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cette représentation des solives , en tant que commémoration
du système de la construction primitive
en bois, n’a lieu qu a la faveur de plus d une
licence.
Nous convenons que dans cet autre degré secondaire
de l’imitation d’une imitation , je veux
dire l’emprunt fait pour un meuble, des parties du
système propre à l’architecture, l’esprit de l ’ornement
a pu enchérir de licences et d’exceptions,
sur celles de son modèle, et à cet égard c’est
encore au goût qu’il appartient, d’évaluer ou de
régler le nombre et la mesure des libertés que l ’artiste
en ce genre se permettra. Mais qui ne v o it ,
d’après cet état de choses, combien il seroit ridicule
de faire ici intervenir la raison toute seule,
qui, par un étrange abus de raisonnement, au
lieu de conclure (peut-être trop sévèrement) des
règles de l’architecture réelle, le devoir de les
adopter dans de simples copies, fictives de cet
a r t , se feroit des licences accordées si l ’on veut
par l’usage à des fictions sans conséquence, un
argument pour les autoriser dans des monumens
sérieux, et par conséquent pour y détruire le système
imitatif, qui en fait le charme et un des
principaux mérites.
TRINGLE, s. f. On appelle le plus souvent
ainsi une verge de fer menue , ronde et longue ,
qui, encastrée et scellée en divers endroits , mais
communément au-dessous des corniches et en
avant des fenêtres, sert de conducteur aux anneaux
qui font mouvoir les rideaux, les tapisseries
et draperies , qui entrent dans les besoins
tant intérieurs qu’extérieurs des maisons et autres
bâtimens.
En menuiserie on a donné, par analogie, le
nom de tringle3 à une baguette éqnarrie, longue,
plate et étroite, qui sert quelquefois à remplir un
petit vide, d’autres fois à former, comme pièce de
"rapport, une portion de moulures et de profils
dans un panneau ou ailleurs.
Plus d’une sorte de marchands appellent aussi
tringle3 une pièce de bois longue et étroite, garnie
de clous, de crochets ou de chevilles , auxquelles
on suspend des marchandises.
TRINGLER, v. act. Tracer sur une pièce de
bois , une ligne droite avec un cordeau frotté de
pierre blanche ou rouge pour façonner cette
pièce.
TRIOMPHAL. Voyez A r c .
TROCHILE. Voyez Scotie.
TROMPE, s. f. On a donné à ce mot, dans la
construction, plus d’upe étymologie, dont aucune
ne paroît fort satisfaisante. La moins probable
est peut-être celle qu’on trouve dans certains
lexiques. La trompe est ainsi nommée, dit-on,
parce quelle trompe ceux qui la regardent, et J
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qui ne connoissent point l’artifice de son appareil.
On suppose avec plus de vraisemblance que ce
nom lui auroit été donné par une sorte d’analogie
de configuration , avec la forme d’une espèce de
conçue marine qu’on appelle trompe.
Quoi qu’il en'soit, la trompe, en architecture
est une portion de voûte tronquée, en saillie
dont les pierres posées en encorbellement, ou'ce
qu’on appèlle en porte-à-Jxiux, servent d’appui
à un corps de construction quelconque, qui semble
reposer sur le vide.
L’usage des trompes fut extrêmement commun,
en France , dans toutes les bâtisses du moyen âge,
et s’est perpétué jusqu’au dix-septième siècle,
où le goût de l’architecture antique devenu gé*.
néral , a relégué cette sorte de construction dans
la classe des caprices, à moins que quelque nécessité
n’en provoquât l’emploi, selon le besoin
de certaines localités.
On croit voir que celte forme de support dut
être d’un emploi naturel et fréquent dans les anciens
châteaux forts, pour l’établissement des guérites,
ou védètes qui, s’appliquant aux angles
des murs, ou aux tours des bastions, se trouvoient
comme suspendues en l’air. Les habitations particulières
participèrent naturellement des usages
des châteaux. La trompe avoit l’avantage d«
donner aux intérieurs, des pièces circulaires en
saillie, ce qui étoit un agrément pour la vue.
Elle offroit une économie de travail et de matériaux,
puisqu’elle dispensoit de donner aux piè-
j ces ainsi sur-ajoutées en dehors des bâtimens,
! et aux étages supérieurs, toute la hauteur des
constructions que leur position auroit exigées, et
surtout les frais de fondations. Dans les maisons
situées aux angles des rues , la trompe permettent
d’y établi r un corps avancé , q u i, porté en l’air,
ne prenoit aucun espace à la voie publique.
Ajoutons que„l’usage de bâtir les étages en surplomb,
les uns sur les autres, dans les maisons
construites en bois, telles qu’où en voit encore
dans beaucoup de villes , avoit accoutumé à chercher
ainsi dans le vide , une extension de local
dont on avait besoin. Or la trompe est précisément
en pierre, e t , dans la construction par appareil,
une imitation de cette pratique de surplomb
ou d’encorbellement dans la bâtisse en bois.
Il est beaucoup plus facile de dire ce que les
Grecs et les Romains ont fait en architecture et
en construction , d’après les ouvrages qui subsistent
encore d’eux, que de dire ce qu’ils n’ont pas
fait, vu le peu qui nous reste en tout genre, de
leurs ouvrages $ cependant je crois d’une part
qu’il est permis d’avancer, qu’il ne subsiste dans
les restes de leurs édifices, aucun exemple de
trompe9 et de l’autre qu’on peut présumer, da-
près l’esprit et le système de leur art de bâtir,
qu’ils n’usèrent point de ce procédé de support.
