par deux impulsons contraires qui fe détruifent mutuellement,
il demeure en équilibre entre ces deux puiflànces
égaies ; la cattfe déterminante de fon mouvement étant
contre-balancée, il ne fe mouvra pas pour atteindre à
l ’objet de fon appétit. Mais les ébranlemens de l’appétit
& de la répugnance, ou, fi l’on veut, du plaifir &
de la douleur, fu b fi fiant toujours enfemble dans une
oppofition qui en détruit les .effets, il fe renouvelle en
même temps dans le cerveau de l’animal un troifiéme
ébranlement, qui a fouvent accompagné les deux premiers
; e ’eft l ’ébranlement caufé par l ’aétion de fon
maître, de la main duquel il a fouvent reçu ce morceau
qui eft l’objet de fon appétit; & comme ce troifiéme
ébranlement n’elt contre-balancé par rien de contraire;,
il devient la caufe déterminante du mouvement. Le
chien fera donc déterminé à fe mouvoir vers fon maître
St à s’agiter jufqu’à ce que fon appétit foit fàtisfait en
entier.
On peut expliquer de la même façon & par les
mêmes principes toutes les aélions des animaux, quelque
compliquées qu’elles piaffent paroître, fans qu’il
foit befoin de leur accorder, ni la penfée, ni la réflexion,
leur fens intérieur fuffit pour produire tous leurs mou-
vemens. Il ne refie plus qu’une chofe à éclaircir, c ’efl
la nature de leurs fenfàtions, qui doivent être, fuivant
ce que nous venons d’établir, bien différentes des
nôtres. Les animaux, nous dira-t-on, n’ont-ils donc
aucune connoiflancei leur ôtez-vous la confcience de
leur
leur exiflence, le fentiment! puifque vous prétendez
expliquer méchaniquement toutes leurs aélions, ne les
réduifez- vous pas à n’être que de Amples machines,
que d’infenfibles automates!
Si je me fuis bien expliqué, on doit avoir déjà vu
que, bien loin de tout ôter aux animaux, je leur accorde
tout, à l’exception de la penfée St de la réflexion ; iis
ont le fentiment, ils l ’ont même à un plus haut degré
que nous ne l’avons; ils ont aufïï la confcience de leur
exiflence aétuelle, mais ils n’ont pas celle de leur exif-
tence paffée; ils ont des fenfàtions, mais il leur manque
la faculté de les comparer, c ’eft-à-dire, la puiffànce qui
produit les idées; car les idées ne font que des fenfàtions
comparées, ou, pour mieux dire, des aflociations
de fenfàtions,
Confidérons en particulier chacun de ces objets. Les
animaux ont le fentiment, même plus exquis que nous
ne l ’avons: je.crois ceci déjà prouvé par ce que nous
avons dit de l’excellence de ceux de leurs fens qui font
relatifs à l’appétit ; par la répugnance naturelle & invincible
qu’ils ont pour de certaines chofes, & l’appétit
confiant St décidé qu’ils ont pour d’autres chofes ; par
cette faculté qu’ils ont bien fupériéurement à nous, de
diflinguer fur le champ & fàns aucune incertitude ce
qui leur convient de ce qui leur efl nuifible. Les animaux
ont donc comme nous dé la douleur & du plaifirb ils
ne connoiflent pas le bien Si le mal, mais ils le fen-
tent : ce qui leur eft agréable efl bon, ce qui leur efl
Tome IV , JR