spectateur désespère d’en pouvoir comprendre la
disposition. C’est par l’entrée qui regarde l’ouest
qu’il faut pénétrer dans cet ensemble de ruines,
pour acquérir une idée de son plan et de sa distribution.
Il faut se représenter une première cour
décorée sur les côtés cîe longues galeries, et renfermant
dans-son enceinte des temples et des habitations.
Au milieu est une avenue de colonnes
qui ont jusqu’à soixante-dix pieds de haut. La
plupart d’enlr’elles sont écroulées, et étendent au
loin les tambours de leurs assises encore rangés
dans leur ordre primitif. Une seule reste debout
comme témoin d’une magnificence qu’on ne peut
plus que deviner. On passe de pylône en pylône
et de salle en salle, de galeries en galeries. Une
de ces galeries est formée de piliers à statues adossées,
et elle renferme le plus grand des obélisques
existant encore aujourd’hui en Egypte,
C’est surtout dans une notice abrégée, qu’il
faut désespérer de donner une idée d’un tel amas
deconstructions, et tellement détruites, qu’il pa-
roîtimpossible d’en reproduire une restitution quelconque.
Comment d’ailleurs saisir l’image d’édifices
qui probablement ne furent jamais ni imaginés
ni realises sur un plan formé d’avance, qui
ne furent qu une accumulation successive de masses
uniformes, toujours répétées, ouvrages de plusieurs
siècles, et où des besoins, des usages, et
des institutions que nous ne pouvons plus ni comprendre
ni deviner, faisoient ajouter dans des directions
différentes, avec des dimensions toutes
diverses , des corps de construction à d’autres
corps de construction , des galeries à des galeries,
desportiques à des portiques?
Il resteroit à faire quelque mention des sculptures
de Thèbes, des tombeaux des rois, des
vastes hypogées creusées à toutes sortes de profondeurs.
Mais la description de tous ces travaux
souterrains échappe encore davantage à l’analyse
qu on voudroit en faire, et fastidieuse pour le
lecteur , elle ne seroit d’aucun intérêt pour l’art
d’aucune utilité à l’artiste.
THEORIE, s. f. L’idée de théorie, opposée à
celle de pratique {voyez ce mot), en tant que
1 action morale ou spirituelle qui raisonne et combine
, est différente de faction corporelle ou manuelle,
qui façonne et exécute, comporte aussi
plus d un degré , selon le plus ou moins d’élévation
des points de vue, auxquels on applique les notions
dont 1 enseignement se compose.
A 1 article Pratique, nous avons reconnu, que
surtout à l’égard de l’architecture, on devoit diviser
en deux parties ce qui est du ressort de
1 exécution , 1 une que l’on a appelée pratique
savante , et l’autre, que l’on a désignée sous-le
nota de pratique ouvrière.
Ici, nous croyons, qu’en donnant du mot
théorie, l’idée sons laquelle on l’entend le plus
ordinairement, cest-à-dire celle qui comprend
! cet ensemble des connoissances d’un art, qu’ I
acquiert par l’étude ou que l’on reçoit de Pensei11
gnement, on peut reconnût ire trois degrés d’étudo
ou d’instruction théorique.
Nous croyons qu’on doit distinguer la théorie
des faits et des exemples , qu’on appellera théorie 1
pratique, la théorie des règles et des préceptes I
qu’on appellera théorie didactique , et la théorie i
des principes ou des raisons, sur lesquelles reposent
les règles, et qu’on appellera théorie métaphv.
