
tôt à effacer les angles des faces de ces polygones
par une ligne courbe. Sans doute celle dont on
dut faire d’abord usage, fut la ligne circulaire,
comme étant la plus simple et par conséquent la
plus facile à tracer. Très-certainement on savoit
déjà non-seulement en faire le tracé, mais encore
l’application pratique, à beaucoup de parties
courbes , et d’ouvrageS nécessairement circulaires,
comme des puits, des tours, e tc ., dont
l ’usage aura très-probablemeût précédé la construction
des voûtes.
Il ne s’agissoit pour former ce qu’on appelle
une voûte } que de placer verticalement, dans une
construction cintrée, destinée à s’élever en l’a ir ,
les pierres que l’on posoit horizontalement, dans
les assises également horizontales des tours
ou des puits. Mais ce transport de façon et d emp
lo i, qui paroît aujourd’hui si facile en imagination,
ne le fut peut-être pas autant alors. On
voit effectivement que, dans le dernier cas , les
pierres sont soutenues sur leurs lits , dans toute
leur étendue , tandis que dans une voûte, dont le
cintre est un demi-cercle, il n’y a que les deux premières
pierres, celles d’en bas, qui paraissent réellement
poser , lorsque toutes les autres ne se peuvent
soutenir que par leurs joints , c’est-à-dire par
la forme de coin qu’on leur donne. Ces joints , qui
sont plus ou moins obliques, doivent formej avec
la surface courbe de la voûte, des angles égaux
et droits, afin de procurer à chaque pierre une
résistance égale, et de plus une espèce de renvoi
régulier des efforts d’une pierre à l’autre, depuis
celle qui forme la cle f, jusqu’à celle qui pose sur
les piédroits.
On a vu dans la première partie de cet article,
que les plus anciennes voûtes , non qui aient été
faites jadis, mais qui existent aujourd’h ui, sont
les portes étrusques de Volterra, et les couvertures
cintrées de la Cloaca maxima y à Rome,
construite sous le règne du premier Tarquin, 58o ans avant l’ère vulgaire. Son embouchure,
du côté du Tib re , est d’environ quatorze pieds
en largeur. Elle est couverte par une triple
voûte y composée de trois rangs de voussoirs concentriques,
dont les joints sont en liaison les uns
sur les autres. C’est à.cette disposition qu’on doit
attribuer la durée et la grande solidité de ces
constructions , qui ont excité l’admiration de tous
les siècles.
Après avoir donné une idée de la formation
des voûtes y nous allons indiquer celles qui sont
le plus en usage.
On distingue ordinairement les voûtes par leurs
faces apparentes, et d’après cette distinction,
elles peuvent se Téduire à deux espèces, celles
qui consistent en surfaces planes, et celles qui
sont en surfaces courbes. On peut comprendre
toutes les voûtes possibles sous les deux dénomination
de voûtes plates,et voûtes cintrées, ou dont
la surface intérieure e st courbe.
DES VOUTES PLATES.
Le principe général de l’art dé l’appareil, et
de la coupe des pierres, exige que dans les murs,
comme dans les voûtes y les joints des pierres qui
se touchent, fassent des angles égaux, ou des
angles droits, avec les surfaces apparentes qu’elles
forment. Gomme dans 1 es voûtes plates, il n’y a que
des joints perpendiculaires à leur surface, qui
puissent former avec elle des angles égaux 3 il en
résulte, que toutes les voûtes plates horizontales,
devroient avoir leurs joints d’à-plomb. Mais cette
disposition ne pouvant pas servir à soutenir des
pierres, qui ne doivent avoir d’autre appui que
leurs joints, on a été obligé de les incliner, en
les tirant d’un même point, afin de donner aux
pierres la forme du coin, pour qu’elles puissent se
soutenir.
