
On a décrit les plus cêVfkrei pagodes de l’Inde à
l ’article de 1’A r c h it e c t u r e in d ie n n e ( voyez ces
deux mots). Ce sont des especes de touis a plusieurs
étages, et qui vont en se rétrécissant de
bas en haut.
On donne aussi le nom de pagode aux idoles
mêmes que renferment les édifices de ce nom*
PALAIS , s. m. Ce mot vient de palatium? qui
désigna , à Rome , l’habitation d’Auguste et ensuite
des empereurs romains , laquelle étoit située
sur le mont Palatin f qui lui donna son nom.
Palais signifie , dans l’usage moderne et selon
le langage de l ’architecture, tout bâtiment consacré,
soit à l’habitation des princes, des grands,
des riches, soit à l ’établissement de certains services
publics, de certaines institutions qui exigent
de la grandeur, de l’étendue, de la solidité ,
et une dignité extérieure, caractère sensible de
leur importance. . .
Un palais est ainsi un édifice qui doit s elever
au-deffus des maisons ordinaires et se distinguer
au-dessus d’elles par, les divers moyens que l’architecture
peut employer, pour affecter à chacun
le degré de richesse et de magnificence qui lui
convient. _
Dès qu’il y eut des sociétés,il y eut desgouver-
nemens , c’est-à-dire , des chefs qui , sous un titre
ou sous un autre, furent chargés de soins et
d’emplois pour lesquels il fut nécessaire d avoir
des bâtimens plus spacieux. L ’inégalité des fortunes
, suite nécessaire de l ’inégalité que la nature
a mise entre les hommes, dut se manifeslei
par la différence de grandeur et de richesse des
habitations. A peine trouve-t-on quelques exceptions
à cet usage dans quelques petits Etats, ou
certaines formes de gouvernement populaires excitant
l’envie chez les pauvres, commandèrent
aux riches de déguiser la supériorité de leurs fortunes,
sous les apparences d’une hypocrite égalité
dans leurs habitations.
Mais le gouvernement d’un s eu l, ne partout
avec la société , dut'produire partout des palais
pour les chefs des Etats, et comme nous voyons
aujourd’hui dans le monde entier, sous^ toutes les
formes des- architectures connues, s’élever de
vastes, édifices pour l’habitation des rois et des
princes , de même les notions les plus anciennes
de l’histoire nous font voir des palais bâtis a
grands frais , dès les temps les plus reculés, poulies
de discerner et de constater, au milieu de ses
nombreux débris, certaines variétés qui pour-
roient y faire distinguer un palais d’un temple. 11
est vrai que dans les ruines de Karnac , les plus
anciennes de l ’Egypte , on a remarqué, sur certaines
souverains dont la mémoire s est conservée. _
Les ruines nombreuses de l’Egypte, aujourd hui
parfaitement connues, laissent encore douter s i ,
parmi tant de restes considérables d’édifices, il
en existe qu’on puisse croire avoir elé jadis des
palais. , .
Le goût monotone et routinier de 1 architecture
égyptienne qui, généralement parlant, n eut
qu’ un seul type, et n’eut pour ainsi dire qu un seul
plan , est peut-être une des causés qui empechenf
parties d’édifices, des tableaux hiérog typhiques
, qui représentent des guerres , des batailles
, des cérémonies de victoire,^ des captifs ,
etc. Ces sortes de sujets ont porté à croire, que
ce pourroit être là les restes de quelqu?édifice qui
auroit servi de palais aux rois deThèbes. Cependant
ces sujets-se trouvent sculptes sur, des. massifs
entièrement semblables à ceux dont se composent
les temples. Et puis , qui est-ce qiu
prouve que de pareilles représentations n auroient
pas pu trouver place sur quelques-unes de ces
parties toujours les mêmes, dont se comp os oient
les suites ou enfilades de pièces^ et de corps de
bâtisse, qu’on paroît avoir ajoutés 1 un apres 1 autre
aux temples? . .