sique. ■ .»».y:" ^ I
En appliquant cette division à l’architecture
on comprend , quant au premier genre de théorie1 \
qu’il est possible d’arriver par une instruction
bornée, à refaire ce qui a déjà été fait. On peut
enseigner aux élèves à se régler sur les inventions
et les ouvrages des prédécesseurs , à prendre pour
modèle tels ou tels maîtres, tels ou tels monuuiens
à regarder comme objets constans d’imitation, les
formes , les compositions , Jes décorations d’ensemble
ou de détail , formant la manière, le style et le
goût de ceux à la suite desquels on se place, sans
songer à se demander, en vertu de quoi ils ont i
procédé ainsi. Cette sorte de théorie pratique ou
routinière, n’a que trop souvent régné en plus i
d’un pays, et dans plus d’un siècle, et si on lui
a dû, quelquefois, selon le mérite et le talent de
certains grands hommes, chefs d’écoles célèbres,
des imitateurs ou des continuateurs plus ou moins
heureux de leur manière, il ne s’est d’ailleurs, et
dans d’autres temps, rencontré que trop de ces
copistes serviles, qui ont perpétué les travers et
les vices de ceux qui les avoient mis en honneur.
La théorie routinière dont on parle, celle qui
n’enseigne que par les faits et les exemples , est
d autant plus facile, qu’elle n’exigu aucune leçon
orale, et que le seul ascendant de l’exemple du
maître, a souvent plus de force et d’entraînement,
que toutes les doctrines des livres et des
traités.
^ Après cette sorte de théorie , vient celle des
règles et des préceptes, ou la théorie didactique \
q.ui, soit par l’étude particulière, soit par les
leçons du maître ou de l’école, apprend à distinguer
dans les ouvrages de l’art, certains points
communs, où leurs auteurs se sont rencontrés, enseigne
à faire des observations sur les effets de ces
ouvrages , à les comparer entr’eux, à interrogerI
sur la préférence qu ils méritent, les suffrages des
temps passes, et cet assentiment d’une opinioni
■ générale , la plus propre à servir de guide au jugement
particulier. Ce genre de théorie est Je proprei
d un grand nombre de traités, faits par les plu*
habiles architectes. Après avoir décomposé toutes
les parties qu’embrasse l’architecture, et après
les avoir soumises, dans de nombreux parallèles ,,
aux diverses autorités des exemples, ils ont cherché
à établir les meilleurs rapports entre les formes,
les proportions les mieux appropriées au caractère
spécial de chaque sorte d’ordonnance, les divisions
les plus amies entr’elles, les plus conformes
' la faculté visuelle, les détails d’ornemens , sur
lesquels se sont accordés les artistes les plus accrédités.
De ce concert soit d’ouvrages, soit d’observations
sur les ouvrages , soit d’approbations successives
données aux uns et aux autres, seront nées
les règles, qui, dans l’antiquité même, parvinrent
à fixer l’art, à réduire en système tous ses
procédés. Ces règles , et les préceptes qui en dérivent,
ont été la matière de toutes les théories
didactiques des Modernes, et de l’enseignement
journalier des écoles. '
Cependant il est facile de voir, qu’an-dessus de
cette théorie , il doit y avoir un degré d’enseignement
supérieur, une critique d’une nature beaucoup
plus subtile. C’est, nou celle qui donne les
règles, mais celle qui remonte aux sources d’où
les règles émanent. C’est, non,celle qui rédige
les lois, mais celle qui en scrute et en pénètre
l’esprit. C’est, non celle qui puise ses principes
dans les ouvrages, mais celle qui donne pour principes
aux ouvrages , les lois même de notre nature,
les causes des impressions que nous éprouvons,
les ressorts par lesquels l’art nous touche, nous
émeut et nous plaît. Cette théorie développe les
raisons qui servent de base aux règles. Elle re-
connoît certaines beautés comme applicables à
toutes les architectures j mais loin d’établir l’égalité
entr’elles, ainsi que quelques esprits vou-
droient se le persuader, elle nous conduit à recon-
noître, qu’une seule mérite le nom d’i/rtf.C’eft celle
qui satisfaisant à tous les besoins, et remplissant
toutes les conditions d’utilité, prête au génie les
plus nombreuses ressources, parce qu’elle fut le
produit d’un modèle primitif, qui réunit à la fois
le simple-et le composé, l’unité et la variété j
parce que seule elle parvint à s’approprier un véritable
système imitatif, lequel consiste, beaucoup
.moins qu’on ne pense, dans la transposition
en pierre, des formes delà charpente , et du
bois long-temps employé parla construction, mais
daris l’assimilation , que d’heureuses combinaisons
parvinrent affaire des lois de proportions données
par les oeuvres de la nature , aux ouvrages de la
main des hommes.
