d’ailleurs, de plusieurs autres Russes qui
leur étoient connus, de Japonois qui avoient
séjourné en Russie,et qui,nous disoient-ils,
avoient été très-satisfaits de l’accueil et du
traitement qu’ils y avoient reçu; nous étions
dans le doute de savoir à quel motif nous devions
attribuer leur discrétion; vouloient-ils,
en évitant de parler des actions de nos compatriotes
qui ne de voient pas nous faire attendre,
d’eux beaucoup, de reconnoissance,
vouloient-ils, dis-je, ne pas nous désespérer,
ou bien ne pas nous faire rougir de honte
pour des fautes auxquelles nous n’avions participé
en rien. Au reste ; non seulement les
corn m an dan s , m ais aussi les habita ns d es v il-
lagés que nous traversions, nous traitaient
très-bien. A notre entrée et ànotre sortie, nous
étions entourés d’une foule d’hommes, de
femmes et d’enfans, que la curiosité de nous
voir rassembloit; mais jamais nous n’avons
eu à nous plaindre de là moindre offense ni
de la moindre raillerie de leur part. Tous, et
particulièrement les femmes, nous considé-
roient d’un air affligé, et sembloient compatir
à nos maux. Si nous demandions à boire , ils
cherchoient à l’énvi à nous satisfaire. Plusieurs
sollicitaient de nos gardes la permissxon
de nous régaler; s’ils l’obtenoient, ils
apportaient du saki, des confitures, des fruits,
et toutes sortes de choses. Les commandans
nous envoyoient quelquefois de bon thé et
du sucre (r).
Les Jâponois nous questionnoient souvent
(1) Lgs Japonois o n t , dans leur p a ys , du thé vert e t
du thé noir*; mais ce dernier est très-mauvais, et ne re s semblé
à celui de la Chine que par la couleur, car, pour
le goût et l ’odeur, il en diffère totalement, Les Japonois
le boivent constamment chaud et fro id , mais sans su c r e ,
comme les Russes boivent le kvass. Us boivent le thé v ert
rarement , et comme une friandise. Us le font auparavant
g r ille r ou chauffer au feu dans une petite caisse de papier,
jusqu?à ce qu’il ait uhe odeur très-forte. Ils le je ttent
alors dans une théyère' de cuivre pleine d’éau b o u illante.
Cela donne à leur thé une odeur et une saveur particulières
et qui nous semblèrent désagréables, mais que
les.Japonois aiment beaucoup. Ils n’ont pas de sucre.en
pain . Les Ilollandois leu r portent du sucre b rut ou
moscovade de première qualité. I l se vend très-cher,
danSf.de petites corbeilles rondes. Les Japonois préparent
aussi dit sù c rè 'en p o u d re , mais il est très-sale, noir, et
il sucre très-peu. L e s Japonois en mettent rarement
dans leur thé. Ils aiment mieux le manger à part ; ils en
prennent une cuillerée dans la main et font les friands
comme les petits enfans. Quand nous offrions %' nos gardes-
le suere qu’on nous don n o it, ils le refusoient toujours
avec de grandes cérémonies ; mais à peine étions-nous
endormis, qu’ils l’avaloient.