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peintui\e qui accompagna jadis les monqmens des
siècles d’ignorance ? Il y a déjà près de, quarante
années qne l’art des vitraux peints s’est reproduit
chez les Anglais, dans des ouvrages qui font l’illusion
des tableaux en figures. On en donnoit pour
raison , que les images de tout genre ne pouvant
point trouver place dans les églises protestantes ,
on avoit regardé les vitraux peints comme qn
moyen d’éluder en faveur des arts du dessin la
défense religieuse. Depuis celte époque, l’art de
peindre sur vitres., et de transformer de nouveau
les fenêtres en tableaux, paroît avoir occupé plus
d’un artiste.
On a vu à l’article V erre (Peinture sur), que
des artistes anglais avoient été appelés à Paris
pour y exécuter de ces sortes de tableaux , et il
a été prouvé dans ce même article, que le prétendu
secret des Anciens en ce genre n’en étoit
pas un ; qu’il n’avoit pas cessé d’être connu , et
qu’avant les travaux des artistes anglais , d’assez
nombreux ouvrages faits à Pans témoignoient
que ce n’éloit point l’art qui avoit manqué à cet
emploi, mais bien l’emploi des ouvrages qui
avoit manqué à Part.
Maintenant, les seules questions à résoudre
seroient de savoir: i°. si un procédé aussi dispendieux
peut être renouvelé avec avantage,
tant que le besoin n’en favorisera point l’exploitation
; 2°. si ce besoin peut se reproduire natur
Tellement dans nos édifices et dans leur décoration;
3°. s’il importe réellement dèffaire renaître
ou d’encourager l’exigence d’un semblable besoin.
Quant à la première question , on ne peut se
dissimuler que vainement toute invention, toute
industrie , toute fabrication se trouveront importées,
excitées , cultivées dans des temps et des
pays où manqueroient les principes qui peuvent
les faire prospérer. Chaque plante, chaque production
de la nature veut un sol et un ciel propice
, dont les soins de la culture la plus assidue,
ne remplaceront on ne compenseront jamais l’absence.
Réciproquement, le défaut de culture ne se
trouvera pas toujours corrigé par les causes naturelles.
Il en est de même des productions des arts.
Leur succès dépend d’abord, entre beaucoup de
causes naturelles,, de celle qu’on doit appeler le
besoin.Dès, qu’ un art n’a point ses racines dans le
fond de quelque emploi nécessaire et commandé
par quelque usage public; dès qu’il ne se lie ni à
certains besoins, ni à un certain nombre de pratiques
agréables qui font partie des moeurs et des
plaisirs de la société , cçt art pourra bien devenir
un objet de luxe ou de curiosité ; mais, &i çe luxe
est dispendieux , s’il ne trouve d’aliment que dans
la munificence d’une protection particulière , sa
destinée sera de passer promptement et de dispa-?.
roître. Or, lorsqu’on applique ces considérations
à des ouvrages qui sont déjà par eux^mêmes,
dans chaque pays , les objets de la plus grande
dépense , je veux dire les ouvrages de l’architec-
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ture , en grand surtout, tels que temples , pahtli •
monumens publics , on ne saurait présumer qu’un
genre de peinture aussi dispendieux , et toutefois
nécessairement inférieur à tous ceux qui entrent
aujourd’hui dans la décoration, puisse devenir
une sorte de besoin , comme autrefois , lorsqu’il
étojt le seul luxe de décoration intérieure des
églises.
Ceci nous conduit à la seconde question. Est-il,
probable que le goût i|q public en vienne naturellement
à regretter la pratique de ce procédé
de peinture et de ses applications , au point de
lui rendre , dans l’opinion , l'importance qu’elle
accorde à ces arts, dont on s’est fait un besoin ?
