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célèbre cimetière de Pise , dont nous avons donné
la description au mot Cimetière. On peut regretter,
que depuis, de pareilles entreprises n aient
pas été répétées, et n’aient pas trouvé à se mettre
d’accord, soit avec les pratiques de la religion,
soit avec les moeurs publiques, et les institutions
de la police des grandes villes.
Il devoit en elïet arriver à la longue, que les églises
devinssent-trop étroites, pour recevoir tous les
tributs que la mort ne devoit jamais cesser de leur
envoyer. Leurs intérieurs aussi ne pou voient admettre
, sans se défigurer entièrement, toutes les
espèces de monumens funéraires , que là suite des
générations y auroit dû multiplier. La salubrité
devoit enfin commander d’en éloigner , ou. dy
diminuer considérablement les inconvéniens de ’
ces dépôts toujours croissaus des dépouillés des vi-
vans. Il y a donc lieu de regretter que les grandes
villes surtout, n’aient pas songé à établir , et pour
la dignité des églises, et pour la salubrité publique,
et dans le double intérêt des affections ou
des vanités humaines, et des arts qui en sont les
interprètes ou les ministres, de grands et spacieux
édifices plus ou moins dépendant des églises,
et dont les vastes enceintes auroient offert tous les
degrés de sépultures proportionnés à tous les états,
à tous les rangs, à toutes les fortunes.
Nous ne pouvions terminer cet article, sans être
ramenés aux réflexions que nous suggéra, il y
a près de quarante ans, le cimetière de Pi&e ,
dans un temps où il étoit fort difficile'de prévoir
les événemens, quiauroient pu faciliter à Paris de
pareils établissemens, faute desquels , par un désordre
contraire à celui des anciens usages , nous
Leu , et qui peut peser environ un millier ou dix
quintaux 5 ce qui fait la moitié d’un tonneau pour
la cargaison d’un vaisseau. Lorsqu’une rivière a |
sept ou huit pieds d’eau , la navée d’un grand
bateau peut porter 400 ^4^0 tonneaux de pierre, j
TORCHÈRE, s. f. Ce mot vient de torcheA
qui signifie un flambeau grossier fait de matière
résineuse , dont on s’est servi long-temps, et dont
on se sert encore en quelques occasions, pour
éclairer hors des intérieurs des maisons, soit les
rues, soit des cours ou des passages obscurs.
Torchère signifie donc porte torche. On a donné
ce nom à de fort grands guéridons qu’on pour-
roi t appeler candélabres, qui reposent sur un
pied ordinairement triangulaire, dont la tige,
ornée diversement de sculptures , soutient un plateau
voyons sur d’immenses terrains , livrés au hasard
ou aux caprices des vanités les plus vulgaires,'
s’accumuler, comme dans un bois touffu, des ■
monumens éphémères qui s’entre-détruisent, qui
s’offusquent, et que menace "Une prochaine destruction.
Triste spectacle , pour la raison el le .j
goût, si le ridicule des misères de l’esprit humain
n’en corngeoit l’effet.
TONDIN. Voyez T ore.
TONELLE, s. f. Vieux mot qui a été employé
pour signifier un berceau , un cabinet de verdure.
Jean Martin s’en est servi pour désigner un
berceau en plein cintre. On croit que c est de ce
mot que fut formé jadis, à Paris, celui de tonnellerie
, ou portique de balle.
Le mol tonelle est anglais, et c’est le nom qu on
donne aujourd’hui a un grand conduit, en berceau
voûté , qu on pratique sous la Tamise ,
pour réunir , en place de pont, deux quartiers de
la ville de Londres.
TONNEAU DE PIERRE (construction), s. m.
On appelle ainsi la quantité de pieds cubes qui,
sert de mesure a P ans ■, pour la pierre de Saint—
qui porte la lumière. On en décore les
grandes galeries, et souvent on leur fait supporter I
des lustres de cristal que l’on garnit de bougies.
