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fur la claffe entière des Poiffons ne faiiroit appartenir
à un ouvrage de la nature de celui que nous
écrivons en ce moment ; cependant cette influence
donne lieu à la production de certaines
anomalies de ftruCture qui rentrent dans notre
fujet & dont l’examen devient néceffaire , mais il
ne nous arrêtera que quelques inftans.
Il eft généralement reconnu, par exemple, que
des Poiffons de la même efpèce n'ont pas, dans
toutes les eaux, destégumens également brillans,
des mufcles également colores, une chair également
tendre , délicate & favoureufe. C ’eft ainfi
encore que , dans une même rivière , ils offrent
des qualités différences, s’ils ont vécu habituellement
au-deflus ou au-deffous des cités populeufes
& des torrens fangeux. On a profité de ces faits,
déjà connus de Rondelet, pour communiquer à
la chair de ces animaux les qualités qui la rendent
fur tout recommandable dans les préparations culinaires.
- De même encore , à l'aide de certains alimens
d un prix peu élevé, on engraiflè promptement
plufieurs fortes de poiffons, on imprègne d'une
huile fine & blanche tous les tiffus de leur économie,
on en remplit tous les vides, toutes les
cellules, toutes les aréoles, toutes les vacuoles
de leurs organes, & fpécialement de leur foie.
Qui ne fait, par exemple, combien cet effet
eft prompt à fe manifefter chez les Carpes, les
Tanches, les Brèmes, qu'on nourrit avec du pain
de chènevis , avec des féverolles ou des pois
bouillis, avec du fnmier de brebis, &c.?
Tous les animaux engraiffent par l'effet du repos
& d’une copieufe nourriture. Les Poiffons ne
font point exception à cette règle. Lesperfonnes
qui s'occupent d'économie rurale & domeftique
n’ignorent point l'art d'engraiffer les Carpes, en
les fufpendant hors de l'eau dans de la moufle huétoit
un moyen prefqu’affuré de perfectionner 8c
leurs bonnes qualités & leurs formes élégantes.
De- même, dans les Poiffons , les individus qui
proviennent du mélange de: deux-races, deviennent
préférables à chacune de celles-ci, comme on
voit quelquefois , dans les laboratoires des chimif-
tes* le poids d’une fubftance mixte furpaffer d'une
quantité plus ou moins grande la fommedes poids-
réunis des principes qui lui ont donné naiffance.
Quoi qu'il en foi*, indépendamment du volume
général & du degré variable d’embonpoint, les
effets de l'art peuvent agir fur la forme, la confif-
tance, le nombre des organes, chez lés Poiffons,
& cela d’une manière durable.
C'eft ainfi qu'on voit les couleurs offrir , dans
leurs nuances & dans leur diftribution , des variétés
qui fe perpétuent par la génération d’âge en
âg e> la nageoire dorfale difparoître chez certaines
efpèces où elleexifte naturellement; la nageoire
de la queue être doublée ou triplée, comme on
peut s'en affurer fur certaines Carpes dosées de
la Chine.
1339. La Mort. Dans les premiers jours de fi
formation, le jeune poiflon croît avec une rapidité
qui commence à fe ralentir dès le moment ,où il
quitte l'oe u f, & diminue enfuite de plus en plus
à mefure que l'individu avance en âge. Ainfi , le
petit poiflon nouvellement éclos acquiert en huit
heures quatre lignes de longueur, & emploie en-»
fuite trois femaines pour grandir feulement d’une
ligne de plus, ce qui eft, d'ailleurs , en rapport
avec l'activité & l'énergie de fa circulation : le
coeur du germe encore contenu dans l'oeuf bat,
en effet, jufqu’à foixante fois par minute vers le
neuvième jour, tandis qu’aprês la naiffance il ne
donne plus que quarante puifations.
L'accroiffement, en outre ; ne fuit pas une égale
mide, affLz ferreè pour mettre obftacle a tout ! progrelhon dans toutes les efpèces de poiffons;
mouvement de leurs_ nageoires , & en les gor- j En trois ans, une Carpe ne parvient qu'à la taillé
géant de mie de pain imbibée de lait, & , par J de fix à (eptpouces de longueur, & elle n’arrive
intervalles, arrofée de quelques"gouttes d eau- 1 qu’au bout de dix ans à pefer une douzaine dé
de-vie. 1 livres. Les Tanches & lés Perches gràndiffent-eiv*
De meme encore que l’ablation des tefticules ! core plus lentement ; mais le contraire a lieu pour
, «. i : les Saumons , les Truites, les Corégftnes | les
ou des ovaires , parmi les mammifères & les oi-
feaux, transforme les taureaux , les béliers, les
coqs, les poules, en boeufs, en moutons, en
chapons, en poulardes furchargés de graille ; de
même aufli, en enlevant aux poiffons femelles
leurs ovaires » aux poiffons males leurs laitances, ^ qui leur permet d’acquérir un volume fouvent
opération pour laquelle il ne faut qu'un peu da- | confidérable, & ce qui fait que des efpèces de
dreffe & d attention , on développe en eux une » petites dimenfions durant leur jeuneffe, arrivent ,
furabondance énorme de tiffu adipeux & on accroît
Barbeaux, les Coryphènés & toutes les efpèces
voraces, en général.
