
méat en masse, en dépense et en ostentation , •
comme les sépultures royales des hypogées de
Thèbes l’avoient emporté, sous les mêmes rapports
de.luxe et de grandeur, sur les souterrains
destinés aux sépultures communes qu’on voit dans
la Tliébaïde.
Des •pyramides de la Basse-Egypte ou de Memphis.
Nous donnons ce nom à ce qu’on appelle ordinairement
les pyramides d*Egypte _, quoiqu’il ne
s’en trouve point dans la Haute-Egypte ( celles
quon a trouvées depuis peu près de Meroé , appartenant
à l ’Ethiopie ) , et nous indiquerons encore
sous celte dénomination générale, toutes celles
que les voyageurs modernes distinguent par les
noms de pyramides de Gizée, d’Aboukir, de Sac-
cara et d’Achour. Nous l’avons déjà d it, tous ces
monumens paroissent avoir formé, dans un espace
d’à peu près trois lieues, la Nécropolis y ou la
ville des morts de Memphis, cette ville qui ne
subsiste plus aujourd’hui que dans les restes de ce
que nous appellerions son cimetière. On n’est pas
même trop d’accord sur l’emplacement qu’elle
occupa.
Il ne sauroit entrer dans le plan de cet article
de donner des notions sur les cinquante pyramides
plus ou moins conservées que l’on compte
encore dans la Basse-Egypte , ni de rechercher la
date de leur construction. L’incertitude qui règne
à cet égard chez les écrivains, même de l’antiquité
, semble être une preuve de plus de leur
ancienneté. Quelle que soit l ’époque de leur construction
, on peut croire qu’il n’existe point de
monumens plus antiques. De ce qu’Homère n’a
point parlé des pyramides, quelques-uns ont
voulu conclure de-là qu’elles n’existoient point
encore de son temps. Mais cette conséquence ,
qui ne reposeroit que sur un fait négatif, a même
conlr’elle beaucoup d’autres considérations : car
il est à peu près certain qu’au temps d’Homère il
y avoit eu très-peu de communications entre la
Grèce et l’Egypte , et il,paroît que ce qu’on peut
trouver de fort anciens rapprochemens entre les
deux pays , avoit eu lieu par l’intermédiaire des
Phéniciens. Le siècle d’Homère n’étoitpas encore
celui où la curiosité des voyageurs , enhardie par
les progrès d’une civilisation réciproque entre les
peuples, devoit apporter à l’histoire les matériaux
dont elle se compose.
On ne retrouve plus aujourd’hui la totalité des
pyramides dont les anciens auteurs ont fait mention.
Celles qui, suivant Hérodote, étoient dans
le lac Moeris , n’existent plus; il n’y a plus de
traces de celles q ui, selon Hérodote, Diodore,
Pline et d’autres, avoient appartenu au labyrinthe
, fameuse construction dont il n’est resté que
le nom. D’autre p a r t, les voyageurs modernes
ont vu et décrit les vestiges d’un grand nombre
de pyramides y qui n’ont pas même été indiquées
par les Anciens.
Il paroît qu’une certaine période vit élever la
plupart de ces monumens. Du moins est-il certain
que tous les rois auxquels on .en attribue la
construction , ont régné immédiatement l’un
après l’autre, dans un espace de cent cinquante
à deux cents ans. Mais on ne sauroit déterminer
avec exactitude par quel roi et à quelle époque cha-
qce pyramide* été bâtie, les anciens auteurs s’accordant
très-peu sur ce point. Il n’est donc point
possible d’établir en ce genre ce que l ’on aime-
j roit à y étudier, c ’est-à-dire, les pas et les progrès
de l ’art de bâtir, et une sorte de chronologie
qui indiquât soit les degrés de l’industrie, soit
l ceux de l’ambition des princes qui la mirent en
oeuvre.
Faute de cette échelle de proportion, on est
contraint de citer, comme les premiers ouvrages,
ceux qui l’emportent sur tous les autres pai’ la
masse-, par la grandeur linéaire et le luxe dès
matériaux. Ainsi, en tête de toutes ces constructions,
cite-t-on ordinairement les trois pyramides
de G hizé, qu’on distingue par les noms des rois
Cheops y Chephren et Mycerinus.