Nous répondrons que rien n’est moins probable,
La fausse idée qu’on s’étoft faite du prétendu
seerçt de celle peinture, et de l’ignorance de
notre temps à cet égard , a pu éveiller cette espece
d’amour-propre, qui souffriroit d’une in-;
fériqrité içop ré e lle , dans un art si intimement
lié à la science de la chimie et aux procédés
métallurgiques. Mais dès qu’il est reconnu
que l’on n’ignore rien, et même qu’on peut défier
la science du passé sur tous les points d’exécution.
en ce genre, il n’est plus permis de
croire que la peinture sur vitres puisse devenir
meme un besoin d’araour-propre. Ne seroit-il pas,
permis encore de présumer , que très-naturelle-:,
ment l’çsprit du temps actuel, que les circons-.
tances qui ont si singulièrement diminué les ressources
des établissemens religieux , et détourné
cfes intérêts matériels du culte les affections.protectrices
de ce genre de peinture, s’opposeroient
à son rétablissement, loin d’en seconder les entreprises
?
Mais importe-t-.il réellement de prendre les
moyens, quels qu’ils puissent être , de faire
revivre l’art de faire des tableaux sur verre, en.
encourageant, par des exemples, tout ce qui
pourroit en reproduire le besoin ? La réponse à
cette troisième question ne sauroit être difficile.
Qn a 'd é jà vu que la peinture sur vitres en
figures avoit du la vogue qu’elle obtint, dans le
moyeu â g e , à la tradition des procédés techniques
de la mosaïque et des opérations métallurgiques
conservées par les. corporations, lorsque tous les
arts du dessin se trouvèrent enveloppés dans une
ignorance générale , et qu’à défaut de toute autre
peinture, l’architecture gothique avoit protégé
singulièrement l’art de transformer en tableaux
les vitraux de ses grandes et nombreuses fenêtres
; dans les, églises. Si l’on examine ensuite les entreprises
de cet a r t , à ses diverses époques , on voit
qu’à celle, où il jeta le plus d’é c lat, dans les
compositions e t les figures de ces sortes de la-
i bleaux, ce qu’on y admira , et ce qu’on y admire
encore le plus , se réduit uniquement à la beauté
des substances colorantes. Pour ce qui fait le fond
de l’art dé peindre, il y est entièrement livré à
la routine la plus ignorante, et effectivement
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cette manière de composer de grandes scènes, par
line réunion de petits morceaux de verre coloriés,I
assemblés avec des plombs , ne pouvoit que pré-
V senter les plus grands obstacles au succès de compositions,
vues d’ailléurs de trop loin, pour qu’on
pût y chercher autre chose que le plaisir des
yeux. Que si on examine les travaux de cet a r t,
à sa dernière époque , c’est-à-dire depuis la renaissance
des beaux-arts, et de la peintuie en
particulier, on avouera qu’il s’est fuit des ouvrages
fort recommandables par le bon goût de la
composition , du dessin et de la vérité. Mais ce
furent surtout de petits vitraux placés sous l’oe il,
dans les cloîtres , et d’autres locaux d’une petite
dimension.
Cependant ce genre de peinture eh petit, dif-
ficultueux et dispendieux de sa nature , devoit
bientôt disparoîlre , ainsi qu’on l’a vu; dès que la
.Vraie peinture, avec ses nombreuses et immenses
ressources ; avec ses procédés plus oii moins expéditifs
, selon les genres , fut rentrée dans son domaine
et eut reconquis son légitime empire. Pou-
Voi.t-il en arriver autrement, et la peinture sur
vitrés 3 par la seule raison qu’elle n’a d’emploi que '
sur le verre, île dévoit-elle.pas être bientôt abandonnée
?
Quelle raison y auroil-il donc aujourd’hui de
faire renaître l ’emploi d’une peinture qui ne ve-
.poseroit que sur un besoin factice, qu’aucune
Utilité ne motiverôii , et qui hors des vitraux,
que leur position éloigneroit de la vue et des
.aocidens d’une destination usuelle , resteroit
toujours au-dess.pus des autres productions du
pinceau ?
