tusses retentirent tout-à-coup à mes oreille».
Je m’élançai de dessus mon banc, je courus
à la fenêtre qui donnoit sur la cloison du
bâtiment voisin, et j’entendis M. Moor qui
parloit à Schkaieff. Cette découverte inattendue
me causa le plus grand plaisir. Je
remerciai le Tout-Puissant de ce que du moins
mes compagnons n’étoient pas enfermés seuls,
et avoient l’occasion de se consoler, au lieu
de consumer leur temps dans la douleur et
le désespoir. Je conçus en même temps l’espérance
de voir arriver le moment où nous
pourrions nous communiquer nos projets et
nous enfuir ensemble. Tout ce que je pus
comprendre de la conversation, c’est que
M. Moor racontoit à Schkaieif un rêve où
il étoit question d’Archangel. Je grillois d’impatience
de leur faire connoître que j ’étois
leur voisin; mais je craignois que si je les
appelois, il n’en résultât des conséquences
fâcheuses. Cependant nos soldats et nos sur-
veillans se mirent à leur besogne, et leur
bruit étouffa peu à peu la vo ix de mes compagnons.
On m’apporta de l’eau chaude et de
l ’eau froide pour laver, et on tint la porte
ouverte tout le temps que cette opération
dura; dès que j ’eus fini, on referma la porte;
ensuite o n me donna mon déjeûner, mais je
ne pus encore rien manger.
Vers midi, parut dans le corridor un officier
avec un nouvel interprète kourile âgé
d’environ cinquante ans , un médecin et
Alexis. Nous apprîmes plus tard que l’interprète
se nommoit Vekara Koumaddjero, et
le médecin Togo. Us me parlèrent à travers
les barreaux. L ’officier s’informa de ma san té ,
me montra le médecin, et me fit dire que le
gouverneur de Matsmaï nous l’avoit envoyé
uniquement pour nous soigner. Pendant que
les Japonois se partaient entre eu x , je parvins
à apprendre d’Alexis que M. Chlebnikoff étoit
enfermé avec SimanofF, et Makaroff avec
Vassilieff; et que lui étoit seul, comme moi;
Alexis ajouta que leurs chambres étoient sans
fenêtres, par conséquent sombres, et en outre
très-sales. A midi l’on m’apporta mon dîner,
je le refusai; mais le garde ouvrit la porte,
marmotta de mauvaise humeur quelques
mots entre ses dents, me laissa ma portion ,
et referma la porte ; je ne pus encore rien
manger.
Dans la soirée, le même officier revint
avec Vekara l’interprète et A le x i s , pour
m’annoncer que le commandant de la ville