Effectivement c’est pendant le moyen âgë'etdans
les contrées du Nord , et sous le règne du goûi
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gothique, que nous voyons l’usage des trompes
extrêmement multiplié. La bâtisse gothique emprunta
beaucoup plus qu’on ne pense, et de ses
pratiques et de ses procédés , aux bâtisses'en bois
telles qu’elles se faisoient et se font encore aujourd’hui
dans le Nord. Rien de plus naturel et de
plus commun , dans l’emploi du b ois , que de
faire soutenir les corps avancés dont on a besoin ,
comme balcons , auvents, etc. , par des perches ,
qui au lieu de poser perpendiculairement sous
l’objet qu’elles supportent, se placent au ^contraire
dans un plan incliné , du bord de l objet
ea saillie au pied du mur. Cette pratique na pas
cessé encore d’être usuelle dans les balirnens rustiques.
Ce système de support en porte-à-laux est
en petit celui des consoles, des modifions,« des
culs-de-lampes. Eh bien ! la trompe a trouvé là
son modèle. L’art du trait dans la construction,
s’est emparé de celte imitation , et a cherché le
ipoyen de lui donner la plus grande solidité.
Nous voyons encore en France, dans le seizième
siècle, les architectes tirer gloire de leur
liabilelé à construire des trompes. Philibert de
bonne se fit de la réputarion en ce genre : on
cite'’encore aujourd’h ui, et l’on admire à Lyon
me de la Juiverie, la construction en pierre de
deux trompes9 dont là coupe est d’un trait savant,
et fut pohr le temps d’une exécution hardie, Deur
saillie est considérable eu égard à la place qu’elles
occupent. L’une est biaise, rampante, sur-bais-
sée et ronde par devant (ou convexe), et elle a
en saillie les trois quarts de sa circonférence.
I/autre à l’angle opposé du même bâtiment est
également convexe , et son porle-a-faux n est pas
moins saillant. Chacune de ces deux trompes supporte
un cabinet en corps avancé sur une galerie
suspendue, formée d’arcades et de piédroits ornés
d’un ordre ionique qui sert de communication
aux deux cabinets. Nous lisons qu’il y avoit au
château d’Anet une trompe, qui fut démontée_de
l’endroit où Philibert de Lorme l’avoit bâtie,
pour servir de cabinet au roi Henri II, et remontée
en une autre place , avec beaucoup de soin par
Gérard V y e t, architecte du duc de Vendôme.
On trouve citée par d’Aviler, une trompe- d encoignure
, construite au bout du pont de pierre
sur la Saône à L yon, ouvrage d’un architecte
nommé Desargues, qui fit preuve dans cette construction
d’uue grande capacité.
L’usage des trompes a diminué sensiblement
et progressivement depuis deux siècles. Presque
toutes celles qui existaient ont disparu , soit par
l’effet de l’agrandissement des villes, des rues et
des habitations, soit par la démolition des anciennes
constructions. On auroit quelque peine a
en citer de modernes, qui fussent le résultat du
goût ou même du caprice. Si l’on en trouve quelqu’une
due à quelqu’enlreprise récente, il faut
que quelque raison locale en ait nécessité l’emploi.
Telle est ea effet celle qui fut construite
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vers le milieu du dernier siècle, au chevet de la
grande église, de Saint-Sulpice , à laquelle on
voulut-ajouler la chapelle circulaire de la Sainte-
Vierge, en prolongement du corps déjà terminé
de l ’édifice. Il est visible que pour ne pas empiéter
sur la voie publique, l’architecte imagina
de faire porter la saillie extérieure de sa rotonde,
sur une grande trompe concave en manière de
coquille.
On donne divers noms aux trompes selon les
variétés de forme ou de détail de construction
et d’emplacement qui les distinguent. Ainsi on
nomme :
T rompe dans d’an g l e , celle qui occupe un
angle rentrant. Philibert de Lorme en avoit
fait une à Paris dont il a donné la figure dans son
traité d’Architecture, liv. IV, ch. 2
! T rompe de Montpellier, est celle qui, dans
! un angle rentrant, est construite en tour ronde,
et diffère des autres , par cela qu’elle a de hauteur
deux fois la largeur de son ceinlre. Il paroît
que ce nom lui est venu de deux trompes ainsi
construites dans la ville de Montpellier.
T rompe en niche. Trompe concave en manière
de. coquille, et qui n’est pas réglée par son profil.
Ou la nommé aussi trompe sphérique.
T rompe en tour ronde. C’est celle dont le plan
sur une ligne droite est un demi-cercie, et qui
est faite en manière d’éventail.
T rompe p l a t e , est celle qui, dans un angle
rentrant, forme par son plan un carré ou un trapèze.
T rompe a pans. Celle qui est dans un angle
rentrant, et dont le plan est une partie de polygone.
T rompe rempante. Celle dont la naissance est
une ligne inclinée.
T rompe réglée. Trompe qui est droite par son
profil.
T rompe sur le coin. C’est une trompe qui porte
l’encoignure d’un bâtiment, pour faire un pan
coupé au rez-de-chaussée.
TROMPILLON, s. m. Petite trompe. Voyez
T rompe.
T rohpillon de voûte. Pierre ronde qui sert de
coussinet aux voussoirs du cul-de-lampe d’une
niche, et à porter les premières retombées d’une 1 voûte. Il y a de ces trompillons sous les quartiers