Comme cet appareil a le désavantage de former
des angles inégaux avec la surface inférieure, il
en résulte que ces pierres, auxquelles on donne
le nom de claveauxy n’ont pas une résistance
égale; que leurs efforts ne se correspondent pas,
et qu’elles poussent toutes à faux les unes des
autres, comme on peut s’en convaincre, si on
tire des perpendiculaires de l’extrémité de leurs
joints. On verra qu’une pareille voûte ne pourroit
pas se soutenir, quelle que fût l’épaisseur des piédroits,
si le frottement causé par la rudesse et
l’inégalité des surfaces , ne les empêchoit pas
d’agir librement, et si le mortier et les fers qu’on
emploie à leur construction cessoient de les entretenir
ensemble, avec une force supérieure à ces
efforts. On pourroit s’assurer de cet effet, si l’on
vouloit faire un modèle d’une semblable plate-
bande en marbre poli.
Pour bien sentir le défaut de l’appareil dont on
vient de parler, il faut tracer du centre, où tendent
les joints des claveaux , un arc tangent à la
ligne du dessous de la voûte plate, et prolonger
les joints jusqu’à la rencontre de l’arc. Il sera facile
de voir , par celte opération , qu’une voûte plate
peut être considérée comme un arc , ddnt on a supprimé
les parties inférieures; mais cette suppression
de parties aussi essentielles, ne peut produire
qu’une construction foible et défectueuse.
Lorsqu’on veut construire d0% voûtes plates pour
des architraves, des plates-bandes ou des linteaux
de grandes portes, il est nécessaire, pour éviter
ce défaut, de ne prolonger la coupe des claveaux,
que jusqu’à une certaine distance, et de faire le
surplus par des lignes à plomb.
Plusieurs architectes ont employé un moyen
qui produit le même effet, et qui est devenu
même un objet de décoration, comme on peut le
voir dans une certaine porte de Vignole, appareillée
d’une manière qui réunit la beauté à la
solidité. Ce moyen n’est autre , que celui des
claveaux à crossettes, dont les compartimens
augmentant jusqu’à celui qui fait la c le f, forment
en bossages, ufi dessin qui n’est pas sans agrément;
mais ce genre d’appareil ne peut guère
être employé que pour des portes, ou des vides
pratiqués dans l ’épaisseur des murs. • • • 1
Il est un moyen, qu’on doit appeler artificiel,
d’employer l’appareil en claveaux pour les plates-
bandes et les architraves, c’est celui des tirans de
1er.
Ainsi les plates-bandes de la colonnade du
Louvre, sont composées sur la face, dun double
rang de claveaux, placés les uns au-dessus des
autres en liaison, et sont entretenues par deux
chaînes ou tiràns de ferj, arretés a des ancres qui
forment le prolongement de l’axe des colonnes.
Les claveaux sont accrochés les uns aux autres par
des goujons en forme de Z qui les empecheot de
glisser. Tous ces fers forment une espece d’armature
qui contient les plates-bandes, de maniéré a
ce quelles ne peuvent agir d’aucune façon, à
cause du tirant intermédiaire qui empêche la
plate-bande supérieure de s’écarter. On ne peut
guère employer c.e procédé avec succès, que pour
des architraves et des plates-bandes auxquelles
on peut donner une épaisseur égale au quart, ou
au moins au cinquième de leur portée. Il est possible
encore d’en user, pour former des plafonds
de peu d’étendue, renfermés entre des architraves.
.
XJ a moyen à peu près semblable a été mis en
oeuvre, dans les architraves du second ordre du
portail de Saint-Sulpice. A cette construction,
pour empêcher les claveaux de la plate-bande
inférieure de glisser, on’ a percé dans ceux de
droite et de gauche, jusqu’à la cle f, des trous
dans lesquels on a fait entrer des barres de fe r ,
grosses de deux pouces , soutenues dans leur longueur
, de deux claveaux en deux claveaux , par
des étriers de fer accrochés au tirant horizontal
qui va de l’axe d’une colonne à l’axe d’une autre.