Il y 'a , sur cet objet, une autre opinion, que
la critique pourra confirmer un jour , si 1 intelligence
des signes hiéroglyphiques , en s augmentant
, parvient à jeter quelques lumières sur. les
usages de l’Egypte. C’est que ces grandes réunions
de corps de bâtimens, appelés temples ?
auroient pu servir aussi d’habitation aux rois ,
dans un pays , surtout, où le pouvoir religieux se
trouva , sur tant de points , confondu avec le pouvoir
politique. Mais nous ne pousserons pas cette
hypothèse-pins loin. ^
H Ne seroit-il pas permis cependant de s appuyer •
d’une autre vraisemblance, qui repose sur ce que
Diodore de Sicile nous ap p ren d ? Tout en avançant
( liv. I , sect. i i , §: 5i ) que le roi Uehor-is.
avoit bâti à Memphis des palais aussi. .beaux
qu’aucun de ceux qu’on voyoit ailleurs, il ajoute
que ces édifices étoient fort au-dessous de. la magnificence
et du goût de ses prédécesseurs, en
d'autres ouvrages. Quels étoient ces autres ouvrages?
C’étoienl leurs tombeaux,. « Car ( d it-il)
» c’étoit à se construire de magnifiques sépullu-
». res qu’ils employoient ces sommes- immenses y
» qu’en d’autres pays les princes, consacrent a se-
» bâtir des palais. Ils ne pensoient pas que la
» 'fragilité du corps, pendant sa vie , méritât de .
» solides habitations. Ils ne regardaient le palais
» des rois que comme une hôtellerie q u i, appar-
» tenant successivement à tous, n’étoit à per-
» sonne. Mais leurs tombeaux , ils les envisa-
» geoient comme leurs véritables palais > comme'
» leur domicile propre, fixe et perpétuel. Aussi
: » n’opargnoient-ils rien pour rendre indestruc-
» tibles des monumens, qui dévoient etre les dé-
» positaires de leur corps et,de leur mémoire. »
Ce renseignement sur les opinions égyptiennes,
nous paroît devoir entrer dans la balance des raisons
qui expliqueroient, comment et pourquoi ,
dans un pays qui a conservé tant de restes d édifices
, et d’aussi durable^ encore on- ne découvre
«
rien qui porte évidemment le caractère de palais,
ou du moins d’habitations conformes à ce qu’on
voit ailleurs.
Les temps les plus anciens de la Grèce sont
ceux où ce pays fu t , dans tous ses petits Etats,
gouverné par des rois. Les poemes d’Homère en
font foi, et c’est encore là que nous trouvons les
premières indications ou descriptions de palais.
Quand on voudroit supposer que le poete eut été
lui-même l’architecte des palais qu’il décrit, il
n’en sevoit pas moiiis vrai qu’il en auroit puisé l’idée
dans les modèles qu’il avoit sons les yeux. Le
palais de Priam est décrit dans le sixième Chaqt
de Y Iliade y comme un édifice vaste, dont la partie
inférieure étoit composée de portiques en
pierres et de galeries couvertes , au-dessus ides-,
quelles il y avoit cinquante chambres richement
décorées , habitées par les'cinquante fils de Priam.
En face de cet édifice , dit le poete , et dans l ’intérieur
de la cour, il y en avoit un autre bâti en;
pierres, et o ù l’ on comptoit douze belles châm-i
bres pour les filles du Roi. Paris, qui est répré-!
senté comme ayant des connoissànées en architecture
, avoit fait venir a Troye plusieurs architectes,
pour lai bâtir un palais. Cet édifice futj
construit èntrê le palais de Priam et célui
d’Hector.
La description du palais d’Âlcinoüs par Ho-i
mère, toute fabuleuse qu’on puiss’e la supposer
quant aux détails de décoration, n’en est pas
moins un témoignage irrécusable du goût régnant
au temps du poete, et de l ’usage reçu de
porter le plus grand luxe dans lès habitations des
princes.
Il est bien vraisemblable, et l’on doit croire
que, lorsque le régime démocratique se fut établi
dans les différentes parties de la Grèce, le
luxe de chacune de ces républiques fut plutôt appliqué
à l’architecture des temples et des établis—
semens publics , que dirigé vers la construction
des palais ou des maisons particulières. L ’état républicain
ne convenant qu’à de petits territoires,
n’a ordinairement que des revenus bornés, ët
sans quelque cause extraordinaire , on rie saurôit
s’y livrer à ces grandes entreprises qui , en fait de
palais y ne peuvent appartenir qu’aux gouver-
nemens monarchiques ou aristocratiques.
