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heureuse décoration. Sur un petit mur à. hauteur
d appui , et bâti dans le même plan, c’est-à-dire
circulairement, s’élèvent quatorze grands termes.,
que surmontent des bustes de philosophes d’une
proportion colossale. Ces termes qua dr an gui aires
sont engagés par leur partie inférieure dans le
petit mur d’appui, sur lequel sont scellés des
grilles qui s’étendent d’un terme à l’autre, et qui
s y appuient.
Parmi les monumens de Wren qui ont acquis de
la célébrité, et qu’on se plaît encore aujourd’hui à
vanter, comme une de ses productions les plus recommandables
du côté de l’art et du goût, quoique
l’oeuvre soit d’une médiocre importance, on doit
placer l’église de Saint-Etienne de Wallbrook.
Elle mérite effectivement d'être c ité e , à Londres
surtout, où , excepté l’église gothique de Westminster
et celle de Saint-Paulpresque toutes les
autres , quant a leur étendue, ne seroient ailleurs
que de simples chapelles. Celle de Saint-Etienne
se fait remarquer par l ’élégance de sa nef à deux
étages de colonnes et de pilastres d’ordre corinthien
qui portent une voûte. La nef est accompagnée
de bas-côtés. Il y a une croisée au centre.de
laquelle s’élève une petite coupole, dont la hauteur,
en y comprenant celle de la lanterne, est de
de 58 pieds. L ’élévation de la tour, y compris sa
balustrade, est de 70 pieds. Si l’on donne à cette
église la part d’éloges qui lui est due, il faut toutefois
faire remarquer l’admiration exagérée avec
laquelle d’Àrgenville, sur la foi sapfc doute du
petit-fils de Christophe Wr en, avance qu’il n y a
pas en Italie un édifice moderne, qu’on puisse lui
comparer pour le goût et les belles proportions.
Une autre église de Wren est citée -parmi les
plus remarquables de Londres , mais particulièrement
pour sa tour, qui est la plus haute de la ville.
Elle a plus de 200 pieds français, d’élévation, et
§e compose de plusieurs, étages diversement ornés,
d’architecture, qui sé terminent par une flèche
très-alongée, avec une grosse boule de bronze
portant un dragon de même métal do,ré, d’environ
to pieds de long.
Oa peut s’étonner qu’il n’ait point été fait de
recueil gravé des édifices que cet architecte, dans
le cours d’une longue v ie , paroit avoir construits
en divers lieux de i’Angleterr.e. On en est réduit
à de simples mentions de son biographe, mentions
insuffisantes pour faire juger de. la valeur
d’ouvrages qui , s’ils se sont conservés, auront dû
éprouver plus d’un changement.
Pour De rien omettre cependant de ce qui peut
donner quelque idée de la féconde activité de
U ren, nous citerons, parmi les nombreux tra.-
vaux qui remplirent sa carrière:
La douane du-port de Londres , ornée de; deux
ordres d architecture. L’inférieur est en colonnes
toscanes, 1 étage supérieur a des pilastres ioniques
qui supportent des frontons. Du côté du couchant
la façade, de jty pieds français de long, offre des
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galeries en arcades, soutenues par des colonnes.
La longueur totale de l ’édifice est de 180 pieds
français«
Le palais royal de Winchester. Il est bâti sur
la croupe d’une montagne extrêmement escarpée,
et n’a point de jardin. Le roi Charles II avoit
choisi cet emplacement pour la beauté de sa situation,
et il vouloit qu’il fût terminé dans l’espace
d’une année : s’il eût été achevé, il auroit
égalé les plus beaux palais de l’Europe. Du côié
de la v ille, il présente deux ailes de bâtiment séparées
par une vaste cour. Un grand escalier conduit
à une salle des gardes, qu’accompagnent
seize pièces , tant à droite qu’à gauche. Ou rejette
sur l ’incommodité de remplacement et sur la précipitation
de l’exécution le plus grand nombre
des défauts qu’on reproche à cet ensemble.
Le palais épiscopal de Winchester. On le regarde
comme une des meilleures productions de
Wren.
La Jhca.de de l*appartement du roi à Hamp-
toncourt. C’est celle qui donne sur le parterre et
sur la Tamise. Elle a 3oo pieds. L’entrée du
grand escalier qui conduit à l’appartement du roi,
est sous un portique d’environ 90 pieds de long,
formé par une colonnade ionique.
Le mausolée de la reine Marie à Westminster.
Il a été exécuté sur les dessins de Wren.
hôpital de Chelsea , fondé pour les invalides
de terre par Charles I I , est un des édifices de
Londres dont on admire également et la masse
extérieure et la distribution interne.
hôpital de Grecuwich, pour les invalides de
mer, fut commencé en 1699. Wren passe pour
avoir coopéré à sou exéoulion, et sans aucun
émolument. Ce ne fut pas le seul ouvrage où, mu
par le seul amour du bien public, il ait consacré
gratuitement ses veilles, et donné des preuves dé
son désintéressement.