La cle f se trouvé soutenue par un bout de barre â
talon, qui se raccorde avec les deux autres. Au-
dessus de cette première plate-bande, il s’en
trouve une seconde un peu plus haute, et comprenant
la hauteur de la frise. Elle est renfermée
entre deux chaînes de fer, dont une placée au-
dessus de l’extrados, est arrêtée anx axes des
colonnes. Pour donner à cette chaîne nne consistance
capable de contenir les efforts _ des deux
plates-bandes, on a formé nn arc au-dessus, avec
une forte barre de"fer courbée, dont les bouts
sont arrêtés par deux talons pratiqués aux deux
extrémités du tirant horizontal, et pour lui
donner encore plus de fermeté, on a maçonné le
vide du segment avec de bonnes briques posées
en mortier. A cette espèce d’armature sont accrochés
quatre étriers, pour soutenir la chaîne qui
porte les étriers de la première plate-bande.
Gette armature soutient de plus une partie du
poids des constructions supérieures, dont les
pierres ne sont pas en coiipe.
On a suivi, pour la construction des plates-
bandes des deux colonnades de la place Louis XV,
à peu de chose près, les moyens pratiqués pour
celles du portail de Saint-Sulpice, excepté quon
a supprimé l’armature qui est au-dessus de la
plate-bande supérieure. On a percé, de p em e ,
dans les claveaux de la plate-bande inférieure,
des trous , pour y faire entrer des barres de fer
horizontales, qui traversent les claveaux de droite
et de gauche jusqu’à la clef. Ces barres sont aussi
soutenues par des étriers qui s agrafent a^la
chaîne générale placée sur l’extrados. Cette chaîne
se trouve soulagée de ce poids, par d autres
étriers, qui s’accrochent à des barres placées sur
l’extrados de la plate-bande supérieure. C e lle -c i,
par celte disposition , est chargée de 1 effort des
deux plates-bandes , et des parties supérieures qui
ne sont pas en coupe, mais cramponnées au-
dessus. Il est bon d’observer, à ce sujet, que ce
moyen ne peut pas empêcher les joints de ces
assises de s’écarter par Ip bas, et'dë peser sur la
plate-bande. Lorsqu’on veut empêcher cet effet,
il faut au contraire cramponner ces pierres en
dessous, parce qu’alors leurs joints ne pouvant
pas s’o u vn r , elles se soutiennent dans un parfait
niveau. On doit encore remarquer que ces deux
plates-bandes réunies, forment un énorme coin
chargé d’une masse considérable, susceptible
d’agir avec bien plus de force que dans les plates-
bandes précédentes. Disons aussi que 1 appareil
des plates-bandes de la colonnade du Louvre,
dont les joints ne sont pas dans la même direction
, est préférable à celui de ces plates-bandes
qui forment des claveaux ou coins continus, et
agissent dès-lors avec beaucoup plus de force.
Voici maintenant les moyens employés pour
les plates-bandes de l’église de Sainte-Geneviève.
Ces plates-bandes ont de portée 16 pieds 3
pouces, 21 pieds 1 ponce d’un axe de colonne à
l’autre; leur largeur est de 4 pieds 10 pouces ,
leur hauteur de 3 pieds 4 pouces 6 lignes. Elles
sont divisées en i 3 claveaux, formant trois évi-
demens. Les sommiers de ces plates-bandes ont
leurs joints inclinés de 60 degrés. Les claveaux
sont maintenus par deux rangées de T en f e r ,
portant d’un bout un talon, et de l’autre un oeil.
Les talons sont scellés dans les joints pour servir de
j goujons, et les ceils , qui passent au-dessus de
l’extrados, sont enfilés par des barres, qui se
réunissent pour former chaîne. Outre ces barres
et ces T , il y a dans le milieu de la largeur, une
autre chaîne composée de forts tirans arrêtés
aux axes des colonnes.
Au lieu d’une double plate-bande, comme
dans les monumens dont on vient de parler, on
a construit au-dessus de chacune de ces plates-
bandes, un a rc , qui leur sert en même temps de
soutien et de décharge; il est érigé sur les mêmes
sommiers que les plates-bandes. On a place de
chaque côté de cet a r c , des ancres, auxquels