La plus grande et la plus célèbre, celle de
Cheops, fut élevée sur le plateau d’un rocher, auquel
Hérodote a donné cent pieds d’élévation,
quoique Norden depuis ne lui en ait donné que
soixante; mais.les changemens qui arrivent dans
le niveau de ces terrains, suffisent pour expliquer
ces différences de mesures. On ne sauroit, dit un
voyageur moderne, choisir un emplacement plus
avantageux pour un monument de cette nature.
La montagne libyque, plus élevée, au nord, à
une lieue de distance, s’abaisse ic i tonl-à-coup.
Le plateau du rocher s’avancè comme un isthme
vers la plaine, et procure à la pyramide un exhaussement,
qui ajoute beaucoup à l’idée que, de loin,
on se forme de sa hauteur.
Selon Hérodote, les pierres qui avoient servi à
la construction de cette pyramide _, avoient été
tirées des carrières des moniâgnes orientales, aux
frontières de l’Arabie. Cela est absolument contraire
aux observations des voyageurs modernes.
On aperçoit (dit le général Grobert ) à l ’endroit
où les saillies de la montagne sont plus prononcées
, de grandes Carrières taillées verticalement,
et dont on a évidemment extrait la pierre
qui a servi à la construction de to u t e s les pyra~
mides de Ghizé. La qualité blanche et friable de
la pierre de ces carrières , est certainement .semblable
à celle de la pyramide de C h e o p s . Peut-
être, pour accorder la notion d’Hérodote avec
celle des modernes observateurs, fau'l-il supposer
que l’historien grec a jugé des pierres de l’intérieur
de la masse, par celles durévêtissement, qui
effectivement sont une espèce d,é marbre blânc-
mat, qu’on trouve dans les carrières de l’Arabie.
On a donné des »esurès fort différentes soit de
la largeur de la hase de cette p y ram id e soit de
sa hauteur réelle, soit des rapports de la baseavec
l'élévation totale. Les dernières découvertes ont
fixé toutes les incertitudes à cet égard. Il falloit,
en effet, avant tout, déblayer la ligne inférieure
de celte base, des amas de sable et de décombres,
qui ont élevé «itour d'elle le terrain de plusieurs
pieds. Celte opération a fait découvrir trois assises
enterrées de la pyramide 9 au-dessous desquelles
on a reconnu le rocher caché ën cet endroit
plutôt par-les décombres, que par l’agglomération
du sable. La mesure prise alors, d’anale
en angle, a donné 728 pieds de largeur'à .sa--
base. Four avoir là hauteur perpendiculaire de
toute la pyramide, le voyageur déjà c ité , a eu
recours au procédé le plus pénible si l’on veut,
mais le plus simple et le plus iufailliblé. l ia mesuré
la hauteur pàrtielle de chaque assise, ou de
'chacun des degrés par lesquels on peut arriver à
son sommet, et il a formé une tablé dont le dé^
tail a encore l ’avantage de faire connoître les variétés
en hauteur, des pierres de chaque assise:
l’addition totale de toutes ces mesures a donné,
pour hauteur de la pyramide dans l’état où elle
se trouve aujourd’hui, 447 pifîds. Cependant il est
bon d’observer que lé sommet, d’après des observations
qui ont été faites sur la dégradation progressive
qu’il a éproiiv-èe, devant toujours aller
en diminuant, on doit lui ajouter deux ou trois
assises, qui portent la hauteur totale au moins à
460 pfeds^.
Nous aurons à parler encore de cette pyramide,
de ses matériaux, de sa construction et
du revêtement dont elle à été dépouillée.
La pyramide de Chephren f la plus grande
après celle de Cliëops-, a encore son sommet garni
du revêtement dont tout le reste a été dépouillé.
Les pierres avec; lesquelles elle est construite ,sont
énormes : il en est qui ont' vingt pieds de longueur.
