
effet; mais onétoit frappe violemment, lorfqu’on j
employait dans le même but une barre de métal ou un corps très-mouillé.
Les recherches des phyficiens , depuis cette
époque j n'ont fait que confirmer les obfervations
intéreflantes de Walsh. Spallanznni eft entièrement
d'accord rvec lui. Il a reconnu que lorfqu on
place la Torpille fur une plaquede verre, elle
donne un coup beaucoup plus fort* mais il n’a
point été plus heureux que lui pour découvrir
rétincelle au moment du choc. Cette gloire étoit
réfervée au célèbre Galvani, qui l’a diftinguée à
l’aide du microfcope, & qui rapporte ce fait dans
des mémoires adrefies à Spallanzani, & imprimés
à Bologneen ' 1-797. Dès 1792, Guifan, néanmoins,
qui répéta avec foin les expériences de
Walsh , de Williamfon , d’Ingènhouz , fc c ., fur
ce fujet, avoir, dans l’obfcurité, aperçu la lumière
de l’étincelle électrique;
S i, de ces recherches’ faites avec Lang froid &
d'ifeernement, nous pafifons à ce qu’ont dit les
anciens médecins fur les propriétés de la Torpille,
nous y trouverons beaucoup d’exagération. Ainfi,
Ambroife Paré , qui avoit fort bien indiqué l’ef-
pèce d’engourdifTement que caufe la Torpille es
mains de ceux qüi touchent feulement le retq ou elle
cftprrfe, croit que celui qui y a touché en peut
mourir. Mais ce n’ eft point tout ; un être aufli
ftngulier ne pouvoit manquer d’occuper une
place parmi les fubfianees médicamenteufes.
Hippocrate en confeille la chair rôtie aux malades
'atteints d'une hydropifie co‘nfécutive à une
affection du foie ; Pline la recommande- comme
laxative; Diofconde la faifoit appliquer fur la
tête dans les • céphalées chroniques & dans les
rhumatifmes. Galien fc fes fuccelîeurs, Paul d’E-
gine & Avicenne, fuivent en cela Diolcoride >
mais recommandent que Panimal-'foit vivant, ce
que veut aufli Mafcellus Empiricus. Scribonius
Largus dit que l’affranchi Anteroes fut guéri de
la goutte par une femblable application,.& Aëtius,
l’ Amydéen , affure que lorfque la Torpille eft
morte, elle ne guérit plus les douleurs. '
Ne nous étonnons donc point de voir, de nos
jours, les Abyffins lier fur une table leurs fébri-
citans, fc leur appliquer ce poifion à l’état de
vie fur tous les membres fucceflivement. Cette
opération fait cruellement fouffiir, mais elle eft,
dit-on, véritablement fébrifuge.
On faifoit aufli jadis entrer Ja chair de la To rpille
dans certaines préparations pharmaceutiques
: c’ eft ainfi que nous trouvons dans Nicolas
Myrepfe fc dans Alexandre de Traites la compo-
fition d’un cérat adouciflant dont elle fait la bafe,
fc que l’on recommandoit contre la goutte fc les
thumatifmes articulaires.
Ælien dit que la même chair, macérée dans le
vinaigre, eft un dépilatoire.
Nous venons de voir la Torpille jouir de facultés
bien extraordinaires; nous avons rapporté.
( quelques-unes des opiriions tout aufli extraordi-
1
naires auxquelles^ ces facultés ont donné naiffance,>
& nous pouvons affirmer qu’autrefois, à plus jüfte
titre encore que de nos jours, on avoit raifon de
s’écrier : O cacas hominum mentes !
Et en effet’, abandonnant la fphère des hypo-
thèfes, les médecins fc les naturalises de nos
jours ont du moins, & d’une manière toute rationnelle,
voulu ti oitver l’organe où s’élaboroit
cette électricité particulière de la Torpille. 11$;
Pont décrit, ils ont pu expliquer fon action, &
ils ont ainfi fait faire quelques pas à la phyfiologie
des animaux.
Cet organe, double & fymétrique, placé de
chaque côté du crâne & des branchies , s’étend
depuis le bout du mufeau jufqu’au cartilage demi-
circulaire qui borne en avant l’abdomen , entre
les tégumens de la partie fupérieure de l’animal ,
ceux de fa face inférieure & les nageoires pectorales.