Nul architecte peut-être ne porta jamais cette
qualité plus loin , et cependant il lui arriva une
fois d’encourir le soupçon du défaut opposé. Tandis
qu’il poussoit av ec la plus grande activité les
travaux do Saint-P aul, on répandit le bruit,
qu’ayant d.e, trop forts appointemens, il traînait
exprès l’ouvrage eu longueur. Un acte du parlement,
daté delà neuvième année du roi Guillaume,
ordonna, la suspension par moitié de ses honoraires
, jusqu’à ce que l’église fût achevée. Ces honoraires
toutefois ne se montaient qu’à deux cents
livres sterling par an. Wren supporta patiemment
celte injustice, et ne répondit à la calomnie que
par le silence.
Chargé d’innombrables travaux, occupé du
sojn de la construction des cinquante-une paroisses
deUondres, car il était non-seulement le premier,
mais peut-être, dans toute l’acception du
mot , le seul architecte de son pays, "Wren réu-
nissoit au talent et à la science de son ar t, le
caractère le plus propre au rôle qu’il étoit appelé
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à jour. La nature l’avoit doué d’une humeur égale,
et d’une tranquillité d’ame qu’aucune sorte d'événement
ne pouvoit altérer. Aussi éloit-il de ces
hommes que rien ne peut détourner de leur but,
dont rien ne peut ni déranger, ni retarder, ni
accélérer la marche. On croit voir que sa valeur
ne lut pas justement appréciée de son vivant 5 et
cela fut peut-être dû aussi, de sa p art, à une
modestie excessive, qui alloit jusqu’à la timidité.
C est une espèce de tort aux talens supérieurs, vis-
à-vis surtout du grand nombre, c’est-â-dire des
ignorans, que cette méfiance qu’ils ont d’eux-
memes, et ce dédain de la louange, qu’ils cher-
client plus a mériter qu’à, obtenir. La médiocrité
qm se vante, l’emportera toujours en renommée,
éphëmèré à la vérité, sur le vrai talent, qui ne
veut de la gloire qu’après le succès. ~
Soit indifférence pour les hommages contemporains
, soit amour de la retraite , soit caprice de
la fortune, qui aime à changer de favoris, W^ren
se survécut en quelque sorte à lui-même. Après
avoir employé plus de cinquante années dans les
travaux les plus pénibles et les plus honorables,
il passa les derniers temps de sa longue v ie , oublié
de son pays, et comme travaillant à s’oublier
lui-meme. On ignore les raisons qui lui firent ôter
en 17 18, à l’age de quatre-vingt-cinq ans, la charge
de directeur-général des bâtimens du roi. Il prit
le parti de se retirer à la campagne, où il ne s’occupa
plus que de la lecture.'
Wren avoit épousé Foy, fille du chevalier Thomas
Coghill de Bleckington , dans le comté d’Ox-
io rd , dont il eut un fils nommé Christophe,
comme lui. Devenu veuf peu de temps après, il
épousa en secondes noces Jeanne, fille de mylord
Fitz Williams. Il fut trois fois député au parlement.
Malgré les pronostics d’un tempérament délic
a t , et qui sembloit dans sa jeunesse disposé à
la consomption, un régime de vie sage et réglé
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l’a conduit jusqu’ à l’âge de quatre-vingt-on ze ans
Il fut enterré sous le dôme de Saint-Paul, privilège
exclusif qui lui fut accordé, ainsi qu’à sa
famille, pour honorer sa mémoire. Voici l’épitaphe
qu’on lit sur sa pierre sépulcrale , et q u i,
comme on va le voir, remplace bien honorablement
pour lui l e luxe d’un mausolée.-
Subtus cqnditur hujus ecclesia et urbis conditor
Christopkorus Wren. Qu i v ix it annos ultra nonaginta
Non s ib i, sed bono publico.
Lector s i monumentum requiris
Circumspice.
Ob iit a5 Feb. Anno i y iZ . Ætatis q 1 .
Wren ne fit rien imprimer lui-même de ses
ouvrages. Quelques-uns de ceux qu’il avoit composés
ont été publiés par d’autres. On cite de lui :
ï° . Une relation de l3origine et des progrès de la
manière dejaire passer les liqueurs dans les vaisseaux
du corps animal. Celle fusion ne diffère
point de l’injection qui se fait dans les abcès, les
ulcères, etc.
20. L e x naturoe de collisione corpoium.
ô°. Descriptio machinoe ad terendas lentes hy-
perbolicas.
4 °- Description de. F église cathédrale de Salis-
buiy.
Tous ces ouvrages ont été insérés dans les
Transactions philosophiques.
James Elme, architecte anglais^ a publié , en
1823, des mémoires sur la vie et les ouvrages de
sir Christophe W r en , 1 vol. in-40.
Une vaste collection de ses plans et dessins a
été achetée par le collège d’All-Souls, d’Oxford,
et déposée dans la bibliothèque, où-l’on voit aussi
son buste.
Son fils Christophe W^ren, membre du parlement,
mort en 1747, a recueilli sur sa famille des
détails bibliographiques, qui. ont été publiés en
1750, in-fol. avec des portraits.