nous établîmes une comparaison de nos grades
avec ceux de l’armée de terre, et nous dîmes
qu’un major commandoit un bataillon, et un
capitaine une compagnie. Nous nous imaginâmes
ainsi en être quittes; mais j’aurai occasion
de parler plus tard des chicanes qu’ils
nous firent à cause de cette question.
Les Japonois s’informèrent ensuite du nom
de notre bâtiment, de ses dimensions et du
nombre de ses canons. Enfin le commandant
demanda si les Russes n’âvoient pas changé
de religion, puisque Laxmann portait une
longue queue èt beaucoup de cheveux saupoudrés
de farine, tandis que nous les avions
coupés très-courts. Nous lui répondîmes que
la manière d’accommoder les cheveux n’était
pas chez nous une affaire de dogme; et les
Japonois se mirent à rire en témoignant une
surprise extrême de ce qu’il n’y avoit pas
de loi précise sur ce point; puis ils écrivirent
aussi cette réponse, Pour terminer, ils
exigèrent que nous eussions à leur indiquer,
sur la carte, la route que nous avions suivie
depuis notre départ de Saint-Pétersbourg. Ils
nous donnèrent à cet effet la mappemonde de
l’académie, dessinée du temps de feu l’impératrice
Catherine II. Je leur indiquai le cours-
( 177 )
de notre navigation, et je demandai où était
I3. carte que j’avois destinée pour en faire présent
au commandant de Kounaschir, attendu
qu’elle étoit meilleure , et que notre voyage
y était déjà tracé en partie. Les Japonois répliquèrent
qu’ils n’avoiént reçu aucune carte,
qu’ils nous la montreroient dès qu’elle seroit
entre leurs mains, et qu’en attendant, celle
qu’ils nous montroient était assez bonne. Us
voulurent connoître non seulement le cours
général de notre navigation, mais encore le
temps précis auquel nous étions en tel ou tel
endroit. Nos réponses et nos explications furent
mises par écrit comme auparavant; mais
préalablement on demandoit toujours à l’interprète
s’il traduisoit exactement ce que nous
lu i disions. Notre truchement n’étant pas
parfaitement versé dans la langue, et les Japonois
exigeant des réponses d’une ponctualité
scrupuleuse, l’entretien dura plusieurs
heures. Le commandant en chef nous d it, en
nous congédiant, qu’il nous feroit appeler de
nouveau lorsque ce seroitnécessaire, et qu’en
attendant nous pouvions nous reposer.
Le jourbaissoit déjà quand on nous fit sortir
du château, dans le même ordre que nous
avions suivi en venant. Le nombre des specta-
T om . I . 12