La partie inférieure jusqu’à la première
assise, au dire d’Hérodote, étoit en pierres d’Ethiopie
de diverses couleurs, il paroît elï’eciive-
nic'ntqu’on y avoit pratiqué , vers la base, quelques
assises carrées, en guise de socle. La conservation
de la portion de revêtement qui 'est au
sommet, fait voir qu’à l’exception de ces gradins
du socle, le tout étoit lisse , et avoit reçu un enduit
sur lequel on avoit appliqué les dallés de
marbre. Gu voitencore des restes ce cet enduit. Il
est formé de gypse, d’uu peu de sable et de quelques
menus cailloux. Il se conserve assez blanc;
ou 1 aperçoit de loin, et lorsque le soleil l’éclaire ,
il réfléchit tant soit peu la lumière. Cette illusion
à fait dire à quelques auteurs, que le haut de celte
pyramide étoit d’uu granit très-lin. Il est certain
que lu pierre dont est bâtie la pyramide de Che-
puven, est la même que celle du noyau des autres
Pyramides' de Ghizé.
v Pyramide de Chephren a 6ô5 pieds de large
* sa base i} et sa haqteur est de 398.
La troisième pyramide , celle qu'on appelle de
Nÿcerinus, a 280 pieds de base apparente, et i(ia
d’élévation. On ne pense pas qu’elle soit de beaucoup
enterrée. Cette mesure ne s’éloigne pas de
celle des trois plèlhres qu’Hérodote lui a donnés ,
et la mesure de Pococke en diffère très-peu. L’enlèvement
de son revêtement date de temps assez
modernes. On trouve encore dispersés ou entassés
près de sa base de beaux morceaux de granit
d’Eléphanline , et dans les environs du monument,
d’autres débris, à la vérité plus rares , de
marbre noirâtre.
Tous les auteurs attestent que celle pyramide y
construite par un roi qui, dans la durée dé son
règne, chercha par sa justice et sa modération,
a faire oublier la tyrannie de ses-prédécesseurs,
étoit moindre dans ses dimensions , mais qu’elle
étoit remarquable par la beauté des pierres d’Ethiopie
, qui en formoiènt lé revêtement. Pline
en a dit : Tertia minorproedictis 9 sed multo spec-
tatior oethiopicis lapidibus dssurgit.
Nous né nous proposons point d’entrer dans
l’énumération des autres pyramides de la Hautc-
Egypte, encore moins d’en faire connoître les variétés
de forme ou de construction, et les mesures.
C’est la matière d’un, grand ouvrage qui
n’a point encore été entrepris. Depuis le temps
où a paru, dans ce Dictionnaire , l’article de l’Architecture
égyptienne, où nous' avons recueilli
déjà quelques notions sur les pyramides} il n’a
guère paru que des détails incohérens à cet égard.
Nous sommes donc toujours obligés de nous restreindre
à ce qu’on doit appeler des connaissances
générales.
11 suffira aux notions annoncées par le titre de
ce paragraphe , de dire , qu’il en fut des pyramides
comme de tous les autres genres d’édifices. Si
leur forme suivit constamment le type donné par
la raison de la solidité et par l ’usage, il régna
beaucoup de variétés dans leurs mesures et dans
leur bâtisse. Ou n’y employa point toujours la
pierre, Hérodote nous parle d’une pyramide bâtie
par Asychis, successeur de Mycerinus. Ce
prince, dit-il, voulant surpasser tous les rois qui
avoient régné en Egypte avant lu i , laissa pour
monument une pyramide de briques , avec cette
inscription gravée sur une pierre : Ne me méprise
pas en me comparant aux pyramides de
pierrés. Je suis autant au-dessus d’elles 3 que Jupiter
est au-dessus des autres dieux y car j ai été
bâtie des briques fa ite s du limon tiré du fond dit
lac.Q
uelques-uns ont pensé que la grande pyramide
de S à k a ra , qui est construite en grandes briques,
peut bien être celle d’Asychis,
Du reste , il est constant par plus d’un de ces
monumens encore aujourd’hui existans, qu’on
construisit des pyramidesy c’est-à-dire , au moins
leurs paremens extérieurs, par plusieurs rangs de
briques crues,
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