
3g6 Mollufques,
Tel eft fpécialement le cas des Colimaçons, ;
des Limaces, des Teftacelles, des Parmacelles, ’
desDoris & des Tritonies.
C ’eftce que la plupart des Anciens paroiflent
avoir ignoré, puifqu’ils croyoient le Limaçon en- ,
gendre par le limon de la terre.
Quand les Limaces veulent s'accoupler, elles
renverfent en dehors le fac charnu qui conftitue
la cavité commune de leur appareil génital.
Celle-ci préfente alors trois ouvertures, celle
de l’oviduéte, celle de la veflie & celle de la
verge.
Cette dernière fe montre bientôt en fe renversant
hors de Ton orifice , & elle pénètre dans celui de
l’ovidu&e de l'autre individu.
Dans les Colimaçons, cette intromiflion réciproque
eft précédée de mouvemens préliminaires
plus vifs , plus paflionnés même qu’on ne pourroit
le fuppofer d’une efpèce Sam froide. Ils préludent
furtout à leurs careiïes amoureufes avec le dard à
quatre arêtes que nous avons décrit plus haut.
Lorfque deux individus fe rencontrent, ils commencent
par fe toucher, par fe frotter l’ un contre
l ’autre par toutes les parties de leur corps. Après
avoir employé plufieurs heures à cet exercice,
lorfque la bourfe commune commence à fortir &
à fe gonfler, l’un d’eux renverfe le fac du dard &
cherche à piquer de cette arme le corps de fon
camarade, qui, de fon côté , rentre dans fa coquille
avec une a&ivité inaccoutumée, & , montrant
bientôt fon arme, cherche aufli à s’en fervir.
Quel but peut avoir ce fingulier préliminaire ?
On ne le fait point encore d’une manière fatisfai-
iante. Le dard , au relie, fe rompt ordinairement
auflitôt qu’il a effleuré la peau & tombe à terre,
quoique quelquefois pourtant il demeure fiché
dans les tégumens.
La Parmacelle, chez laquelle on obferve également
un dard, doit avoir un accouplement analogue
à celui du Colimaçon.
Dans les Lymnées, le mode d’accouplement eft
encore plus extraordinaire, fi l’on peut s’exprimer
ainfi. y , _ ; . , .
Ici, effectivement, il faut au moins la reunion
de trois individus pour que l’exercice des rapports
génitaux s’accompliffe.
Celui du milieu pâtit comme femelle , avec le
premier , qui agit fur lui comme mâle , & agit
comme tel avec le troifième, qui le fupporte
comme ferâéiië. , .,
O r , de nouveaux individus viennent louvent,
de la même manière, s’ajouter à la fuite des trois
premiers, & leur nombre peut devenir te l, qu’il
en réfulte un long chapelet dans lequel tous les
individus intermédiaires font à la fois males &
femelles, tandis que le premier n'agit que comme
mâle & que le dernier ne remplit que le rôle de
femelle uniquement.
Souvent, au printemps, on obferve de fem-
blables cordons de ces Mollufques, accouplés
ainfi à la furface des eaux ftagnantes, par toute la
France, & même aux environs de Paris (1).
1154. La Geftation. Elle eft peu connue dans
les Mollufques. On fait feulement que chez le
Limaçon les oeufs font pondus peu de jours après
l’accouplement, le plus communément vers la
fin du fécond feptenaire.
Nous parlerons plus tard du féjour que fo,nt
les germes des Acéphales dans les branchies de
ces Mollufques (2).
I iy y. La Parturition. Rien de plus variable que
la forme fous laquelle le produit de la génération,
dans les Molluiques , apparoît à l’extérieur. Les
familles les plus naturelles n’ ont rien de confiant
fous ce rapport.
Rien de plus variable également que la puif-
fance de multiplication dans telles ou telles ef-
pèces comparées les unes aux autres.
On peut regarder pourtant comme un réfultat
confiant que les plus grofles efpèces produifent
le moins, & les plus petites le plus} que lesMol-
lufqùes vivipares font moins féconds que les Mollufques
ovipares j que ceux qui vivent fur terre le
font moins que ceux qui fréquentent habituellement
les eaux.
Dans les efpèces à fexes féparés, le plus communément
ce font des oeufs que les femelles
mettent au jour.
Parmi elles cependant, la Vivipare à bandes &
& certains petits Sabots font des petits vivans,
comme il confie des obfervations curieufes du
comteGiufeppeGinanni (3) d’abord, & de celles
de Mifs Warn & d’une foule d’autres enfuite.
Parmi les efpèces de Gafléropodes hermaphrodites,
le plus grand nombre eft ovipare. Les Par-
tulesdeM. deFeruffac font cependant exception :
elles font vivipares très-probablement.
On ignore à peu près la manière dont les germes
des Gaftéropodes hermaphrodites fortentdu corps
de leur mère j mais il femble démontré que ceux
des Acéphales naifîent à l’état vivant & un à un. II paroît qu’aucun Mollufque ne s’occupe du
foin des produits de fa génération , car ce qu’on
a dit des Poulpes à cette occafion n’eft pas mieux
prouvé que ce qu’on a avancé au fujet de la fidé-
(1) En fuivant le confeil que donne Léraery , à l’occa-
fjon du Colimaçon, c’eft-à-dire en mettant ces Mollufques
tout accouplés tremper dans du fort vinaigre, j ’ai pu obfcrver
fort bien la difpofition des parties durant l’a&e dont il s’agit.
(2) Voye\ ci-après, n°. 1256.
(3) Opéré poftume nel quale f i contengono Teftacei marini ,
p alu do fi. e terreftri delV Adriatico e del territorio di Ravenna da
lui ojfertati e deferitti. Venezia , J j 5 5 — i j 5 j , in-fol.
