les rapports nécessaires de toutes les parties, et de
tous les membres de la charpente , perpétuèrent
les raisons de toutes ces formes. De celte imitation
naquit l’avantage qu’aucune autre architecture
ne put avoir, celui d’asseoir l’ensemble, les
détails et les rapports de tons les objets enlr’eux,
sur quelque chose qui rappeloit ou indiquoit un
. besoin, une nécessité d’être ainsi. Pareille chose
peut se dire du plus grand nombre des ornemens,
ou 1 on trouve, comme dans les oeuvres de là nature
, le plaisir produit par le besoin.
L^art donc trouvant à s’emparer d’un tout constitue
à l’instar des corps organisés, n’eut plus qu’à
régulariser, par un système proportionnel, ce que
1 instinct imitatif avoit déjà produit ; et rien alors
ne fut ni plus simple ni plus naturel, que d y appliquer
un module, dont les divisions et les subdivisions
devinrent, ainsi que le sont dans le corps
humain, soit le pied, soit la tête, le régulateur
tle toutes les parties, et de leurs mesures respectives.
L ’effet d’un tel système, fut de produire dans les
ordonnances des édifices , le même résultat que
dans la nature. Chaque membre, chaque fraction
de membre d’une statue bien proportion-
nous permet de déterminer avec la plus grande
^précision la hauteur, la grosseur, non-seulement
•de toute la statue, mais encore de tous les memb
res, de toutes les parties même les plus petites
de cette statue, dont l’ensemble nous seroit inconnu.
De même, si l’ensemble nous est connu
par le seul récit, nous serons en état de dire ce
que doit être chacun de ces fragmens. O r , il en
est ainsi d’une ordonnance d’architect,ure grecque.
Lfe simple triglyphe du temple dit des Géans à
Agngente, nous a fait retrouver aussi certainement
sa masse générale, que sa masse nonsv eût
«nseigné la dimension du triglyphé. Un seul «lenticule
d une corniche, va nous dire la grandeur de
1 entablement, 1 entablement nous dira le genre'
de l’ordre, et par conséquent la dimension des
colonnes , et ainsi de suite.
La voilà cette véritable imitation de ta na-
luve, qu’ilfaut reconnoître dans le système de l’ar-
chileclure grecque, et qu’on ne sauroit rec.on-
noilçe dans aucune autre-architecture. C’est cette,
assimilation à là constitution des.corps organisés,
<jui lui a donné une supériorité incontestable sur
toutes les autres méthodes de bâtir.
Tel est en effet le pouvoir d’un principe d harmonie,
une fois introduit dans l’art de bâtir, que
tout doit en éprouver l’influence. Ce système damnation
de la proportion des corps, porta de -plus
en plus les hommes , à puiser à ta même source de
nouvelles analogies. De 'ce nombre furent celles
des trois modes appelés ordres-, qui représentent*
les trois termes, dans lesquels se renferme ordinairement
l’action dé ta nature., savoir, le plus et le;
moins ,. et le moyen terme. Lorsque Vitruve a
voulu voir dans l’imitation du corps de l ’homme
et de celui de ta femme , le type de l’ordre doriqm
et celui de l’ionique, il faut prendre celle idée
comme l’abus métaphorique d’une vérité abstraiie,
Il seroit plus probable, si l’on vnuloit réduire cette
notion à une explication naturelle, que ta science
des proportions .du corps humain auroit pu enseigner
à l ’architecture, l’art de varier les caractères
et 1a physionomie des ordonnances, dans la mesure,
et de ta même manière, que le fait la nature
_ selon les degrés de force et de légèreté, qu’on dis-
lingue dans ta stature du corps humain.
Ceci, au reste, nous feroit par trop sortir de
l’objet qui a été celui de cet article.
