4.64 H i s t o i r e N a t u r e l l ë
pan Ce du boeuf, par exemple, n’eft pas due en entier
à la Nature, la panfe n’eft pas telle par fa conformation
primitive, elle, ne le devient que fuccelfivement & par
le grand volume des alimens; car dans le veau qui
vient de naître, & même dans le veau qui eft encore
au lait & qui n’a pas mangé d’herbe, la panfe, comparée
à la caillette, eft beaucoup plus petite que dans
le boeuf: cette grande capacité de la panfe ne vient
donc que de l’extenfion qu’occafionne le grand volume
des alimens, j’en ai été convaincu par une expérience
qui me paraît décifive. J’ai fait nourrir deux agneaux
du même âge & fevrés en même temps, l’un de pain,
& l’autre d’herbe ; les ayant ouverts au bout d’un an,
j ’ai vu que la panfe de l’agneau qui avoit vécu d’herbe,
étoit devenue plus grande de beaucoup que la panfe de
celui qui avoit été nourri de pain.
On prétend que les boeufs qui mangent lentement
réfiftent plus long-temps au travail que ceux qui mangent
vite; que les boeufs des pays élevés & fecs font
plus vifs, plus vigoureux & plus fains que ceux des
pays bas & humides ; que tous deviennent plus forts
lorfqu’on les nourrit de foin fec que quand on ne leur
dojnne que de l’Herbe molle; qu’ils s’accoutument plus
difficilement quelfes chevaux au changement de climat,
& que par cette raifon l’on ne doit jamais acheter que
dans fon voifinage des boeufs pour le travail,
En hjver, comme les boeufs ne font rien, il fuffira
de les nourrir de paille & d’un peu de foin, mais dans
le
le temps des ouvrages on leur donnera beaucoup plus
de foin que de paille, & même un peu de fon ou
d’avoine avant de les faire travailler; l’été, fi le foin
manque, on leur donnera de l’herbe fraîchement coupée
, ou bien de jeunes pouffes & dés feuilles de frêne,
d ’orme, de chêne, &c. mais en petite quantité, l’excès
de cette nourriture, qu’ils aiment beaucoup, leur caufànt
quelquefois un piffement de fàng ; la luzerne, le fainfoin,
la vefce, foit en vert ou en fec, les lupins, les navets,
l ’orge bouilli, &c. font auffi de très-bons alimens pour
les boeufs ; il n’eft pas néceflàire de régler la quantité
de leur nourriture, ils n’en prennent jamais plus qu’il
ne leur en faut, & l’on fera bien de leur en donner
toujours affez pour qu’ils en laiflent; on ne les mettra
au pâturage que vers le 1 y de mai, les premières
herbes font trop crues, & quoiqu’ils les mangent avec
avidité, elles ne laiffent pas de les incommoder; on les
fera pâturer pendant tout l’été, & vers le 1 y oélobre
on les remettra au fourrage, en obfervant de ne les pas
faire paffer brufquement du vert au fec & du fec au
vert, mais de les amener par degrés à ce changement
de nourriture.
La grande chaleur incommode ces animaux, peut-
être plus encore que le grand froid; il faut pendant
l ’été les mener au travail dès la pointe du jour, les
ramener à l’étable ou les laiffer dans les bois pâturer à
l’ombre pendant la grande chaleur, & ne les remettre
à l’ouvrage qu’à trois ou quatre heures du foir ; au
Tome I V Nnn