
el les rendent tristes : leur mérite consiste à être
bien garnies par en bas.
L ’utilité des palissades consiste : i° . à cacher
les murs de clôture, à boucher par endroits des
trouées qui produiroient des aspects désagréables ,
et à procurer des ouvertures aux points de vue
qu’on veut ménager; 2°. à corriger et à racheter
les biais qui souvent se trouvent dans un tèrrain ,
et les coudes que forment certains murs ; 3°. à
servir de clôture aux bosquets , cloîtres et autres
compartimens qui doivent, être séparés, et où
l ’on pratique d’espace en espace des renfonce-
mens le long„des allées; 4°* à. revêtir le mur
d’appui d’une terrasse; 5°. à former des niches
qui décorent des jets d’eau , des figures ou des
vases; 6°. enfin, à dresser des portiques et à former
des galeries et des aroàdes.
On appelle palissades crénelées les palissades
qui sont couvertes d’espace en-espace, en manière
de créneaux , au-dessus d’une hauteur d’appui,
comme il y en a , par exemple, autour de la
pièce d’eau appelée Vile royale , à Versailles.
Tondre une palissade, c’est la dresser avec le
croissant, qui est une espèce de faux.
PALISSER ( Jardinage ), v. act. C’est disposer
les branches des arbres d’une palissade à un treillage
, ou contre un mur de clôture ou de terrasse,
en sorte qu’il en soit couvert partout le plus
qu’il est possible.
PALLADIO ( A n d r é ) , architecte, né à V i-
cence, en i 5i 8 , mort en i 58o. On voit par la
date d elà naissance de Palladio3 et conséquemment
par celle de l’époque où il put ^commencer
à exercer l’architecture , que déjà cet art, retiré
depuis un siècle de la barbarie du moyen âge,
rappelé à ses anciens principes, à ses véritables
types, aux pratiques du goût des Anciens , par
les éludes d’un très-grand nombre d’artistes célèbres
du quinzième siècle, et porté au plus haut
point peut-être de la perfection moderne, dans
les ouvrages de Bruneleschi, de Léon-Baptiste
Alberli , de Bramante , de Balthazar Peruzzi, des
San-Gallo, devoit offrir à leurs successeurs une
carrière déjà parcourue avec tant d’écla.t, que,
de nouveaux succès y devenoient plus difficiles.
Lorsque les premières places semblent toutes occupées,
il est assez naturel à ceux qui surviennent
, ou de se faire les suivans de leurs prede—:
césseurs , ou de se créer une fausse célébrité , par
la nouveauté qu’on cherche dans le caprice et la
bizarrerie.
André Palladio eut le bonheur et le mérite d’échapper
à ce double écueil. Après tant d’architectes
originaux, il sut encore, non-seulement
être original, mais devenir le modèle sur lequel
se sont réglés la plupart de ceux q u i, dans plus
d’un pays, ont fait briller l’art de l’architecture,
bon goût devint dominant, et il a donné son nom
à une école , c’est-à-dire, à une manière qui n’a
pas, depuis lui, eu de r iv ale ; tant il est vrai
qu’il y a toujours une place nouvelle dans tous les
arts , pour l ’homme à qui la nature a donné le' secret
de voir,-de sentir-et de penser par lui-même.’
11 faut avouer cependant, qu’en architecture'
surtout, il faut encore une autre condition. Cet
art dépend, bien plus que tout autre , d’une ren-1
contre de circonstances sans lesquelles , comme
dans certains terrains, les meilleurs germes peuvent
rester inféconds. Pour qu’il se donne d’habiles
architectes dans un temps ou dans un pays,
il faut qu’il s’y donne le besoin d’avoir de l’architecture.