INous ne nous sommes point proposé, comme
on l ’a dit au commencement, de donner ici les
nombreux détails des proportions de chacune des
parties de l’architecture. Notre seul but a été de
traiter de ta proportion en général, d’en définir
l’idée élémentaire , d’en développer la notion
théorique pour l’artiste , de montrer qu’on confond
trop souvent les rapports de dimension avec
les rapports de proportion y que certaines proportions
simples , comme celles de grandeur, de hauteur
dans les masses , peuvent appartenir aux édifices
de toutes les - architectures; mais que la
p ro p o r tion en tant que système de'rapports nécessaires
et réciproques entre le tout et les parties,
n’appartient et n’a pu appartenir qu?à l’architecture
grecque ; quelle a dû ce. privilège au principe
originaire de sa construction en bois, et à l’étude
du corps humain, développée et perfectionnée
par les arts, qui ont pour but son-.imitation.
PROPYLEES : est le. mot grec'au pluriel (pro-
pulaia} , et il signifie avant-portes y ou portes en
avant. Ou l’a employé au pluriel, en l’appliquant
à certains vestibules somptueux , composés en effet
de plusieurs portes.
Le plus célèbre de ces vestibules fut celui qui,
construit au haut de l’Acropole- d’Albènes, en
•éloit .l’entrée ,iCt faisoit un de ses principaux oiv
neinensi II fut exécuté, sous le gouvernèrent de
Périples , .d'après les dessins de Mnesicles , un
des plushabiles architectes de cette époque. Commencé
sous l’urchonlal d’Eutbymèmes, l’an 407
avant notre è re , il ne fut achevé que cinq ans
après, sons l’archonte Pytbodore. Il coûta (dit-
on) 2012 talèns , somme considérable pour" le
temps, car elle s’élève à celle dé 16*864,800 liv.
Pausanias vante surtout ta beauté de sa couver-
ture qu de ses plafonds , tous formés de vas'es
dalles de marbre blanc, q ui, pour la grandeur
des morceaux et ta richesse de leurs ornemens,
sürpassoient tout ce cju’il avoit vu ailleurs'dé plus
magnifique.
Ce monument, aujourd’hui fort dégradé, a
pourtant conservé; tant dans son plan, d.ont on
retrouve toute la disposition , que dans .de^très-
grands fragmens de son élévation , des témoignages
propres à justifier l’opinion de Pausanias.
Placé, comme on l ’a d it, au haut de ta seule
montée qui conduisoit à l’Acropole, il s’élevoit
sur deux étages dé degrés. Le premier, composé
de huit marches et flanqué de chaque côté par un
massif, qui paroit avoir été le piédestal d’une
statue équestre, conduisoit à uue petite place ,
d’où, par une autre montée de cinq degrés , 011
arrivoit au corps principal de bâtiment, décoré
à l’extérieur par une rangée de six colonnes de
l’ordre dorique, dont l’eutre-colonnement du milieu
étoit sensiblement plus large que les autres.
La largeur de cet enlre-colonnement étoit égale
à celle qui sdparoit les deux lignes de trois co-
[lonnes lesquelles divisoient comme en tréis alliées
l’espace du vestibule , et'cette largeur étoit
[ aussi la même que e*elle de 1a porte du milieu ,
! au-delà de laquelle on trouvoit un autre péristyle,
formé aussi de six colonnes en tout semblables
à celles dû. péristyle extérieur déjà décrit;
; L’espace interne du. vestibule divisé en trois ,
'comme on l ’a d it , avoit ses plafonds soutenus par*
[des colonnes doriques, d’une proportion moindre
■ que celle des colonnes du dehors Ces colonnes
[non-seulement ont dés bases , mais elles reposent
[sur des piédestaux. De grandes dalles de marbre, j
.posant d’une colonne à l’autre, et de celle-ci sur :
[les murs, constiluoient le plafond de cet in té- :
liieur. ; • •
I . Du solde ce vestibule, on montoit encore cinq
[degrés jusqu’aux portes dont on a déjà fait men-
jtion. Elles étoient au nombre de cinq. La plus
[grande étoit celle du milieu, q ui, comme 011 l’a
dit, avoit la. largeur de l’entre-colonnement du
milieutanldes deux péristyles, que de l’allée prin-
[ cipale, dans l’intérieur du vestibule. Cette porte
Létoit également plus haute que ses portes Coltalé-
I térales, lesquelles ailoient de chaque côté en di-
[ miauaut tant de hauteur que de largeur. Quelle
liai la raison et de ce nombre de portes, et de.
