers font à peine plus fail-
lans en dedans que le refte des parois du larynx ,
& la plaque inferieure fe'porte en avant & s’élargit
en fe redreffant comme pour former un rudiment
d’épiglotte.
L’organifation du larynx eft tout auffi fimple
dans les Monitors , les Lézards, les C héloniens
& les O ph id iens. Chez tous , on ne trouve
qu’une plaque inférieure & deux pièces latérales
qui rétréciffent un peu les bords de la glotte.
Dans la Tortue bourbeufe, qui eft une Emyde
(Emys lutaria), on obferve au plancher de For*-
gane, un enfoncement arrondi, mais fans aucune
trace de rubans vocaux.
Dans les Chélonées , cet enfoncement eft moins
marqué. ..
Le Caméléon offre, dans fon larynx, des piliers
à peu près comme ceux que préfente le Crocodile
, mais ils font garnis chacun d’une membrane
tendue, dirigée en arrière & bien vibratile : au-
devant d’èux eft, de chaque côté, une protubérance
charnue, qui rétrécit la glotte.
Mais ce que le Caméléon offre ici de plus remar-
1 quable, c’eft un petit fac membraneux qui s’ouvre
en deffous, entre la plaque inférieure du larynx &
le premier anneau delà trachée-artère (1).
Malgré le goître qui les caraftérife à l’extérieur,
ni les Iguanes, ni les Dragons, ne font pourvus
d’un pareil fac.
Les Grenouilles & les Rainettes, dont la voix fe
fait entendre au loin, ont un larynx formé inférieurement
par une plaque tranfverfale mince,
portant, à droite & à gauche, un grand anneau,
origine de chacune des bronches, en forte qu’il n’y
a point de tronc de la trachée-artère dans ces
animaux.
Sur le devant de la plaqûe s’ articulent deux
pièces ovales, convexes en dehors, concaves en
dedans, & qu'on peut parfaitement comparer à
deux efpèces de timbales.
Les Grenouilles mâles ont, de plus, deux facs
qui s’ouvrent chacun par un petit trou dans le
fond de la bouche fur les côtés. Paffant au-deffous
de l’arc de la mâchoire inférieure, ces deux facs,
lorfqu’ils font gonflés, font faillir la peau de chaque
côté fous l'oreille, & s’enflent quand l’animal
crie. Ariftote paroît les avoir pris pour une fimple
expanfion des lèvres (2).
Les Grenouilles femelles , les Crapauds des
(1) Cuvier , Leçons citées, tome IV , pag. 537.
(2) Ubi fuprà, A , Kttp. I ,