
que nous venons d'énoncer, c'eft que les poif-
lons dont les écailles font cachées par l'épiderme,
font généralement apodes, ont le corps alongé
& propre à exécuter des mouvemèns de reptation,
ne. s'éloignant jamais des bords, fem-
blent faits pour vivre dans la vafe.
La forme, la confiftance, le volume, & c .,
des écailles font très-variables & peuvent donner
lieu à des confïdérations fort importantes de
philofophie ichthyologique.
Certaines^ écailles ont la figure d’une pointe
plus ou moins aigue; on les appelle des aiguillons
( aculei)\ d’autres fois, la matière qui les
compofe s'élève en tubercules , ou fe façonne en
écujfons ojfeux, ou s'étale en Boucliers ,• mais le
plus fouvent elle conftitue des lames aplaties, &
ce font là les écailles proprement dites.
En général, dans les écailles proprement dites,
le centre eft plus épais que la circonférence; c’eft
pour cela que quelques auteurs ont penfé que ces
parties prenoient leur accroiffement à la manière
des os plats chez, les Mammifères jj où les fibres
olfeufes partent en rayonnant d’un point plus ou
moins central.
Nous allons préfenter brièvement, & tel à
peu près que nous l'avons fait dans le Diétionnaire
des J ciences naturelles {\) y le tableau des variétés
les plus faillantes que peuvent offrir les organes
dont nous nous occupons.
Les Ecailles, confîdérées quant à leur
A. Situation, abfolue ou relative, font:
Imbriquées ou tuilees, fquama imbricata
c'eft-à-dire , appliquées en partie les unes fur les
autres, de manière à ce que l ’extrémité de la
première cache la bafe de la fécondé, & ainfi
dç fuite.
Exemples : les Perches, les Carpes, les Surmulets
, les Barbeaux, les Sciènes, les Spares.
2°. Eloignées 9 fquama remota, ou répandues fur
le corps fans fe toucher.
Exemples : l'Anguille, l'Anarrhique, le Congre
, &c.
3°. Contiguës, fquama contigua 3 c’eft-à-dire
n'empiétant pas les unes fur les autres.
_ Exemple : les vrais Baliftes.
4°; .Cachées , fquama occultay ou recouvertes
par l'épiderme.
Exemples : l'Anguille, l’Ammodyte , &c. 5°. Implantées fur le tronc & fur la tête tout a la
fois.'
Exemples : les Priacanthes , les Polyprions,
les Spares, les Sciènes.
6°. Implantées fur le tronc feulement.
Exemples : les GremiJles, les Morues, les
Muges.
( i) Tome XIV, pag. i 4g & fuir.
7°. Implantées fur le tronc , la tête & les nageoires
en partie.
Exemples : les Chétodons, les Ofphronèmes,
les Héniochus, les Ephippus, les Acanthopodes,
les Chelmons.
B. Nombre, font :
8 Nulles.
Exemples : la Lamproie, l’Ammocète, la
Myxine, &c.
9°* Raresy fquama rara.
Exemples: l’Anguille, la Myre, le Congre
la Donzelle.
IO°. Multipliées y fquama denfa , conferta.
Exemples : 1e Labre, le Muge, l'Exocet, la
Sardine.
C. Forme, font :
ii ° . Ovales y fquama ovata, c’eft-à-dire arrondies
& plus larges à une extrémité qu'à
1 autre.
Exemple : la Morue.
12°. Arrondies y fquama orbiculata, fubrotunda ,
c efi-a-dire offrant, dans leur circonférence, la
forme d’un demi-cercle au moins.
Exemples: le Hareng, la Béfole, l'Ombre, 1 Alofe.
I 3°> Rhomboïdales , fquama rhombeiformes.
Exemples : les Baliftes.
14°* Anguleufes, fquama angulata.
Exemple : le Lépifacanthe japonnais.
Crenelees ' ou dentées , fquama crenata-y
dentata, c'eft-à-dire préfentant des échancrures
ou de petites dentelure^ fur les bords.
Exemples : la Sole, la Perche goujonnière, les
Holocentres.
IM Ciliées, fquama ciliata > c’eft-à-dire bordées
de poils ou de cils.
Exemples : le Capros fanglier, l'Aulope.
17 . Enfcie y fquama ferrât a y quand, au lieu
de cils, elles font bordées de piquans.
Exemple : quelques efpèces de Chabots..
180. Àculéiformes, fquama aculeiformes, c'eft-
à-dire en pointe recourbée.
Certaines Raies ( 1 ) , plufîeurs Diodons ont
des écaillés de cette forte.
19 . Lancéolées 9 fquama lanceolata, ou enfer
délance.
Exemple : le Voilier.
20°. Granulées y fquama granulatay c'eft-à-dire
ayant l’apparence de petits tubercules durs, rapprochés
les uns des autres & rudes au toucher.
Exemples : les Rouffettes, les Rémoras, les
Alutères.
(1) Il faut toutefois obferver ici que les aiguillons de la
Raie bouclée ne font point de véritables écailles : ce font
des pointes olfeufes, recourbées & tranfparentes , fuppor-
tees par un tubercule blanc , opaque , creux intérieurement.
& portant l’empreinte des libres charnues fur lefquelles il
eft implanté.
D. Grandeur, font :
21°. Grandes , fquama magna. ^ .
