on fent encore long - temps après cette mativaife odeur
ou ce mauvais goût : & enfin lorfqu’on exerce trop le
fens du toucher fur le même objet, lorfqu’on applique
fortement un corps étranger fur quelque partie de notre
corps, l ’impreffion fubfifte auffi pendant quelque temps,
& il nous femble encore toucher & être touché.
Tous les fens ont donc la faculté de conferver plus
ou moins les impreffions des caufes extérieures, mais
l ’oeil l’a plus que les autres fens; & le cerveau, où
réfide le fens intérieur de l’animal, a éminemment cette
propriété, non feulement il conferve les impreffions
qu’il a reçues, mais il en propage l’action en communiquant
aux nerfs les ébranlemens. Les organes des fens
extérieurs, le cerveau oui eft l’organe du fens intérieur,
la moelle épinière, & les nerfs qui fe répandent dans
toutes les parties du corps animal, doivent être regardés
comme faifant un corps continu, comme une machine
organique dans laquelle les fens font les parties fur lef-
quelles s’appliquent les forces ou. les- puifïànces. extér
rieures. ; le cerveau eft l ’hypomochlion ou la maffe
d’appui, & les nerfs font les parties que i ’aétion des
puiffances met en mouvement. Mais ce qui rend cette
machine fi différente des autres, machines, c’eft que
l ’hypomochlion eit non feulement capable de réfiftance
& de réaction, mais qu’il eft lui-même aétif, parce
qu’il conferve long-temps l ’ébranlement qu’il a reçu ;
& comme cet organe intérieur, le cerveau & les membranes
qui l’environnent, eft d’une très-grande capacité;
SUR LA NATURE DES ANIMAUX. 29.
& d’une très-grande fenfihilité, il peut recevoir un
très-grand nombre d’ébranlemens fiicceffifs & contemporains
, & les conferver dans l ’ordre où il les a reçus,
parce que chaque impreffion n’ébranle qu’une partie du
cerveau, & que les impreffions fucceffives ébranlent différemment
la même partie, & peuvent ébranler auffi
des parties voifines & contiguës.
Si nous flippofions un animal qui n’eût point de
cerveau, mais qui eût un fens extérieur fort fenfible &
fort étendu, un oeil, par exemple, dont la rétine eut une
auffi grande étendue que celle du cerveau, & eût en
même temps cette propriété du cerveau de conferver.
long-temps les impreffions qu’elle auroit reçues ; il eft
certain qu’avec un tel fens l’animal verroit en même
temps, non feulement les objets qui le frapperoient
actuellement, mais encore tous ceux qui l’auroient
frappé auparavant, parce que dans cette fuppofition les.
ébranlemens fubfiftant toûjours, & la capacité de la
rétine étant affez grande pour les recevoir dans des parties
différentes , il apercevrait également & en même
temps les premières & les dernières images; & voyant
ainfi le paffé & le préfent du même coup d’oeil, il
ferait déterminé méchaniquement à faire telle ou telle
action en conféquence du degré de force & du nombre
plus ou moins grand des ébranlemens produits par
les images relatives ou contraires à cette, détermination..
Si le nombre des images propres à faire naitre l ’appétit,
ffirpafïe celui des. images, propres- a ffaire naître la'-
D iij;