La sculpture et l’ornement se sont emparés de
ce meuble, et l’on a substitué aux tiges des pla-1
teaux , des figures qui posent sur des socles, et
portent des espèces de cornes d’abondance , dont
l’orifice est le récipient des lumières qu’on en lait
•sortir.
TORCHIS, s. m. Espèce de mortier fait de
terre grasse détrempée, et mêlée avec de la paille
coupée , pour faire des murailles de bauge {voyez
ce mot), et garnir les panneaux des cloisons et
les enlrevoux des planchers dp granges et de métairies.
On l’appelle torchis , parce qu’on le tortille
pour l’employer, au bout de certains hâtons
faits en forme de torches.
TORE, s. m., du latin toms, que quelques-uns
dérivent de tottus ( tordu, tortillé ). Toms signifie
proprement, en latin , ces- ébrdes qui, 'doublées
ou triplées par l’art du cordier, forment ce quon
appelle un çâbîër ' • .
■ Ceux qui se plaisent à rendre raison de tons les
membres, et de toutes les moulures qu'emploie
l’architecture , et à trouver cette raison dans les
pratiques originairement inspirées par le;'besoin
des constructions primitives en bois, pensent qnu
fut possible que, pour empêcher les bois debout de
se rompre par la pression-, on les ait, environna
dans le bas et dans le haut, de cercles formés pat
des cordes ou câbles plus ou moins forts. Dans B
suite, des liens de Fer auroiént pu remplacer te>
câbles, et lorsqu’enfin l’àrt employa la pierre aie
produire le travail du bois, .et l’ouvrage de B
charpente, les termes qui exprimoieni les p"-"
miers procédés du modèle, se perpétuèrent, e
• continuèrent de s’appliquer aux objets de son un '
tation. On appela donc torus, tore, cette grosse mon
lure ronde, qui entre avec plus d’une vau
dans la composition de la base des colonnes* ^
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reçn encore d’autres noms tirés toujours de sa
forme > tels que tondin, boudin, gros bâton. En
italien, on l’appelle bastone.
La base qu on nomme attique ou corinthienne ,
reçoit ordinairement deux tores, l’un qu’on appelle
supérieur, et qui est plus mince ; l’autre j
placé plus bas, qu’on nomme ipférieur , est plus
épais. __ ,
Les ouvriers appellent corrompu, une sorte clé
tore dont le contour ressemble à celui d’un demi-
coeur. ,
TORON, s. m., signifie gros tore. On a donné
depuis quelque temps ce nom, à une très-grosse
baguetté courante, qui se rencontre dans les monumens
de l’Egypte, constamment employée à e inbord
urer les frontispices des temples, et à suivre
avec la plus grande uniformité les formes extérieures
des murs, qui s’alignent avec leurs colonnades,
ou ce qu’on peut appeler leurs péristyles.
Le toron et la scotie, l’un en relief, l’autre en
creux, sont les seules formes de moulures ou de
profils qu’ait employées l’architecture égyptienne.
Là se trouve une des preuves delà différence de
modèle , et de système imitatif, entr’elle et 1 architecture
grecque, et rien n’explique mieux la |
monotonie de l’un et la variété de l’autre.
TORS, T orse, adj. Ce mot vient de tordre,
qui vient de torquere. Il exprime dans les corps ,
une configuration en v is, ou spirale.
TORSE (Colonne). A l’article Cannelure {voy.
ce mot ) , nous avons indiqué avec beaucoup
de probabilité, ce nous semble, l’origine la plus
vraisemblable de là forme bizarre donnée^ à^la
colonne torse. Nous avons toujours réfute 1 o-
piuion de ceux qui, abusant du système imitatif
de l’architecture grecque, ou de la transposition
de la construction en bois dans la construction en
pierre, vont chercher le modèle des colonnes
dans les arbres , tels qu’ils existent au milieu des
forêts. Aussi ne saurions-nous admettre l’hypothèse,
en vertu de laquelle on prétend que la colonne
torse auroit été une imitation de troncs
d’arbres torlus. Quand même on voudroit se prêter
à celte idée, encore faudroil-il dire, que l antiquité
véritable n’offrant/aucun exemple de colonnes
torses, et ce qu’on peut citer en ce genre ne
datant que des derniers, siècles de l’art , celle bizarrerie,
loin d’avoir été le produit d’un temps ou
l’art se seroit modelé sur ce que ia nature grossière
des premiers -essais lui auroit présenté , n’aura pu
être au contraire qu’une conséquence-tardive et
capricieuse d’un système mal entendu.