Un tiflu cellulaire denfe & ferré fc quelques
fibres aponévrotiques courtes & droites lé fixent
aux parties environnantes, & fpécialement au./
bord du cartilage dont nous avons parlé. Deux
aponévrofes, l’une à fibres longitudinales, l’autre
à fibres tranfverfales , recouvrent fa face fupé-
rieure. C ’efi la dernière de ces aponévrofes qui
femble conftituer la trame de. l’organe proprement
dit; un très-grand nombre de prolongemens
membraneux fe féparent en effet de la face inférieure,
& font difpofés de manière à former des
pri fines creux perpendiculaires à la fur face du-
poiflon* & qui ont d’autant moins de hauteur
qu’on les examine plus loin de la ligne médiane
de l’animal.
Le nombre de pans de ces prifmes varie beaucoup
fur un même individu; quelques-uns en ont"
fix, d’autres cinq, & d’autres encore feulement
quatre. On en voit de réguliers, mais la plupart
ne le font point.
Leurs parois font demi-tranfparenres & étroite^
ment unies à celles des prifmes voifins par dcSN
fibres tranfverfales, non élaftiques*
Chacun d’eux eit, en outre, divifé intérieure*^
ment en plufieursloges par des diaphragmes horizontaux
, formés par les replis d’une membrane
muqueufe mince , déliée, tranfparente fc abondamment
arrofée par des vaifleaux fanguins.
Chacune des loges eft remplie par un fluide
particulier.
Dans les Torpilles adultes, on compte par
organe près de douze cent*- dè ces prifmes creux;
mais à un âge moins avancé , on n’en trouve que
quatre à cinq cents , & dans les très-jeunes fujetS'
leulement environ deux cents..
Chaque organe eft traverfé par des artères, des
veines & des nerfs fi gros, que leur volume a parir
à Hunter aufli extraordinaire que les phénomènes
auxquels ils donnent lieu. Ces nerfs fe
ramifientiJ’ infini& dans toutes fortes de direclions,
tant entre les tubes cjue fur les cloifons qui
en partagent la cavité, puis femblent s’épanouir
dans le mucus gélatineux qui les remplit. Ils
viennent de la huitième paire.
France feo Redi & fon difciple Lorenzini (1),
les premiers qui s’occupèrent de l’anatomie de la
Torpille d’une manière un peu foignée, prirent 1
les tubes nombreux dont nous venons de parler, I
pour autant de petits mufcles qu’ils appelèrent
wufeulifalcati. Mais John Hunter (2), Walsh (3), |
le comte de Lacépède (4 ), & le profeffeur j
Geoffioy Saint-Hilaire (5) ont donné de cet appa- !
reil électrique une defeription bien plus com- j
plète que celle de l’école italienne, & qui ne
nous paroît laififer que fort peu de chofe à délirer
, malgré le travail foigné de Michèle Gi-
donnée, il penfa que, par la contraCtîon lente
qui eft l’effet de l’aplati fie ment, la Torpille ban-
doit , pour ainfi dire , tous Tes refforts, rendoit
plus courts tous fes cylindres, fc augmentoit
en même temps leurs bafes, puis que,tout-à-coup,
les refforts fe d.-bandoient, les fibres longitudinales
rardi (6).
On ne fauroit, du refte, s'empêcher de recon-
noître ici une forte d’appareil galvanique, une
véritable pile d èVo lta , dontles nerfs, la pulpe
muqueufe & les feuillets aponévrotiques font les
éîémens. Or, l’ on doit concevoir l’énergie avec
laquelle agit ce grand affemblage d’environ 14^9:
tubes.
Aceufons donc feulementle peu de progrès qu’ a-
vott encore alors faits la ; hyfique expérimentale,
des erreurs dans lefquelles font tombés Redi &
quelques autres obfervateurs, quand ils ont voulu
expliquer le mode d’aCtion de ces organes. Ainfi
l’auteur italien dont nous venons de rappeler le
nom, fe conformant aux principes admis* de fon
temps, a fuppofé que des myriades de corpuf-
cules, fortant continuellement du corps de la Torpille
, mais plus abondamment dans certaines cir-
conftances que dans d’autres, engourdifloient les.
membres dans lefquels il s’infinuoient, foit parce
qu’ils s’y précipitoiènt en trop grand nombre à la
fo is , foit parce qu’ils y trouvoient des routes peu
appropriées à leur forme.
