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obligé de refier d’abord dans celles où il fe trouve
placé, & il ne peut s’en frayer de nouvelles qu’à mefure
qu’il fait des progrès.
Celui qui décrit doit au contraire rendre compte au
public de la méthode qu’il fuit en faifant fes defcrip-
tions : le choix de cette méthode eft très-important,
puifque non feulement la clarté de la defcription en
dépend, mais encore les conféquences que l’on en peut
tirer. H eft donc abfolument néceffaire de convenir de
principes & de règles qui foient exactement fuivis dans
toutes les defcriptions, & de fe propofer une méthode
de defcription au lieu des méthodes de nomenclature,
qui ont occupé jufqu’ici la plufpart des Naturaliftes.
Une nomenclature railonnée n’eft qu’une fuite de
définitions. Que l’on examine toutes les diftributions
méthodiques qui ont été faites fur les différens règnes
de l’Hiftoire Naturelle, on verra clairement que chaque
phrafe eft la définition d’une elpèce : les caraéteres
génériques repréfentent une définition générale de toutes
les efpèces contenues fous un même genre; enfin on
trouvera dans les ordres ou dans les clalfes, des definitions
encore plus générales, qui comprennent toutes
celles des genres : telles font les méthodes de nomenclature
que fion donne pour principes dans l’étude de
l ’Hiftoire Naturelle ; c’eft l’état préfent de cette fcience
dans la plufpart des auteurs. Les Naturaliftes font-ils
donc encore de ces fiècles de ténèbres, où les univer-
Jaux & les cathégories de la fcholaftique étoient l’objet
des méditations de tous les Savans! on s’efforçoit alors
de réunir toutes les parties dçis Sciences dans une formule,
en repréfentant l’Univers entier dans l’arbre de
Porphyre, qui n’eft cependant qu’une méthode de nomenclature
& une fuite de définitions, comme nos diftributions
méthodiques d’Hiftoire Naturelle.
Pour peu que l’on réfléchilfe flir les progrès des
Sciences, on verra que moins elles ont été avancées,
plus les hommes fe font cru capables de tout entendre
& de tout expliquer. On ne doutoit de rien dans la
philofophie de l’école ; comme on fàifoit confifter la
fcience dans les définitions, chacun vouloit définir avant
que d’avoir bien connu, & on n’avoit par ce moyen
qu’un fimulacre trompeur des fciences humaines : à
mefure que l’on a acquis de vraies connoiflànces, on
a reconnu l’erreur. Aujourd’hui on eft bien convaincu
qu’il eft très - difficile de définir les chofes que l’on
connoît le mieux, parce que la définition n’eft que le
réfultat de nos connoiflànces, qui font toujours bornées,
& même fautives. Les Naturaliftes nomencfateurs font
les feuls qui gardent l’ancien préjugé, ils retardent
l’avancement de l’Hiftoire Naturelle de la même façon
que les philofophes fcholaftiques ont arrêté pendant fi
long temps le progrès des Sciences; ils veulent définir
les differentes productions de la Nature avant que de les
avoir bien décrites : c ’eft vouloir juger avant que d’avoir
connu, & vouloir apprendre aux autres ce que l ’on
ignore foi-même. Auffi les méthodes de nomenclature,
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