Quelque perfection que ce genre puisse atteindre
en grand; par l ’exécution d’un peintre
habile , oü peut affirmer que jamais il ne lui
sera donhé d’arriyer à tpus les degrés de hardiesse,
de liberté, de correction , de charme et
d’barmcnie des autres genres. Que faire ensuite
des produits d’un art dont la fragilité permet à
peine le déplacement, qui ne sauroit trouver
placé, dans les collections de tableaux, qui n’ést
propre qu’à faire des châssis ; que le moindre accidentpeut
détruire et que rien ne peut réparer ?
Seroit-ce d’ailleurs à une époque où. le nombre
des peintres surpasse à .un degré aussi prodigieux
le nombre des emplois à faire de lèurs lalens,
qu’on droit porter de grandes dépenses à un genre
de peinture nécessairement inférieur et naturellement
stérile ? ...
La peinture sur verre où sur vitres, né pëüt plus
être qu’un objet de .curiosité-, propre uniquement
à prouver qtie si l’on n’èn fait que peu ou point,
c’est qu’on n’en veut pas davantage ou qu’on
u en veut pas du tout;
Faudroit-il cependant exclurë ce procédé curieux
et intéressant des entreprises de l’architecture?
Nous croyons que le bon esprit ; clans la
culture et dans l’emploi des arts, ne doit rien re-
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jeter; qu’il peut, au contraire, ët doit accueillir
et admettre tout ; mais que ce bon esprit consiste
à placer chaque chose en son lieu , dans la mesure
qui lui convient, et avëc le discernement des
convenances qui lui appartiennent.
Ainsi, la grandeur des vitraux de nos églises
en forme une partie assez considérable, pour que
le goût doive admettre volontiers un genre d’or-
nernens qui arrêté agréablement les yeux , sans
prétendre à être une décoration trop importante,
qui , sans intercepter le jour et la lumière que
réclament les intérieurs , en tempère jusqu’à un
certain point l’excès ; c]ui poiivantsë composer de
petits cômpartimens, rende leur exécution peu
dispendieuse, leurs ligamens moins sensibles , et
leur réparation facile et de peu de dépense;
Or, le Système de peinture qui sëi'oil propre à
remplir ces conditions , nous paroît devoir être
celui qu’on appelle du nom général d’ornemens
dans l’architecture. Il consiste en rinceaux , en
enroulemens, en compositions de feuillages«, de
fleurs; de festons , de symboles variés , de tous
les objets enfin que l'architecture dispose dans ses
profils ou dans toutes les parties courantes, et qui
se répètent, comme Cntrelas , postes, oves ,
perles ; patères , etc.
I Rien donc n’empêcheroit de faire servir la
peinture sur verre à reproduire , dans de telles
séries d’ornemens , les vives couleurs des objets
naturels ; qui deviëndroierit naturellement les
encadremens des grands vitraux. Rien n’empêcheroit
que , selon l’espace donné ; les angles et
le centre d’un vitrail , répétant certaines distributions
des voûtes et des plafonds de [’architecture,
reproduisissent les compositions ingénieuses;
les cômpartimens variés, et les diversités d’elïct
de l’arabesque.
La peinture sur vitres} comme cette dénomination
l’iudique d’une manière plus spéciale, ne
pouvant réellement produire son effet pour les
veux ; et par conséquent acquérir l’existence qui
lui est propre, qu’au moyen de la transparence ,
exigeant dès-lors une situation qui mette son fond
dans le cas de servir de vitre , on ne dissimulera
point qu’il peut y avoir quelques emplois inté-
ressans à faire , quoiqü’en petit , de cette sorte
de procédé. Quand on dit en petit, c’est par comparaison
aux vitraux des grandes églises. Comme
cette peinture peut être pratiquée, soit sur de fort
grands carreaux ou sur ce qü’on appelle des glaces,
plus d’un ouvrage exécuté depuis peu de temps ,
sur de semblables tables dé verre , nous montré
que lion peut y admettre des images de grandeur
naturelle*
Pour en donner qtielqùëâ exemples, Un oratoire
, une petite chapelle mystérieuse , rece-
vroient avec beaucoup de convenance quelque
belle tête de Vierge , quelque figure de sainteté;
sur un vitrage dont la peinture même inlercep