Borelli a attribué la commotion que l’ on éprouve
en touchant la Torpille, aux percutions réitérées
que ce poiflon exerce , pendant qu’il s’agite , fur
les ligamehs dés articulations & iur les tendons.
Réaumur, qui vint enfuite , démontra la faufleté
de l’opinion de Borelli, mais n’en avança point
une meilleure. Ayant remarqué que le dos de l’a
mimai eft légèrement convexe fc qu'il s’aplatif-
foit au moment ou la commotion alloit être
s’aîongeoient, & celles des cloifons fe rac-
courciffoient ; ce qui pouifoit en haut le mucus-
| contenu dans les tubes, en forte que le doigt qui
touchoit alors l’animal recevoit un coup ou plu-
! fleurs coups fucc.eflifs de chacun des tuyaux fur
[ lefquels il étoit appliqué. :
J Dans le Journal de P hyfique pour le mois de 1 feptembre 1772 , on voit que le doCteur Godefroy
Wils Schilling, à la fuite d’une Differtation en
anglais fur le pian, a publié le détail d expériences
qu’il a faites fur la Torpille , fc qui lui ont fait
1 croire que la caufe de la commotion qu’elle
produit exifte dans le magnétifme. Il a avancé que
! l’aimant attiroit ce poiffon comme il attire le fe r ,
j & que pour rendre toute fa vertu à une Torpille
I épuisée, il-falloit jeter de k limaillé de fer dans
J l’eau dans laquelle, elle nageoit.
LaTonpiLLF, G alvaNI {Torpédo Galvani, Riffo),
autre efpèce dont le corps roux en defius, fins
aucune tache , ni traits, ni points , qui eft bordée
1 de noir fur les côtés, qui a le ventre d’un bianc-
! roufiâtre , la queue fort ép aille y & la taille d un
j demi-mètre, qui habite en toutes kilons les pro- 1 fondeurs vateufes de la plage de Nice, où on l'ap-
I pelle vulgairement Dormiglioua -, dégage plus de
fluide électrique que les.autres éfpèces , fc a été,
par M. Riffo, confacrée à perpétuer la mémoire
du célèbre Galvani.
Une autre Torpille , la T orpille unjivïaculék
( Torpédo unimacuiaca3 Riffo), a le corps d un fauve
ifabelle en defius, avec des points étoilés blanchâtres
& une tache centrale .d’un beau bleu ,
entourée d’un céicle gris ; le devant de la tête
comme feftonné, les-yetix roufiàtres , les dents
fines ; les évens grands, fans dentelures ; la
queue mince & alongée.
Ses appareils éleétriques font à peine vifibles
& ne donnent que de fort légères lecoulles.
Parmi les Poiffons électriques , il nous faut encore
ranger le T eirodon ele5t.ri.cus de Gmelin , lequel
vit au milieu des bancs de corail creufes par
le mer & qui entourent l’île Saint-Jean , près de
_ celle de Comorre , dans l’Océan indien * & a été,
l ) Uhi fuprà.
(2) AnatomicaL Obfervations on the Torpédo. ( Philofopk.
Tranfaft., vol. L X i l l , pag. 4:Sl & luiv.)
m , l. c.
(4) WM modo.
T'(5) Annales du Muféum d‘ Hifl. nat. dt Paris, tome I ,
.page 392. • . . . '
rG) Saggio di OJJerva^ioni anatomic-hè intorno agli organi
elettrici délia Topedine. ( Mempr. délia Società haliana,
tome IL, pag; 553. )
pour la première fois > ob:etvé*en 17S6 parle
lieutenant William Pat.erfon (;).
Cet animal poffède la faculté de faire éprouver
de vives commotions à Ceux qui veulent le faifir,
( 1 ) An Account o f new eleürïcal Fifh. (Philofoph. Trartfacl. ,
vol. LX X V I , pag, 3$ 2. — Journal de P hyfique, come XXX,
L l z