les chevaux des pays chauds ont les os, la corne, les
mufcles plus durs que ceux de nos climats ; que quoique
la chaleur convienne mieux que le froid à ces
animaux, cependant le chaud excelfif ne leur convient
pas ; que le grand froid leur eft contraire ; qu’enfin leur
habitude & leur naturel dépendent prefque en entier dit
climat, de la nourriture, des foins & de l’éducation..
En Perfc, en Arabie & dans plufieurs autres lieux de
1 Orient, on n’elî pas dans l’ufage de hongrer les chevaux,
comme on le lait fi généralement en Europe & à
la Chine : cette opération leur ôte beaucoup de force,
de courage, de fierté, &c. mais leur donne de la douceur,
de la tranquillité, de la docilité; pour la faire,
on leur attache les jambes avec des cordes, on les
renverfe fur le dos , on ouvre les hotirfes avec un
biftouri, on en tire les tefticules, on coupe lesvaiffeaux
qui y aboutiffent &les ligamens qui les foûtiennent, &
après les avoir enlevés on referme la plaie, & on a foin de
faire baigner le cheval deux fois par jour pendant quinze
jours, ou de l ’étuver fouvent avec de l’eau fraîche, &
de le nourrir pendant ce temps avec du fon détrempé
dans beaucoup d’eau, afin de le rafraîchir : cette opération
fe doit faire au printemps ou en automne,le grand
chaud & le grand froid y étant également contraires. A
1 égard de l’âge auquel on doit la faire , il y a des ufàges
différens : dans certaines provinces on hongre les chevaux
dès l’âge d’un an ou dix-huit mois, auffi-tôt que
les .tefticulesfont bien apparensau dehors; mais l ’ufàge
Je plus générai & le mieux fondé efl de ne les hongrer
qu’à deux & même à trois ans, parce qu’èn les hongrant
tard ils confervent un peu plus des qualités attachées
au sèxe mafculin. Pline (t) dit que les dents de lait ne
tombent point à un cheval qu’on fait hongre avant
qu’elles foient tombées: j’ai été à portée de vérifier
ce fait, & il ne s’eft pas trouvé vrai ; les dents de lait
tombent également aux jeunes chevaux hongres & aux
jeunes chevaux entiers, & il eft probable que les anciens
n’ont hafàrdé ce fait que parce qu’ils l’ont cru
fondé fur l’analogie de la chute des cornes du cerf, du
chevreuil, &c. qui en effet ne tombent point lorfque
l ’animal a été coupé. Au relie un cheval hongre n’a
plus la puiflànce d’engendrer, mais il peut encore s’accoupler,
& l’on en a vu des exemples.
Les chevaux, de quelque poil qu’ils foient, muent
comme prefque tous les autres animaux couverts de poil,
& cette mue fe fait une fois l ’an, ordinairement au printemps,
& quelquefois en automne; ils font alors plus
foibles que dans les autres temps, il faut les ménager,
les foigner davantage, & les nourrir un peu plus largement.
Il y a auffi des chevaux qui muent de corne,
cela arrive fur-tout à ceux qui ont été élevés dans des
pays humides & marécageux, comme en Hollande.
Les chevaux hongres & les jumens henniffent moins
fréquemment que les chevaux entiers, ils ont auffi la
ft) Voy. Plin. Hift. Nat. in- 8.° Paris, 1683, tome II, ïiv. II,