temps une confiance qui paraît admirable dans l’elpèce
entière.: le premier animal, le premier cheval, par
exemple, a été le modèle extérieur & le moule intérieur
fur lequel tous les chevaux qui font nés, tous ceux
qui .exiftent & tous ceux qui naîtront ont été formés;
mais ce modèle, dont nous ne connoiffons que les
copies, a pû s’altérer ou fe perfectionner en communiquant
là forme & fe multipliant : l ’empreinte originaire
iubfille en Ion entier dans chaque individu ; mais quoiqu’il
y en ait des millions , aucun de ces individus n’efl
cependant femhlable en tout à un autre individu, ni par
conféquent au modèle dont il porte l’empreinte: cette
différence qui prouve combien la Nature eft éloignée
de rien faire d’abfolu, & combien elle fait nuancer fes
ouvrages, fe trouve dans l’elpèce humaine, dans celles
de tous les animaux, de tous les végétaux, de tous les
êtres en un mot qui fè reproduifent; & ce qu’il y a de
fingulier, c’efl qu’il femble que le modèle du beau &
du Jbon foit difperfé par toute la terre, & que dans chaque
climat il n’en réfide qu’une portion qui dégénère
toujours, à moins qu’on ne la réuniffe avec une autre
portion prife au loin ; en forte que pour avoir de bon
grain, de belles fleurs, &c. il faut en échanger les graines
& ne jamais les femer dans le même terrein qui les a
produits; & de même, pour avoir de beaux chevaux, de
bons chiens, &c. il faut donner aux femelles du pays
des mâles étrangers, & réciproquement aux mâles du
pays des femelles étrangères; fans cela les grains, les
fleurs,
fleurs, les animaux dégénèrent, ou pluflôt prennent urte
fî forte teinture du climat, que la rpatière domine fur
la forme & femble l’abâtardir: l’empreinte relie, mais
défigurée par tous les traits qui ne lui font pas effentiels;
en mêlant au contraire les races, & fur-tout en les
renouvelant toujours par des races étrangères, la forme
femble fe perfeétionner, & la Nature fe relever & donner
tout ce qu’elle peut produire de meilleur.
C e n’efl point ici le lieu de donner les raifons générales
de ces effets, mais nous pouvons indiquer les
conjeélures qui fe préfentent au premier coup d’oeil;
on fait par expérience que des animaux ou des végétaux
tranlpiantés d’un climat lointain, fouvent dégénèrent 8c
quelquefois fe perfectionnent en peu de temps, c eft—
à-dire, en un très-petit nombre de générations: il eft
aifé de concevoir que ce qui produit cet effet eft la
différence du climat & de la nourriture ; l’influence
de ces deux caufes doit à la longue rendre ces animaux
exempts ou fufceptibles de certaines affections,
de certaines maladies; leur tempérament doit changer
peu à peu; le développement de la forme, qui dépend
en partie de la nourriture & de la qualité des humeurs,
doit donc changer auffi dans les générations: ce changement
eft à la vérité prefque infenfible à la première
génération, parce que les deux animaux, mâle & femelle,
que nous fuppofons être les louches de cette race, ont
pris leur coniîltance & leur forme avant d avoir ete
dépayfés, & que le nouyeau climat 8c la nourriture
Tome IV. E e