C’est ce que Démosthènes nous fait bien entendre
dans sa harangue contre Àristbcrâte, en comparant
l’état ancien des moeurs d’Athènes , à celui
de son temps : « Jadis (d it- il) la république
» étoit riche et florissante , lorsque nul particu-
» lier rie s’élè'voit au-dessus du peuplé. Ceux qui
» cônnoissènt la maison de Thémistocle , celle
» de Miltiade et des autres grands-hommes de
» ce temps-là, voient que rien ne ‘les distingue
» des maisons ordinaires (alors aussi les édifices
» publics étoient si beaux, qu’ il n’y a point de
» moyen d’enchérir sur leur magnificence ). Dej
» nos jours, au contraire , l’opulence des parti-
» cnliers qui se mêlent des affaires de l’Etat est
» portée à un point, qu’ils- se 'sont'bâti des mai-
» sons qui surpassent en beauté nos grands edi—
» fi ces. Quant aux ouvrages que la ville fait cons-
» truire, ils sont si modiques et si misérables ,
» que j’a'urois honte d’en parler. »
On ne sauroit mieux montrer combien le gouvernement
démocratique s’oppose à la construction
des palais. Athènes touclioiE alors aux derniers
jours de la république.
Rome républicaine ne connut point le luxe des
palais : nous ne lé concluons point de ce que les
Romains n’employèrent d’autre mot que le mot
do:nus maison , à exprimer toutes les sortes d habitations
5 car ils le donnoient aussi à de véritables
palais y comme on le verra. Avant les conquêtes
qui introduisirent dans la république la
richesse et le goût de l’ostentation, une grande
simplicité de moeurs, une sorte de rusticité produite
par la vie agricole , d’une part, et les habitudes
militaires de l’autre,s’accommodèrent d’habitations
où il eût été , non-seulement inconvenant
, mais dangereux d’affecter une certaine su-
I périorité.
Mais Rome en vint bientôt à ce point de réunir
les deux conditions les pins favorables au luxe
des palais 5 savoir, celles de l’aristocratie et celles
de la monarchie. Dès que la guerre , les conquêtes
et l’esprit de rapine , effet et cause à son tour
de la manie de conquérir , eurent fait passée
dans les mains dés généraux d’armée, et des gouverneurs
de provinces , la fortune des peuples et
les trésors des'princes , bn vit descitoyéns égalée
leurs habitations à celles des rois* L’élément
aristocratique , d’ailleurs, qui forme le fond du
gouvernement de Rome , avoithabitué'les esprits
à reconnoître dans les familles des supériorités
et des droits aux honneurs et aux dignités, qui
veulent se manifester par dés signes extérieurs,
et l ’histoire nous fournit de nombreuses preuves
de l’inégalité des habitations, avant l ’époque qui
vit expirer la république.
On trouve chez Cicéron des notions assez instructives
à cet égard, soit dans les mentions qu’il
fait des habitations de quelques-uns de ses contemporains
, soit dans ce qu’il rapporte de- ses
propres maisons, où nous voyons que l’emploi des
colonnes et tout le luxe des statues, 'des galeries
et des oTnemens avbient déjà cours d’une manière
remarquable ; et il s’en fallait que Cicéron, d’une
famille nouvelle et d’une foi-tune médiocre , pour
son temps , pût entrer en comparaison avec les
Pompée , les Sy Ha , les Crassûs et les Lu cul lus,
dont la magnificence, en fait de palais , de voit
l ’emporter sur celle d’un parvenu.
Cependant ilpaio'ît que ce n’éfbit encore que
le prélude de ce que le règn'e des empereurs de-
voit opérer. Auguste disoit qu’il avoit trouvé
Rome bâtie d’argile ( c ’eft-à-dire,en briques) et
qu’il la laissoit toute de marbre. Ce fut efféctive-
H a