Exemples : la GireUe macrolépidote, l ’Hémo-
chus macrolépidote», les Muges, 1 Exocet, &c.
2 2 ° . Larges y fquama lata.
Exemples : les Erythrins, le Benny ou Barbeau
du Nil.
fonsfont plongés dans l'eau; quand on a forcé
ceux-ci à quitter leur élément naturel, à perdre
; ainfi une grande partie do la puiffance vitale^qui
leur a été dévolue, la couleur de leurs écailles
fe fane, s'altère, & fouvent même difparoît
entièrement.
21°. Petites , fquama minuta y exigua.
Exemples : la Rafcaffe, la Loche, la Sardine.
24°. Fort petites y fquama minima.
Exemples : l’Ammodyte appât de vafe, le Bien- ,
nie vivipare.
2 J°. lnfenfibles, fquama haud vel vix confpicua.
Exemples : les.Gymnonotes, les Ceintures.
26°. Grandes & en plaques y fquama feutata.
Exemples : les Malarmats, les Coffres, les
Hippocampes.
E. Superficie, font:
270. Glabres ou liffes, fquama glabra , inermes.
Exemples : la Carpe, l'Exocet.
28°. Striées y fquama Jlriata.
Exemples: la Girelle macrolépidote, le Tétra-
gonurus.
290. Rudes , fquama afpera.
Exemples : le Goujon, le Priacanthe.
3 0 ° . Epineufes y fquama fpinofa, c eft-a-dire
heriflees de petites épines.
Exemple : le Lépidolèpre (1).
31°. Ponctuées , fquama punftata.
Exemple : la Rafcaffe.
^ 2. Vcloutées y fquama fubtomentofa.
Exemple : les Monacanthes.
3 »°. Carénées y fquama carinata. ■.
Exemple : celles de la ligne latérale des
Exocets.
F. Adhérence , font.
3 4 ° . Caduquesfquama decidua.
Exemples : la Donzelle, le Phycis.
3 5 ° . Perfifiantes y fquama tenaces.
Exemples : la Carpe, les Lépifoftées.
G. Consistance , font:
36°. Molles, flexibles, pliantes , fquama f exiles.
Exemples : 1e Hareng, le Saumon, l’Alofe,
l'Anchois.
3 70. Offenses , fquama offea.
Exemples : les Lépifoftées, les Coffres, les
Polyptères.
38°. Cornées y fquama cornea.
Exemple : la Girelle macrolépidote.
390. Coriacées , fquama coriacea.
Exemple : les vrais Baliftes.
Remarquons, en terminant, que les écailles
ne confervent leurs teintes brillantes, leur éclat
fouvent égal à celui des pierres précieufes & des
métaux les plus riches, que tant que les Poif-
(1) Dans l’Oligopode, les écailles font grandes et portent
une petite épine, reçue dans une échancrure de l’écaille
précédente.
Enfin, durant leur v ie , les Poiffons changent
quelquefois fubitement de couleur, par l'effet
des paffions qui les émeuvent, des rranfitions
de température, &c.
F O N C T IO N Q U A T R IÈ M E .
Refpiration.
888. La Refpiration en général. De même que
les Reptiles, les Poiffons ne voient point la température
de leur corps accrue par l'accomplif*
fement de la refpiration ; mais chez eux, cette
fonction s'opère uniquement par l'intermède de
l'eau & à l'aide d'un appareil particulier placé
aux deux côtés du cou & confiftant en feuillets
fufpendiis .à des arceaux qui tiennent eux-mêmes à
l'os hyoïde, & compofes chacun d’ une foule de
lames réparées à la file, & recouvertes d'un
réfeau délicat de vaiffeaux fanguins aufii. remarquables
par leur nombre incalculable que par la
ténuité de leurs parois (1). *
Dans cet aéte, l’eau que le Poiffon avale s'échappe
entre ces lames & fort par des ouvertures
nommées ouïes, après avoir , au moyen
de la petite quantité d’air qu'elle contient, agi
fur, le fang continuellement envoyé aux branchies
ou à l’appareil que nous venons d’indiquer par
le coeur, qui ne repréfente que l'oreillette &
le ventricule droits des animaux à fang chaud.
Ainfi donc, dans cette claffe fi nombreufe
d'animaux à fang rouge & froid, les branchies
tiennent la place des- poumons. Elles font protégées
par un couvercle auquel les ichthyolo-
giftes ont donné le nom d'opercule ; & la preuve
qu’elles ne vivifient uniquement, comme l’ont
déjà reconnu Prieftley & Spallanzani, & comme
l'a démontré depuis M. le baron de Humboldt,
le fang pulmonaire qu'à l'aide de l'air difious
dans l'eau, c’ eft qu’on afphyxie un Poiffon,
quoique plongé dans ce dernier liquide, fi l'on
bouche exa&ement le vafe dans lequel il eft
renfermé, & qu'on arrive au même réfultat en
plaçant le bocal fous le récipient de la machine
pneumatique où l'on opère enfuite le vide.
Les Poiffons meurent également dans les eaux
faturées d'acide carbonique ou d’un autre gaz
non refpirable, tandis que les Carpes font con-
fervées vivantes dans de la mouffe humide;
preuve nouvelle qu’il fuffit d’ empêcher leurs
branchies de fe deffécher pour qu'elles puiffent
(1) Voye\ ci^-après, n°. 941.