[leur décroissance? C’est ce que rien, je pense ,
Ine sauroit aujourd’hui nous apprendre. Toutefois
|il laul croire que ce ne fut pas une disposition ar-
Lit rairey car nous allons voir, dans la,description 1 des propylées d’Eleusis , ta répétition exacte de
Icelte particularité.
t A l’entrée des propylées de l’Acropole d’Athè-
|nes, et du eôté qui regurdoit ta ville, se trouvoient
fcdeux édifices plus petits, qui se raccordoient avec |1 ensemble du plan^et 1a masse dé l’élévation. A
Igauche, ç’étoit un petit leuiplé consacré à la
victoire ; à droite , un bâtiment semblable, don.t
| les murs étoient décorés de peintures, 1a plupart
[ de la main de Polygnote.
\ Nous avons tiré ces détails sur les propylées
d’Athènes, de l’ouvrage des Antiquités de cette
! Vl‘ie, par Stuart , tome I I , ch. 5. L’ouvragé
des Antiquité^ inédites de l’Atlique, par la So-
P ciélé des Dileitanti, à Londres , va nous fournir
en parallèle, un monument tout semblable, celui
des propylées d’Eleusis.
Lorsque l’on compare ces deux monumens, soit
dans ta disposition de leurs plans , soit dans cellè
dé leur élévation et de leurs-détails, on seroit
tenté de croire que l’un des deux a été une imitation
de l’autre, à moins qu’on ne doive penser
que ce genre d’édifice, ainsi que presque tous
ceux des Anciens , avoit reçu de certains usages
une sorte de .type consacré par le temps, sur le quel
dévoient se régler les compositions de l’architecture.
Les propylées d’Eleusis présentent le même
plan que ceux d’Athènes , et ce qu’il faut appeler
ta même masse. C’est un péristyle dorique de
chaque côté, formé de six colonnes, dont l’cntre-
colonriement du milieu plus large que les autres,
tast déterminé par la largeur qui sépare les deux
rangs des trois colonnes intérieures du vestibule.
Ce vestibule interne est également divisé par
ises deux rangs de colonnes en trois allées, qui
conduisent aux portes.
Les portes aussi sont au nombre de cinq. Celle
du milieu est de beaucoup la plus large et ta plus
haute. Ses quatre portes collatérales vont de 1a
même manière qu’à Athènes , diminuant progressivement
de largeur et de hauteur. On voit ici que
les portes sont toutes lès cinq ornées d’un cham-
\branle- . ., '
Une variété remarquable existé toutefois dans
l’intérieur du vestibule. C’est celle des colonnes
qui en soutiennent les plafonds. Elles sont d’ordre
ionique, et au lieu de s’élever comme les colonnes
doriques du même lo c a l, à Athènes , sur
un piédestal, elles posent à terré avec leur simple
base. Le chapiteau de cet ordre est le même que
celui du temple d’Erèchtée à Athènes, quant à
la spirale qui forme lès volutes.
Généralement il sé trouve plus d’unité dans
l’élévation des propylées d?Eleusis. Probablement
la disposition montueus.e du terrain à l’Acropole
d’Athènes, disposition que nous ont prouvée les:
trois plans, et par conséquent les trois rangs de
dégrés successifs, sur lesquels l’édifice s’élève,
ont empêché de soumettre la hauteur des constructions
à une même ligne de niveau. A Eleusis,
au contraire , les trois corps dont les propylées se-
composent, assis sur un terrain plus égal, sont
tous de la même hauteur , et leurs trois plafonds
se raccordent sous un seul niveau.
Ces plafonds sont distribués avec la plus grande
élégance. Us figurent des rangs de solives en
marbre , entre lesquelles se trouvent sculptés des
caissons à deux rangs d’ornemens en renfoncement,
et dont le fond est occupé uniformément
par une étoile. Tout cet édifice , si l’on en croit
les dessins qu’on en a , avoit une toiture formée;
de grandes dalles de marbre en manière de tuiles,
encastrées avec un art extrême , et produisant au
dehors un effet des plus agréables.
PROPYLON î est un mot qui lignifie avant-
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