Ces trois degrés de théorie ont fait le sujet d’un
si grand nombre d’articles de ce Dictionnaire,
que nous ne saurions placer ici les renvois aux
mots où ils sont traités. Nous osons nous flatter à
l’égard du dernier genre de théorie, qu’on n’en
trouveroit, nulle part ailleurs, ni autant de dé-
veloppemeus, ni d’aussi complets.
THERMES, s. m. pl., en latin tkennee, du
grec Sep/tcu), étuves , bains chauds.
Ici, comme en beaucoup d’autres cas, l’édifice
prit et retint le nom de l’usage auquel il servoit,
etici encore il arriva, que beaucoup d’autres emplois
se trouvant ajoutés au premier emploi, le
uue fois donné à l’édifice, n’exprima plus
qu’une seule partie de sa destination. Ainsi comme
on l’a déjà dit au mot B a i n , le bâtiment qui
sembloit, dans son acception simple , ne signifier
que bains chauds, non-seulement étoit destiné
aussi aux bains froids, mais renfermoil encore une
multitude d’autres emplois, qui faisoient de ces
lieux, une sorte de point de réunion d’un grand
nombre d’établissemens d’utilité et de plaisir, lesquels
avoient aussi ailleurs des locaux séparés, et
des noms particuliers , tels que Palestres, Gymnases
, Sphoeristères, Exèdres , JCisies, Ephé-
bées , etc. Chacun de ces édifices trouvant dans
ce Dictionnaire des articles qui en font connoîtie
l’ensemble elles détails, nous n’alongerons point
de nouvelles notions sur leur compte, le présent
article.
Au mot B a in ( voyez ce mot), nous avons
traité,, avec une très-grande étendue , de tout ce
qui, soit dans les bains Ordinaires, soit dans les
thermes,ou élablissemens de bains publics, a voit
rapport à leur principal usage, ainsi que des différentes
pièces appropriées à toutes les pratiques
que le régime sanitaire, ou les besoins du climat,
avoient rendues nécessaires. Nous avons parcouru
tous les moyens employés pour l’arrivée, la distribution
des eaux, les procédés mis en oeuvre,
pour en tempérer l’influence, au gré de chacun.
Nous aidant à cet égard des monumens de l’antiquité
, comme des renseignemens des écrivain*
modernes , nous avons pris soin de renfermer dans
cet article, tout ce qui nous a paru le plus détaillé,
et le mieux constaté en ce genre , sur ce
qui regarde les bains publics des Anciens,
considérés sous le point de vue des usages qui
avoient fait élever d’aussi grandes constructions.
Si nous nous sommes permis quelques descriptions
de certaines de leurs parties, c’est que beaucoup
de ces usages dépendent tellement de leur localité,
qu’on ne sauroit les faire connoître sans y
joindre les indications des lieux mêmes. Du reste,
nous terminâmes l’article des bains antiques, en
renvoyant au mot T hermes , les- notions; plus particulièrement
propres de, l’architecture, et qui
font prendre une idée de l’importance, et de
la magnificence que les Romains donnèrent à ces
monumens.
Si on en croit les relatipns des voyageurs, et les
restes nombreux de constructions, qu’on désigne
par le nom de thermes, et qui en offrent des caractères
apparens, les Romains, partout où leur
domination s’étendit, auroienl singulièrement
multiplié cette espèce de monument. Des recherches
exactes à cet égard deviendroient la matière
d’un très-grand ouvrage, et serviroient assez peu
à remplir l’objet que nous nous proposons ici,
savoir, de donner une idée abrégée de ces entreprises
de l’art de bâtir, et de l’immense étendue
à laquelle le luxe de Rome les porta.
Ce luxe paroi t avoir daté du règne des empereurs.
Victor et Rufus comptèrent jusqu’à 8ûO