Mollufques.
lité conjugale de ces animaux. Adanfon cependant.
non moins connu par la multitude que par
l’e-xaftitude de fes obfervations.. nous rapporte
que la femelle de la Volute gondole recueille fes
petits pendant quelque temps fur le pli de fon
pied, & ceux de la Vivipare à bandes de nos eaux
douces font portés pendant quelques jours fur la
coquille de leur mère.
En général, le lieu où les oeufs font abandonnés
eft convenablement choifi pour leur développement
, & la vifeofité qui les entoure leur permet
de fe fixer aux corps fubmergés, de manière a
n’être que difficilement rejetés à fec fur les rives.
Ceux des Buccins, en raifon du pédoncule qui
les fqutient, font même à cet égard plus favorablement
difpofés que ceux de la plupart des autres
Mollufques.
Dans la Janthine , deftinée probablement à
flotter fans ceffe , ils entourent la coquille &
nagent avec elle. C ’eft , au moins. ce qu a vu fir
Everard Home.
Les Limaces, Iss Hélices, les Maillots, les
Claufilies , les Bulimes, cachent les leurs dans
les anfraâuofités des rochers, fous les pierres ,
dans la moufle qui couvre les racines des arbres
féculaires des antiques forêts , mais toujours a
l'humidité & à l'abri des rayons du foleil. 11 paroît que l'animal de l'Argonaute place les
fiens au fond de la coquille qu'il promène à la
furface des mers.
S e c t i o n c i n q u i è m e ,
IXfô. Les (Sufs , leurs Enveloppes & le Foetus en
general. Les oeufs des Mollufques n’ont jamais de
coque calcaire, une membrane molle, muqueufe,
ou tout au plus cornée, les enveloppe.
Ceux de quelques efpeces terreftres, par la
confiftance & la nature de leurs tégumens femblent
pourtant fe rapprocher quelque peu des oeufs des
Oifeaux.
Le plus fouvent, ils font réunis en une même
' mafie libre & flottante.
C'eft ce qu'on voit dans les Poulpes , les
Seiches, les Calmars, &c.
D'autres fois, ils font, comme dans quelques
Buccins, ifolés & pédonculés.
Enfin, quoiqu'ilolés les uns des autres, ils font
felfiles & globuleux , & tout au plus ramaflês en
tas, comme dans les Hélices.
Ils peuvent être encore liés par une glaire vif-
queufe qui en fait un tout, comme dans les Lymnées
, les Planorbes, ou qui les difpofe en bandes
gélatineufes, comme chez les Doris.
Les oeufs des Acéphales teftacés paroiffent,
d'après les obfervations de MM. Prévoit &Mayor,
de Genève (r), compofésd’un vitellus fphérique,
d'un jaune pâle ou d'un rouge-brun, flottant au
fein d'un albumen clair, qu'une enveloppe cryf-
talline, mince, facile à déchirer, entoure de
toutes parts. ■
Le mode de développement de ces oeurs elt
aflez. extraordinaire pour exiger de nous quelques
inftans d'attention, & pour nous obliger à ajouter
quelques nouveaux détails â ce que nous avons
déjà dit de la ftrwfture des ovaires chez, ces
animaux.
Si, par exemple, à l’entrée du printemps, on
recueille un certain nombre d’individus de la Moule
des Peintres ( XJmo Piclorum'), fi commune dans la
plupart de nos rivières, on trouve , chez les
uns, un véritable ovaire furchargé d oeufs j chez
d'autres, à la place de cec ovaire , un liquide
épais & laétefcent, qui , placé fous le microf-
cope , paroît habité par des myriades d'animalcules,
& , dans le plus grand nombre, l'humeur
blanche dont il s'agit & les oeufs tout à la fois (i).
Dans les individus où la préfence des ovaires
proprement dits eft manifefte, ceux-ci, comme
nous l’ avons déjà donné à entendre, forment, à
droite & à gauche, deux lobes placés fymétri-
quement fur les côtés du corps de 1 animal &
immédiatement au-deffous des tégumens. Us font
alors très-gonflés par fuite du développement des
oeufs, qui, arrivés à leur maturité, s'en détachent
pour tomber dans des cellules ou ils s en-
taflent au nombre de vingt à trente & s énduifent
d’un mucus qui lès colle les uns aux autres.
Ces oeufs ont alors environ 0,0001 mètre de
diamètre. _ , .
Bientôt ils déçhirent les parois des cellules qui
les renferment & vont fe loger dans les branchies,
dont chacune forme une cavité divifée en vacuoles
, dont l'entrée fe remarque vers le bord
fupérieur & ou les embryons doivent fe déve-
' lopper.
Au bout d’un féjour de quelques jours dans ces
vacuoles, en effet, lé vitellus de ces oeufs augmente
de volume & devient plus fluide. Un trait
reftiligne, d’une teinte plus foncée, fe defline à
fa furface entre deux courbes fymétriques qui
l'embraffent dans leur concavité , & qui, plus
tard, font deftinées à devenir le limbe des valves
de la coquille , tandis que le trait moyen en eft la
charnière.
Cette dernière partie acquiert rapidement beaucoup
de confiftance, mais l'efpace fitué immédiatement
au-deffous conferve une grande tranfpa-
(1) Annales des Sciences naturelles, tom. V I I , pag. 44/ •
(2) Celleobfervation, que j'ai répétée plus d'une lois ,
eft eu contradiâion avec celles faites par M. Prévoit. Je
regrette de ne pas être toujours d'accord avec uu auiïi habile
expérimentateur, ôc probablement les différences de rc-
fultats tiennent à des différences de localités.