A l’article * ci-dessus cité , nous croyons avoir;
établi, que la cannelure des colonnes ne put guère
être autre, chose, qu’un ornement arbitraire , sans
principe puisé dans aucune'convention naturelle j
qu’au contraire elle aura dû son origine à quelque
Diction, d’Archit. Tome III.
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procédé de pratique, dans la taille du bois, ou la
coupe de la pierre. Nous pensons pareille chose
de l’origine de la colonne torse, c’est-à-dire
qu’elle sera née de l’abus des cannelures en spirale.
Nous disons l’abus, parce que si la canneluie
perpendiculaire est, parle fait, un ornement arbitraire
, et dont on ne sauroit découvrir la raison
nécessaire, cependant il faut avouer qu’elle est,
en ligne droite, plus conforme à la nature de la
colonne, que ne le sont les circonvolutions de la
cannelure en spirale. #
Aussi', autant qu’on peut en juger, et par les
ouvrages antiques, où l’on en trouve des exemples,
et par l’époque de ces ouvrages , il paroi t que ce
caprice n’eut lieu, que sur des monumens d une
légère importance, et qui datent des derniers
siècles de l’art. Tel est entr’autres le petit temple
de Clitumne. (Voyez Spoleto.) Du reste plus
d’un ouvrage d’ornement, comme vase, candélabre
ou autre ustensile, reçut des cannelures en
j spirale; et l’on avoue qu’il y auroit une sévérité
excessive, à les condamner dans ces objets, pures
- créations de l’imagination , et auxquels on ne doit
demander ni la réalité , ni l’apparence de la solidité.
' ‘ • ... . .
I On est donc porté à croire, que la caunelure
spirale une fois appliquée ^ des fûts de colonnes,
aura fait imaginer, dans quelques ouvrages non de
construction, mais de décoration, qui datent du
moyen âge, des réunions de tigettes tordues ensemble
(on en voit de semblables d’une petite dimension
dans le cloître de Saint-Paul hors des murs ) , qui
auront produit et donné l’idée de la colonne torse.
Anastasius, dans la Vie du pape Grégoire III, appelle
ces colonnes volubiles columnas• Mais Sau-
maise veut qu’on lis e volutiles, etcètte leçon se
trouve dans d’autres manuscrits.
Winckelmann ( Osservazioni sulT architettura
degli Antichi, cap. 2) cite comme exemples de ce
genre de colonues , les deux qu’il dit être employées
à un autel de Saint-Pierre à Rome. Mais
une note de l’éditeur Carlo Fea, nous apprend
qu’il s’agit ici des deux colonnes qui sont dans la
chapelle’ du Saint-Sacrement. Huit autres semblables
■ ornent les quatre tribunes à balcon , qui
sont prises dans l’épaisseur des quatre piliers de
la grande coupole , et il y en a encore une dans
la chapelle qu’on appelle du crucifix, et que
Piranesi a gravée. •: . ,
Autrefois ces colonnes torses ornoient 1 autel,
. ou ce qu’on appelle la confession de l’ancien Saint-
Pierre , et elles étoient au nombre de douze.
Une se rompit dans l’enlèvement qu’on en fit.
Ou -répète, d’après quelques écrivains qui ont
donné des descriptions de la vieille basilique , que
• Constantin lesavoit fait venir de Grèce pour cette
destination ; mais il est à croire que ces colonnes
torses furent les six qu’Anastasius , cité plus haut,
dit avoir été placées au lieu indiqué par le_pape
Grégoire III, qui gouvernoit l’Eglise en 7^1, et
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