398 H i s t o i r e N a t u r e l l e
» fortes d’ânes en Perfe, les ânes du pays, qui font lents
» & pefàns, & dont on ne le fert que pour porter des
« fardeaux, & une race d’ânes d’Arabie, qui font de fort
» jolies bêtes & les premiers ânes du monde; ils ont lé
« poil poli, la tête haute, les pieds légers, ils les lèvent
« avec aélion, marchant bien, & l’on ne s’en fert que
» pour montures ; les feiles qu’on leur met font comme
» des bâts ronds & plats par deffus, elles font de drap
» ou de tapifferie avec les harnois & les étriers, on s’alfied
»> delfus plus vers la croupe que vers le col : il y a de
» ces ânes qu’on achette jufqu’à quatre cens livres, Si
» l’on n’en fàuroit avoir à moins de vingt-cinq piftoles;
„ on les panfe comme les chevaux, mais on ne leur
„ apprend autre chofc qu’à aller l’amble, & l’art de les y
» drelTer efl de leur attacher les jambes, celles de devant
„ & celles de derrière du même côté, par deux cordes
>■> de coton, qu’on fait de la mefure du pas de l’âne qui
3, va l’amble, & qu’on fulpend par une autre corde palfée
„ dans la fàngle à l’endroit de l’étrier ; des efpèces
» d’Ecuyers les montent foir & matin & les exercent à
„ cette alure; on leur fend les nafeaux afin de leur donner
„plus d’haleine, & ils vont fi vite, qu’il faut galoper
pour les fuivre. >3
Les Arabes, qui font dans l’habitude de conferver
avec tant de foin & depuis fi long-temps les races de
leurs chevaux, prendroient-ils la même peine pour les
ânes.’ ou pluftôt ceci ne femble-t-il pas prouver que le
climat d’Arabie efl le premier & le meilleur climat pour
les uns Se pour les autres! de-là ils ont paffé en Barbarie3,
en Egypte, où ils font beaux & de grande taille,
auffi-bien que dans les climats exceffivement chauds,
comme aux Indes & en Guinée b, où ils font plus
grands, plus forts Si meilleurs que les chevaux du pays;
ils font même en grand honneur à Maduréc , où l ’une
des plus confidérables Si des plus nobles tribus des
Indes les révère particulièrement, parce qu’ils croient
que les âmes de toute la nobleffe paffent dans le corps
des ânes ;' enfin l’on trouve les ânes en plus grande
quantité que les chevaux dans tous les pays méridionaux,
depuis le Sénégal jufqu’à la Chine; on y trouve
aufîi des ânes fàuvages plus communément que des chevaux
fàuvages: les Latins, d’après les Grecs, ont appelé
l’âne fàuvage onager, onagre, qu’il ne faut pas confondre,
comme l’ont fait quelques Naturalifles & plufieurs
voyageurs, avec le zèbre, dont nous donnerons l’hifloire
à part, parce que le zèbre efl un animal d’une efpèce
différente de celle de l’âne. L ’onagre ou l’âne fàuvage
n’efl point rayé comme le zèbre, & il n’efl pas, à
beaucoup près, d’une figure auffi élégante : on trouve
des ânes fàuvages dans quelques ifles de l’Archipel,
Si particulièrement dans celled de Cérigo ; il y en a
■' Voyez le voyage de Shaw, tome 1 , page 308.
b Voy. le voyage de Guine'e de Bofman. Utrecht, 1703, pages
233 èr 240.
‘ Voy. Jes lettres édifiantes, douzième recueil,page 3 6.
* Voyez ie recueil de Dapper, pages 1 83 à 1 378.