f 118 )
Dans la nuit du i 5 , on fit une pause auprès
d’un grand feu sur le rivage. Qn nous délia
les pieds, et l’on nous conduisit l’un après
l ’autre au brasier, où nous pûmes nous
chauffer. On gravit ensuite une haute montagne
, et l’on entra dans une grange vide qui
pouvait avoir servi de magasin. Elle n’avoit
d’autre ouverture que la porte. On nous
donna des couvertures, on nous coucha, on
nous lia de nouveau les pieds, et l’on nous fit
manger du riz et du poisson. Les Japonois s©
mirent à boire du thé et à fumer, et ne s’in-»
quiétèrent plus de nous. Le i 5 , il plut avec
violence toute la journée ; nous restâmes où
nous étions. On nous apporta trois fois du
riz , du poisson et du coulis dç champignon.
Le 16 , dans la matinée , le temps s’éclaircit,
et l’on se prépara pour le départ. On ôta nos
liens au-dessous des mollets,mais on ne délia
ceux au-dessus des genoux, qu’autant qu’il le
Eallo.it pour que nous pussions marcher; on
nous mit nos bottes, et l ’on nous fit sortir. Alors
on no us demanda si nous aimions mieux allée
à pied ou ep litière. Nons préférâmes la pre-?
mière manière, à l ’exception d’A lexis qui
aYoit înal aux pieds, L ’oyagoda, dè ce lieu
( “ 9 )
fut long-temps à ordonner la marche, enfin
elle partit. En avant.marchoient deux Japonois
du village voisin, l’un à côté de l ’autre ;
chacun portoit un bâton d’un bois rouge très-
artistement sculpté; leur emploi étoit d’indiquer
le chemin. A u x limitesdu village voisin,
ils furent remplacés par deux autres indicateurs
munis de bâtons semblables. Ensuit©
marchoient trois soldats de front ; j’étois derrière
eu x , ayant d’un côté un soldat, de l’autre
un conducteur, qui, avec un rameau, chas-
soit les mouches; derrière moi, il y enavoit
un autre qui tenoit les bouts des cordes dont
j ’étois garrotté. On voyoit après cela un peloton
de Kouriles qui portoit ma litière (1) ,
et qu’un autre peloton suivoit pour" relever
les premiers quand ils étoient fatigués.
MM. Moor et Chlebnikoff , enfin tous les
matelots chacun à la suite l’un de l’autre, et
Alexis que l’on portoit, étaient accompagnés
(1 ) C ’étoit une planche longue de quatre pieds à quatre
pieds e t demi ; par chaque coin passoient des cordes qui
se réunissoîent à quatre pieds au-dessus, et que tra v e r -
soit une perche. Les K o u r ile s , trois en-avant et trois en
arrière , portoient cette perche sur leurs, épaules. O n
avoit couvert la litière avec des nattes pour la garantir
de la pluie.