De même que tous les autres animaux aqua-
: tiques, les Poiffons vivent fort long-temps, ce
beaucoup le volume de leur corps;
Nous avons déjà eu occafion de fignaler cette
particularité.
L'expérience a démontré également que le croi-
fentent des races dans les animaux domeftiques,
en général, comme les chevaux , les ânes, les
chèvres, leS moutons, les boeufs, les poules, & ç .,
avec les années, à une taille prodigieufe. La Raie
bouclée, par exemple, dont le poids ordinaire
n'eft que de quelques livres, pèfe parfois jufqu’à
deux cents livres, & l' Aigle de mer ( Myliobatts
aquila), qui ne pèfe guère que deux livres habituellement,
peut, ditSalviani, parvenir au poids
de trois quintaux. L'Efpadon, plus grôs fouvent
qu'un Dauphin, peut avoir vingt pieds de Lengueur,
& , fur les côtes d’Irlande, on a pêché
desFlets d’une telle groffeur qu'ils,péfoient quatre
censs livr.es. Qui n’a pas non plus.entendu parler
de ce monftrueiix Turbot pour la préparation duquel
l'infolent Domitien convoqua une affemblée
de fénateurs. dégénérés ? de ces Efturgeons du
Danube, qui font plus lourds que les boeufs qui
les traînent? de ces Mais du Rhin, qui pèfent
troisquintaux ? dé ces Requins, de ces Marteaux,
de ces Pèlerins, de cès Scies , longs'de iy , 20,
iy & 30 pieds , & ne pefant pas moins de ao , 20,
iy , 30, 40 & même fo quintaux ? de ce fameux
Brochet de Kaiferlautern, qui fut pris en 1497,
après avoir paflë 267 ans dans un étang ? de ces
Carpes des foffés de Pontchartrin, qui, du temps
de Buffon, avoient iyo ans? de celles du jardin
royal de Charlottenbourg, en Pruffe, lefquelies,
dit Bloch, font fi vieilles que leur tête eft couverte,
de- moufle ? de celles aufli que , dans quelques
écangs de la Luface , on nourriffoit depuis
environ 200 ans quand Samuel Ledel a eu oeça-
fion de les vifiter ?
Quelques efpèces*, du refte, ont une exiftence
beaucoup plus courte, une vie bien plus bornée.
Les Blêmes & les Tanches meurent entre 10 &
12 ans, les Anguilles vers 15 ans, ,& l’Epiiioche
vers 2 ans, feulement.
R É SUM É ,
Ou Confédérations anatomiques fur les Poiffons
en général»
Sans aucune efpèce de doute, l’organifation
des Poiffons les rapproche, fous plus d'un point
de vue, des animaux des autres claffés, mais il
n’y a de reffemblance entre les organes des uns
& des autres, qu’autant que leurs fonctions ellesmêmes
fe reffemblent. Les Poiffons ne font pas
plus des Mollufques perfectionnés que des Reptiles
feulement ébauchés ; ils condiment une claffe
à part tout-à-fâit, & tout indique dans leur ftruc-
ture la nécefliré indifpenfable d'un féjour habituel
dans l';eau, où, comme le dit fi juftement M. G.
Cuvier, ils ont dd être plongés lors de la création,
& où il relieront jufqu’à la deftruCtion de l'ordre
aCtuel des çhofes.
Si le crâne des Poiffons eft divifé en un nombre
d’os à peu près pareil à celui que l'on obferve
dans le crâne des Oileaux 6c des Reptiles fau-
riens, fi quelque reffemblance exifte aufli entre
lui & celui des foetus des Mammifères, on n'eft
pas plus en droit d’en conclure d’une manière
abfoiue que les Poiffons, les Reptiles & les Oi-
feaux repréfentent ces mêmes foetus arrêtés dans
leur développement à un terme plus ou moins
ïavancé, qu’on ne le fecoit de s’appuyer fur la dif-
pofition de leurs vaiffeaux & de leurs organes
principaux de la refpiration & de la circulation,
pour les affimiler aux Têtards des Batraciens ,
quoique cette difpofition y foit pourtant à peu près
la même. Ce ne font là que des points ifolés de.
rapprochement ; le nombre des organes attribués
à i'animalité étant borné,; quelques-uns de ces
organes font communs à plufieurs claffes. Rien en
cela -d'étonnant. De même que les Mammifères ,
les Oileaux, les Reptiles & les Mollufques, les
Poiffons polfèdent un lÿftème nerveux, un coeur,
un canal inteliinal, un foie. Mais quelle analogie
trouver entre le thorax des Oifeaux 6c les opercules
des branchies desPoiffons? entre les os des
nageoires pectorales de ceux-ci & les os des ailes
dé ceux là ? entre les rayons de leurs câtopes 6c
la charpente du membre pelvien des Mammifères
quadrupèdes? J’aimerois autant voir dans leurs
opercules les valves des coquilles des Mollufques
acéphales, dans les boucliers offeux de l'Eltur-
geon un fquelette extérieur, &c. &c.