Or l’architecture, pour être ce que son
nom signifie , demande ce qu’elle ne saur oit obtenir
, ni de toute sorte de société , ni'dans chaque
siècle. Une multitude de causes physiques.et
morales en développent ou en compriment la-
naissance ou. l’essor; une multitude de circonstances
en font naître le besoin , mais sous des formes
diverses , et à des degrés fort différens. •
Les seuls noms des premiers architectes que
nous venons de nommer, nous font connoître ,■
dans les monumens qui les ont illustrés ,-c esL-a—
dire , par la magnificence , la richesse et la grandeur
des temples des palais , des édifices civils
et religieux , une époque où l’architecture étoit?
comme le. premier besoin de la' société , où le
luxe des grandes familles nvalisoit avec celui des*
. gouvernemens. Ce fat alors que se créa cette
; suite mémorable des grauds ouvrages q u i, en
Italie , ont marqué, l’époque de la grande architecture,
c’est-à-dire, de l’art appliqué dans
| les plus grandes proportions , avec la.plus grande-
j solidité et le plus de richesse , à tous les ouvrages
commandés par les grauds intérêts de la
société.
Palladio ne trouva ni dans l ’Etat vénitien , ni
à l’époque où il parutg c’est-à-dire -, vers, le milieu
du seizième siècle, d’occasions aussi propices
à la conception et à l’exécution de cesjgràn-
des entreprises. L’Etat de Venise, encore brillant
alors par le commerce et par les .armes , a voit
dû à quelques monumens de l'antiquité , conservés
dans ses provinces, à ses anciennes communications
avec la Grèce , les traditions du bon
goût, et les premiers ouvrages de son architecture
en font foi. Son gouvernement aristocratique
avoit favorisé le luxe des édifices particuliers. La
démocratie l’étouffe sous le niveau de l’égalité;
mais le. régime de l’aristocratie ne présente d’autre
idée , que celle d’une royauté, répartie entre
plusieurs. Il est. dans les intérêts de cet ordre
de. choses , que la classe privilégiée qui gouverne,
fasse sentir an dehors s,on importance.
Elle ne sauroit mieux le faire pour la multitude ,
que par la distinction et la supériorité des demeures.
De-là l’espèce d’étiquette imposé à chaque
membre du.Gouvernement, de.proportionner
à son rang l’extérieur de son habitation , et
de-lè clés causes favorables à l’architecture des
palais , soqmis toutefois à de moindres dimensions
que ceux des princes et des monarques.
Telle fut la carrière qui s’ouvrit à Palladio :
il n’eut à créer ni de vastes églises , ni de ces palais
de souverains, ni de ces grands monumens
d’utilité publique , dont l’inconvénient ordinaire
fut d’user les talens successifs et divers de plusieurs
architectes. L ’état politique de son pays „
lui présenta une classe nombreuse de citoyens enrichis
et distingués , jaloux de laisser un souve- j.
nir de leur existence , dans des demeures auxquelles
ils attachoient leur nom. L’époque dont
on parle fut aussi pour Venise * comme il arrive
surtout'dans les pays dont le commerce augmente
les fortunes, une époque de renouvellement pour
l’a-rt de bâtir. Alors, une sorte de courant d;e
mode porte chacun, de proche en proche , à suivre
le ton dominant. Palladio contribua beaucoup
à augmenter ce mouvement. C’ëtoit à qui
auroit un projet de lui : les campagnes des environs
et les rives de la Brenta s’embellirent d une
suite de palais ou de maisons de plaisance, qui
sont devenues l’école de l’architecture, civile-
La supériorité du goût de Palladio , ou ce. qui
a donné à son école une plus grande autorité, tient
à ce qu’il a plus soigné ses plans qu’on ne l’avoit
fait avant lui, qu’il les a rendus plus accommodés
aux besoins des temps modernes , et aux facultés
des fortunes moyennes; qu il a su faire du grand
sans de grandes dimensions , et de la richesse
sans beaucoup de dépense; qu’il a eu le secret
d’approprier les -ordres aux façades des palais
avec une élégance toute nouvelle; d’employer
les ressources des matériaux divers, et d’en faire
servir la variété à la décoration des bâtimens ;
qn’enfin , il a mieux qu’aucun autre trouvé , dans'
l’imitation de l’antique , cet heureux milieu de
correction sans pédanterie, de sévérité sans affectation,
de liberté sans licence, qui a rendu l'architecture
et les ordonnances des Grecs propres
à tout pays,' applicables à tous'les usages, à tous
les genres de matériaux , dans toutes les sortes de
bâtimens, en petit comme en grand, et selon tous
les degrés de fortune de ceux qui bâtissent.
