ils décrivent, avec l’exaélitude la plus fcrupuieufe, toutes
les parties du corps des animaux les plus informes, ils
femblent même préférer celles qui paroilfent le moins
importantes, & dont les variétés font le plus accidentelles.
Ces obfervateurs appelants dans les détails, ne
s’élèvent jamais au deflus de leur fujet pour en apprécier
la valeur; les matériaux qu’ils raffemblent font fi frêles,
qu’ils ne peuvent jamais entrer dans la conftruétion d’un
édifice folide : cependant ils s’efforcent de les décrire
avec une emphafe, que la futilité du fujet rend encore
plus ridicule ; ils croient que tout ce qu’ils ont pris la
peine de voir, mérite celle d’être lû : mais quelque
ardeur que l’on ait dans ce fiècle pour l’étude de i’Hif-
toire Naturelle, on ne peut pas faire grand cas de ces
prétendues merveilles, & on doit craindre de s’engager
dans des détails fi infructueux.
Le choix des faits eft la partie effentieile de la
compofition des defcriptions, mais il ne fuffiroit pas
feul fins le choix de l ’expreflion. Toute defcription
conçue en termes inufités ou équivoques eft nulle
pour la plufpart des leéteurs, parce qu’il en eft peu
qui veuillent étudier & deviner des chofes qui devraient
être claires & faciles, ou qui foient en état de fuppléer
au défaut de l’expreftion : la defcription eft un tableau,
fi fes couleurs font fauffes & confufes elles n’expriment
aucune image vraie & terminée; on ne voit qu’un
nuage, & on ne diftingue rien. T elles, font les defcriptions
compofées de termes barbares que perfonne
n’entend,
n’entend, & qui n’ont de fignification que dans la tête
des auteurs qui les ont créés. Il ne faut pas s’imaginer
que les lecteurs apprendront volontiers une nouvelle
langue pour lire une defcription; & encore quand ils
le voudraient, comment parviendroient-ils à entendre
des mots compofés fins aucune règle confiante, & un
idiome étranger dans toutes les langues! 11 en eft de
ces nouveautés dans i’exprefiion comme du changement
des noms le plus généralement reçus : je ne
conçois pas qu’un auteur foit affez dcraifonnable pour
donner des noms à des chofes déjà nommées, & pour
employer des expreftions inintelligibles; c ’eft vouloir
parler pour n’être pas écouté, & écrire pour n’être
pas entendu. Il faut appeler chaque chofe par le nom
le plus connu, nommons-la comme elle a été nommée,
& épuifons toutes les expreftions de notre langue avant
que d’en emprunter dans une autre: notre feul objet
eft de faire connoître la chofe <& de nous exprimer de
la manière la plus claire, car les noms n’ont jamais
manqué aux chofes connues, & les langues font affez
riches pour qui lait écrire.
Il doit encore y avoir dans les defcriptions une autre
forte d’expreffion bien différente de celle des mots ;
c ’eft l’expreflion de la chofe, c’eft la compofition
du tableau, qui eft bien plus difficile que celle des
couleurs. Chaque objet fe préfente fous un afoeét
qui lui eft particulier, par conféquent chaque objet
doit etre décrit d’une manière particulière pour que la
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