De fa it , après que l’architecte a formé son
style sur les grands modèles de l ’antiquité , et y a
puisé les raisons fondamentales et les principes
de proportion , sur lesquels repose-tout le système
de l’architecture , lorsqu’il a étudié dans les
grands ouvrages de Rome moderne et de Florence
'y lés applications faites de ces lois aux
moeurs et aux convenances d’un ordre de choses
fout-à-fait différentes , il semble qu’il ne peut
pas se dispenser d’aller chercher dans les oeuvres
de Palladio le secret d’un genre d’applications
encore plus usuelles aux travaux que noire état so
cial exigera de lu i, d’y étudier l’art de faire plier
tour à tour et nos besoins aux plaisirs d’une belle
Diction. d’Archit. Tome III.
architecture, et l ’agrément de ce lle -c i, aux nécessités
et aux sujétions sociales actuelles. ,
C’est ainsi que le goût de l’école de Palladio a
trouvé comme une seconde patrie en Angleterre,
où Inigo Jones, W re en , Gibb , Chambers et
plusieurs antres ont naturalisé ses plans, ses façades
de bâtiment, l’ajustement heureux de ses
formes, de ses profils, de ses ordonnances, et le
style de ses détails. ' .
Le style de Palladio a une propriété qui devoit
le propager ; c’est (comme on l’a dit) une
espèce de moyen terme entre cette austéri te
de système , dont quelques esprits exclusifs abusent
dans l’imitation de l’antique , et les doctrines
anarchiques et licencieuses de ceux, qui se refusent
à tout système, parce qu’aucun ne peut recevoir
d’application universelle , et qui soit sans:
exception. Il y a dans les édifices de Palladio ,
une raison toujours claire, une marche simple, un
accord satisfaisant entre les lois du besoin et
celles du plaisir; une telle harmonie enfin, qu on
ne sauroit dire lequel a commandé à l’autre. Sa
manière présente à tous les pays une imitation
facile; son mérite est bien ce qui a produit cette
facilité, mais cette facilité même d’être adaptée à
tout, est ce qui proclame son mérite. Aussi est-
il vrai de dire que Palladio est deveuu le maître
le plus universellement suivi dans toute 1 Europe,
e t , si l’on peut dire, le législateur des Modernes.
L’homme qui eut tant d’élèves paroît ne 1 avoir
été lui-même de personne. On ne cite aucun architecte
de son temps dont Palladio ait suivi les
leçons. Si on l’en croit, et ce qu’il dit de lui dans
la préface et l’épître dédicatoire du premier livre
de son Traité d*Architecture, entraîné dès son
jeune âge , par un goût naturel , versletude de
cet a r t, il n’eut pour guide et pour maître que
Vitruve. Ses études faites ainsi dans sa jeunesse,
démentent l’opinion fondée sur une simple tradition
, qu’il auroit perdu ce temps si précieux dans
des travaux mécaniques et subalternes. La seule
intelligence de Vitruve suppose un sujet déjà
versé dans plus d’un genre d’études.' Aussi T e-
manza assure-t-il que , dès l’âge de vingt-trois
ans, Palladio avoit déjà acquis des notions de
géométrie et de littérature, premiers degrés nécessaires
pour arriver au savoir qu’exige l’architecture.
' .
Quelques-uns ont cru-toutefois que le célèbre
littérateur Trissino auroit pu contribuer à son
instruction dans cet art , et influer sur la direction
de son goût. On l’a encore conclu de la mention
honorable que Palladio dans son Traité déjà
c ité , a fait de Trissino ; mais de cela même qu’il
n’en parle point, comme ayant élé.son maître, on
doit conclure que cela ne fut point, tant l’intérêt
même se seroit uni à la recounoissance, pour engager
l ’artiste à se vanter d’avoir reçu les leçons
d’un homme aussi célèbre.
Quoi qu’il en soit, il dut, sans douté, à son